À Toronto, le cri du cœur du premier ministre haïtien

Le premier ministre haïtien, Jean-Henry Céant. Crédit image: Jean-Marie Vianney, m9medias.com

TORONTO – Le premier ministre haïtien Jean-Henry Céant a pris la parole à Toronto, alors qu’Haïti traverse une nouvelle période trouble, marquée depuis quelques mois par une colère populaire. Devant des leaders de la Ville reine, il a tenté de convaincre les investisseurs canadiens de choisir son pays, qui est sur la voie d’une économie plus juste, a-t-il dit.

ÉTIENNE FORTIN-GAUTHIER
efgauthier@tfo.org | @etiennefg

Très attendu, celui qui est en poste depuis moins de six mois a décidé de parler en français à ce parterre de leaders politiques, sociaux et économiques. « Je vais parler avec mon cœur », a-t-il lancé à quelques 200 acteurs clés de la Ville reine, qui écoutaient attentivement ses paroles par l’entremise d’un traducteur.

« Notre volonté de réussir va nous permettre de triompher, rattraper les retards et offrir un Haïti prospère et socialement juste », a-t-il affirmé. « Les investissements sont les remèdes destinés à vaincre l’extrême pauvreté et à combattre les inégalités », a poursuivi Jean-Henry Céant. Le « deuxième territoire indépendant de l’Amérique » souhaite « se repositionner sur le marché global », a-t-il lancé.

Son objectif était clair : s’attaquer aux préjugés persistants contre son pays. « Les opportunités sont beaucoup plus grandes que les menaces. La réalité beaucoup plus séduisante que les perceptions », a-t-il affirmé.

Il reste que la visite à Toronto du premier ministre haïtien s’inscrit dans un contexte très particulier. Jean-Henry Céant a été nommé le 5 août dernier par le président Jovenel Moise, dans un climat politique tendu.

Les 6 et 7 juillet derniers, Haïti a vécu des manifestations majeures, marquées par des émeutes, après l’augmentation du prix du carburant. Face à la colère des citoyens, le gouvernement a été forcé de démissionner.

Le premier ministre a tenté de dessiner un portrait plus positif de la situation. « Plus que jamais, Haïti est ouvert aux investisseurs et aux voyageurs », a-t-il lancé. « Si le changement comporte des risques, le changement s’accompagne surtout d’opportunités », a nuancé M. Céant.

Sa visite à Toronto n’est pas un hasard. Cœur financier du pays, c’est aussi une plaque tournante pour l’industrie minière. « Le secteur minier fait l’objet de beaucoup de recherches devant attirer les investisseurs », a-t-il expliqué dans la métropole canadienne qui compte le plus de sièges sociaux de grandes mines. « Je formule le vœu de recevoir beaucoup de chefs d’entreprise », a-t-il ajouté.

Désir de stabilité

Sur le désir de stabilité de son gouvernement, il a partagé ce message : « En Haïti, nous avons fait le choix de conduire un dialogue constructif, afin de s’assurer des réformes économiques et sociales. Tous les moyens seront utilisés pour s’assurer que notre vision est partagée par tous et traverse nos différences ».

Il a vanté la biodiversité du pays, la qualité de ses produits alimentaires et les opportunités en matière d’économie verte. « Nous n’avons pas le droit de rater cette transition », a-t-il lancé, évoquant le potentiel des énergies renouvelables pour amener de l’énergie « à des communes qui n’ont jamais eu l’électricité auparavant ».

Amikley Fontaine, Canadien d’origine haïtienne et président de la fondation Sylvenie Lindor, était présent lors du discours. Il est satisfait des propos du premier ministre.

« C’est un discours qui invite à l’investissement en Haïti. Le pays a besoin de ça pour dynamiser l’économie du pays. En tant que Canadien d’origine haïtienne, je plaide pour un partenariat plus serré. J’espère qu’on misera sur les Haïtiens qui sont ici. Nous pouvons agir comme entremetteur », a-t-il affirmé.

Le premier ministre haïtien doit rencontrer le premier ministre Justin Trudeau, ce jeudi en matinée, avant de retourner dans son pays.