Budget fédéral : un milliard de plus pour les minorités francophones

Budget fédéral Chrystia Freeland
La vice-première ministre et ministre des Finances, Chrystia Freeland, a déposé le budget fédéral ce mardi sur la Colline parlementaire. Crédit image: Stéphane Bédard

OTTAWA – Dans son budget 2023, le gouvernement fédéral bonifie son financement pour les minorités linguistiques au pays avec un milliard de dollars de plus sur cinq ans dans le cadre de son Plan d’action sur les langues officielles.

Le Plan d’action sur les langues officielles est une sorte de document qui guide le gouvernement durant cinq ans sur sa façon de gérer les enjeux relatifs aux communautés linguistiques en milieu minoritaire. Ce dernier est vu comme arrivant à un moment clé pour l’avenir du français au Canada, à la lumière des chiffres du dernier recensement.

Le nouveau financement d’Ottawa, qui est étalé sur cinq ans, se divise en trois parties : 374 millions de dollars en initiatives fédérales, 679 millions de dollars pour les ententes entre provinces et territoires et 25 millions de dollars pour le Programme de contestation judiciaire.

Le dernier Plan d’action se chiffrait à 2,8 milliards de dollars. Celui qui devrait être annoncé à la fin avril sera à hauteur de 3,8 milliards. Le fédéral bonifie aussi les services d’aide à l’emploi pour les minorités linguistiques.

Immigration francophone

De ce 374 millions de dollars, la grosse part du gâteau revient à l’immigration francophone. Le fédéral compte injecter 123,2 millions de dollars pour le recrutement, le soutien aux employeurs et une augmentation de l’aide fournie aux immigrants. L’arrivée de nouveaux arrivants francophones est la nouvelle priorité en francophonie pour les libéraux qui espèrent ainsi rétablir le poids démographique des francophones hors Québec. La cible de 4,4 % n’a été atteinte qu’une seule fois en 20 ans.

Organismes

Les organismes francophones demandaient 300 millions de dollars sur cinq ans pour une augmentation du financement de base de 56 millions par an. Ils obtiendront plutôt 23 millions par année pour 117 millions de dollars sur cinq ans. Les organismes visés seront ceux offrant des services dans la formation d’infirmières et de préposés bilingues de soins à la personne et à la promotion de la recherche en français.

Accès à la justice et petite enfance

Dans son Plan d’action, le fédéral prévoit dépenser 111,4 millions de dollars pour soutenir le bilinguisme dans le système de justice tout en appuyant la formation d’éducatrices et d’éducateurs de la petite enfance pour la francophonie hors Québec.

Préparer le projet de loi C-13

Le fédéral semble se préparer au projet de Loi C-13, qui vise à moderniser la Loi sur les langues officielles avec un nouvel investissement de 22,1 millions de dollars. Ottawa veut créer un centre d’expertise qui s’assurerait que les institutions fédérales respectent la Loi sur les langues officielles en plus de favoriser l’épanouissement des minorités linguistiques.

Une partie servira aussi au dénombrement des enfants éligibles à l’instruction en français hors du Québec. On sait que certains des amendements adoptés dans C-13 visent à renforcer le rôle du Conseil du Trésor afin qu’il veille à ce que les différentes entités fédérales respectent leurs obligations linguistiques. Idem pour l’épanouissement des minorités linguistiques : C-13 devrait notamment obliger Ottawa à en faire plus dans ce domaine.

Éducation et services en français : plus d’argent pour les provinces

Entre 2018 et 2023, Ottawa a envoyé 1,7 milliard de dollars pour les services d’enseignement pour les communautés linguistiques du pays. Pour les cinq prochaines années, les libéraux ajoutent 679 millions de dollars pour un total de 2,38 milliards. Cet argent servira pour l’accès à l’enseignement en français hors Québec, de la petite enfance au postsecondaire. Il est aussi question de services gouvernementaux bilingues dans cette injection de fonds. Près de 700 bureaux de services fédéraux bilingues seront ajoutés au cours des prochaines années : soit des nouveaux, soit des bureaux unilingues existants qui deviendront bilingues.

Le double pour le Programme de contestation judiciaire

Le Programme de contestation judiciaire verra son financement être doublé dès cette année, soit de 25 à 50 millions de dollars, indique dans son budget la ministre des Finances Chrystia Freeland. Géré par l’Université d’Ottawa, mais de manière indépendante, le Programme finance des causes touchant les minorités linguistiques ou les droits de la personne. Le fédéral était d’ailleurs en négociation avec les dirigeants du Programme pour une prolongation de deux ans étant donné que le contrat prenait fin à la fin du présent mois.

Reconduit ou pas?

Les mesures annoncées lors du précédent Plan d’action devraient être reconduites, mais de hauts fonctionnaires du ministère des Finances ont indiqué lors de l’embargo budgétaire qu’ils ne pouvaient confirmer à 100 %. Il reviendra aux départements des différents ministères de déterminer ceci. Par exemple, en 2018, la ministre des Langues officielles à l’époque Mélanie Joly avait réservé un gros morceau pour l’apprentissage de la langue seconde ainsi que les espaces communautaires et éducatifs, soit 450 millions. Une chose est sûre, les 2,7 milliards annoncés en 2018 seront bonifiés à 3,8 milliards.

Emplois francophones : plus d’argent pour les services d’aide à l’emploi

Pour contrer la pénurie de main-d’œuvre dans les secteurs francophones, Ottawa ajoute 208 millions de dollars sur cinq ans au budget d’Emploi et Développement social Canada. Les organismes d’aides à l’emploi en milieu minoritaire seront ainsi aidés par ce ministère. Cette mesure ne fait toutefois pas partie du Plan d’action sur les langues officielles.

Dette fédérale

Contrairement à la mise à jour économique de l’automne 2022, le fédéral ne prévoit plus un retour à l’équilibre budgétaire en 2028. Pour cette année, la dette se chiffre à 40,1 milliards de dollars, une baisse de 3 milliards comparativement à l’an dernier. La raison de cette différence est expliquée par des revenus budgétaires revus à la baisse en raison d’une augmentation moins grande que prévu des salaires, des impôts sur le revenu et le revenu d’entreprises. La dette fondera à 14 milliards de dollars en 2027-2028. Dans un scénario optimiste, elle serait à 7,8 milliards dans cinq ans et dans un pessimiste, elle serait à 21,4 milliards de dollars.