Alberta : le nouveau programme académique assimilera-t-il les francophones?

Gracieuseté: ACFA

EDMONTON – C’est par une véritable levée de boucliers que quatre des principaux organismes franco-albertains répliquent au nouveau programme académique d’enseignement primaire qui doit entrer en vigueur en septembre 2022.

Ceux-ci estiment que « l’ébauche de curriculum proposée vise… l’assimilation des élèves francophones en leur enseignant principalement les perspectives anglo-saxonnes majoritaires. Les organismes remettent donc en question la capacité du gouvernement albertain de répondre adéquatement aux besoins éducatifs, culturels et linguistiques uniques et spécifiques des élèves francophones », peut-on lire dans le communiqué émis conjointement par les quatre organismes.

L’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA), la Fédération des conseils scolaires francophones de l’Alberta (FCSFA), la Fédération des parents francophones de l’Alberta (FPFA) et de la Société historique francophone de l’Alberta (SHFA) s’opposent fermement à ce qu’on impose aux enfants francophones de l’Alberta une traduction du curriculum des élèves anglophones de la province.

« Le curriculum utilisé par les écoles francophones, quant à lui, ne devrait pas être une simple traduction du curriculum général comme c’est le cas dans l’ébauche proposée. Le curriculum pour les écoles francophones aurait dû être développé de manière simultanée, mais rédigé avec une lentille francophone, visant à permettre aux élèves francophones de développer leur identité et leur appartenance à la communauté francophone et ce, à travers une diversité de matières », peut-on lire dans leur communiqué conjoint.

Ce que déplorent par-dessus tout les porte-parole de la francophonie albertaine, c’est l’absence totale d’une perspective qui les représente dans ce nouveau programme.

La directrice générale de la Fédération des Conseils Scolaires Francophones de l’Alberta, Anne-Marie Boucher estime à ONFR+ que cette ébauche « fait très peu pour que les élèves francophones puissent développer leur sentiment d’appartenance à la communauté, leur sentiment identitaire ».

La ministre de l’Éducation, Adriana LaGrange. Source : Facebook Adriana LaGrange

« Les organismes demandent donc à la ministre de l’Éducation, Adriana LaGrange, de réinstaller immédiatement la Direction de l’éducation française (DEF), qui a été abolie à l’automne 2017, et de la placer sous la responsabilité d’un(e) sous-ministre adjoint(e), en vue de retravailler rapidement le curriculum en collaboration avec les instances et experts francophones appropriés », peut-on aussi lire dans le communiqué.

L’opposition en colère

L’opposition officielle en Alberta n’a pas tardé elle non plus à dénoncer le contenu du nouveau programme académique des écoles primaires. La critique du Nouveau Parti démocratique (NPD) provincial en matière d’éducation, Sarah Hoffman, n’a pas ménagé le gouvernement de Jason Kenney dans ses propos.

« Le programme… est un véritable gâchis. Les conseils scolaires refusent de le piloter, et les groupes autochtones l’ont condamné. Les groupes d’éducation francophones de l’Alberta disent qu’il s’agit d’une tentative d’assimilation des francophones. Le programme manque de perspectives francophones et, dans de nombreux cas, semble être une simple traduction du programme anglophone. C’est inacceptable. Nous nous sommes engagés à renverser ce programme d’études et à ouvrir de vastes consultations sur un nouveau programme si nous formons le gouvernement en 2023 », nous explique la députée néo-démocrate, dans un échange de courriels.

La critique du Nouveau Parti démocratique provincial en matière d’éducation, Sarah Hoffman. Source : Facebook Sarah Hoffman

Des consultations utiles?

La province veut poursuivre les consultations tout en lançant un projet pilote afin de tester en classes les nouvelles orientations du programme. Mais voilà, tant du côté des conseils scolaires francophones que de celui de leurs contreparties anglophones, on peine à trouver des établissements disposés à servir de banc d’essai afin de tester ce programme en salles de classe.

Les conseils scolaires francophones ont demandé à maintes reprises d’être inclus dans le processus de développement du programme académique, mais sans succès jusqu’à présent. La communauté craint d’être tenue à l’écart des prochaines rondes de consultation.

Pourtant, selon la présidente de la Société historique francophone de l’Alberta, Claudette D. Roy, le programme doit impérativement être développé avec le concours des francophones.

« L’ébauche de curriculum ne répond pas aux besoins des élèves des écoles francophones. En plus, elle présente une approche qui prône l’assimilation vers la société anglodominante. Pour que notre système scolaire francophone soit complet, il faut un curriculum développé pour et par les francophones. »

Anne-Marie Boucher dit que son organisme, de même que la Fédération des parents francophones de l’Alberta, ont été invitées à participer aux prochaines consultations en tant que partenaires. Elle dit cependant ne pas savoir si les propositions que formuleront les francophones seront retenues.