Ces rassemblements qui ont marqué l’histoire de l’Ontario français

Les manifestants à Ottawa, samedi 1er décembre. Crédit image: Sébastien Pierroz

Le 1er décembre 2018 restera peut-être une date à retenir dans l’histoire de l’Ontario français. Avec un chiffre provisoire de plus de 14 000 personnes, les manifestations contre Doug Ford ont battu un record de participation. Mais d’autres événements, parfois à saveur moins politique, sont aussi à marquer d’une pierre blanche dans l’histoire des Franco-Ontariens. Tour d’horizon.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

22 juin 1913. Manifestation contre le Règlement XVII

Plus de 7 000 personnes d’un peu partout au pays sont présentes à l’aréna d’Ottawa pour s’opposer au règlement XVII. Selon les sources historiques, les participants viennent de tout le Canada.

Le Règlement XVII, adopté l’année précédente par les conservateurs de James Whitney, avait interdit l’usage de la langue française après la deuxième année d’enseignement dans les écoles de l’Ontario.

L'image monte des manifestations contre le Règlement 17 à Ottawa.
Manifestation devant l’école Brébeuf à Ottawa, à l’époque du Règlement XVII. Gracieuseté : Encyclopédie du patrimoine culturel de l’Amérique française

« Le règlement 17, que le département d’Éducation de notre province veut nous imposer constitue l’attaque la plus directe, la plus violente, la plus perfide et la plus injuste de toutes celles que nous avons eues à vaincre », affirme le sénateur franco-ontarien Napoléon Antoine Belcourt, selon un article du Devoir le lendemain.

Bien qu’abrogé en 1927, le règlement a mené à l’époque et longtemps après à l’assimilation de nombreux jeunes de langue française.

24 juin 1978. 30 000 personnes pour la Saint-Jean-Baptiste

Il y eut un temps où la fête de la Saint-Jean-Baptiste en Ontario attirait des foules considérables. La parade de la Saint-Jean-Baptiste dans Prescott-Russell au cours des années 1970 fait figure d’événement culturel majeur dans l’Ontario français, le tout pour une journée. Le 24 juin 1978, ils sont même 30 000 pour l’occasion. Un record qui ne sera jamais égalé.

Un mini-événement contribue à ce chiffre exceptionnel de festivaliers pour cette édition 1978 : la présence du premier ministre canadien, Pierre Elliott Trudeau, qui veut rapprocher le Québec des Franco-Ontariens. Nous sommes alors à deux ans du premier référendum.

L’échec des accords du Lac Meech, puis de Charlottetown, et l’importance prise par la Fête du Canada, n’auront de cesse de placer la fête de la Saint-Jean-Baptiste dans l’ombre à partir des années 90.

22 mars 1997. L’inoubliable SOS Montfort

On a tant parlé et déjà tant écrit sur cette date. Ce jour-là, quelque 10 000 personnes se donnent rendez-vous au Centre municipal d’Ottawa. L’enjeu? Protester contre la recommandation de la Commission de restructuration des services de santé de l’Ontario qui mise tout bonnement sur une fermeture de l’Hôpital Montfort.

Le grand ralliement du 22 mars 1997. Gracieuseté : Hôpital Montfort.

Ce grand ralliement, événement mi-festif, mi-politique, est l’occasion pour les Franco-Ontariens de « reprendre leur place ». Sous l’impulsion de la figure de proue du mouvement, Gisèle Lalonde, puis de l’avocat, Ronald Caza, la mobilisation se met en place. Il faudra attendre 2001 pour que la Cour d’appel de l’Ontario confirme que l’hôpital jouit d’une protection constitutionnelle.

Quinze ans plus tard, en 2012, le 22 mars est proclamé Journée de la solidarité franco-ontarienne par le maire d’Ottawa, Jim Watson.

25 septembre 2007. 11 000 pour l’inauguration d’un monument

On oublierait presque qu’entre le grand rassemblement de Montfort et les manifestations de samedi, il y eut aussi… l’inauguration du cinquième monument de la francophonie à Ottawa, devant l’École élémentaire publique Charlotte-Lemieux, le 25 septembre 2017.

Au total, 11 000 personnes sont présentes ce jour-là. Des participants essentiellement issus des écoles primaires et secondaires. Au total, quelque 200 autobus convergent toute la journée vers l’école Charlotte-Lemieux.

Si l’événement n’a aucune connotation politique, hormis célébrer la fameuse fierté franco-ontarienne, on retrouve sans surprise les habituels Brian Saint-Pierre ou encore, le groupe Swing.

11 ans plus tard, le nombre de monuments de la francophonie a augmenté. L’Ontario en compte maintenant seize, depuis l’inauguration du dernier à Embrun il y a quelques semaines.

1er décembre 2018. Mobilisation en masse contre Doug Ford

À la différence de la crise de SOS Montfort, il n’aura fallu que deux semaines aux Franco-Ontariens pour s’organiser. L’instantanéité des médias sociaux et l’ampleur nationale de la crise linguistique y sont peut-être pour beaucoup.

Les manifestations organisées aux quatre coins de la province sont un succès. Avec plus de 14 000 participants, chiffre provisoire, l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) double ses attentes. D’autant que samedi soir, toutes les villes n’avaient pas été encore comptabilisées dans les calculs.

Reste à voir si cette mobilisation massive pourra faire reculer Doug Ford. Aux dernières nouvelles, le premier ministre n’a pas l’intention de faire marche arrière, ni sur l’indépendance du commissaire aux services en français, François Boileau, ni sur la création de l’Université de l’Ontario français.


POUR EN SAVOIR PLUS :

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