« Ce n’est sans doute pas terminé », prévient Madeleine Meilleur

L'ancienne ministre déléguée aux Affaires francophones de l'Ontario, Madeleine Meilleur. Archives #ONfr

OTTAWA – L’ancienne ministre libérale des Affaires francophones, Madeleine Meilleur, est sortie de sa retraite politique pour réagir à la disparition du Commissariat aux services en français et à l’abandon du projet de l’Université de l’Ontario français, annoncés jeudi par le gouvernement de Doug Ford.  

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

« Quand j’ai appris la nouvelle, je n’y croyais pas! », lance Madeleine Meilleur à #ONfr. « C’est une journée sombre, qui rouvre les plaies de Montfort. »

Manifestement ébranlée, l’ancienne politicienne reprend toutefois vite ses vieux réflexes partisans. « Tout est possible avec les conservateurs! Ils ont gonflé les déficits pour justifier leurs décisions. Et ce n’est sans doute pas terminé! Il y a une menace, et on risque de le voir dans le prochain budget. »

Ministre déléguée aux Affaires francophones, puis ministre aux Affaires francophones, entre 2003 et 2016, Mme Meilleur a vécu la création du Commissariat aux services en français, en 2007, sous le gouvernement de Dalton McGuinty.

« C’était une voix importante pour les francophones qui pouvaient exprimer leurs inquiétudes, formuler leurs plaintes et leurs souhaits. Comme gouvernement, on le voyait comme un allié, car comme ministre, je ne pouvais pas être au courant de tout. »

L’Ombudsman, ça ne marche pas

Auparavant*, les plaintes des francophones pour des problèmes de manquement à la Loi sur les services en français échouaient à l’Office des affaires francophones. Selon nos sources, on en comptait entre 25 et 40 par année seulement, qui étaient traitées au niveau des coordonnateurs des services en français des ministères, mais pas de façon systémique, ce qui fait qu’elles étaient rapidement oubliées.

À partir de mai prochain, c’est le bureau de l’Ombudsman de l’Ontario qui sera chargé de les traiter, tel qu’a annoncé, jeudi, le gouvernement progressiste-conservateur. Pour Mme Meilleur, une telle décision nuira aux Franco-Ontariens et les découragera de porter plainte, l’Ombudsman ayant beaucoup d’autres dossiers à régler.

En entrevue à Radio-Canada, la ministre déléguée aux Affaires francophones, Caroline Mulroney, a défendu cette décision, assurant que les droits linguistiques seront protégés malgré la disparition du Commissariat.

L’ancienne ministre déléguée aux Affaires francophones, Madeleine Meilleur avec le commissaire aux services en français, François Boileau, en 2017. Source : Twitter

Mais, rappelle Mme Meilleur, outre le traitement des plaintes, le rôle du Commissariat était aussi essentiel pour faire avancer des dossiers.

« La définition inclusive de la francophonie, les services à la petite enfance, l’accès à la justice, l’Université de l’Ontario français… je pourrais vous citer plein d’exemples », énumère-t-elle.

Défense des libéraux

Sur ce dernier dossier, abandonné dans l’énoncé économique par le gouvernement Ford, le politologue de l’Université McMaster, Peter Graefe, remarquait auprès d’#ONfr que les libéraux avaient leur part de responsabilité, ayant pris trop de temps.

« C’est sûr qu’on aurait pu faire plus vite, mais des dossiers comme ceux-ci prennent du temps. Et puis, ça n’aurait pas été une garantie. Regardez le poste de commissaire, il existait depuis 11 ans et  ça ne les a pas empêchés de le couper! »

L’ancienne ministre espère que Mme Mulroney rencontrera les organismes de la francophonie ontarienne et appelle la communauté à se mobiliser.

« Le gouvernement sous-estime l’impact de ces annonces. Comme sous Mike Harris [premier ministre progressiste-conservateur de 1995 à 2002], le gouvernement prend des décisions seulement pour la majorité. »

*ERRATUM : Contrairement à ce que nous avions écrit dans la précédente version de ce texte, comme nous l’avait indiqué Mme Meilleur, les plaintes en matière de services en français, avant la création du Commissariat aux services en français, n’étaient pas déposées au bureau de l’Ombudsman de l’Ontario. Nous adressons nos sincères excuses à nos lecteurs. 

Ce texte a été mis à jour samedi 17 novembre, à 13h32.


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