Wynne la partisane

La chef libérale Kathleen Wynne n'a pas livré la marchandise, selon Serge Miville. Archives #ONfr

[CHRONIQUE]
La première ministre de l’Ontario s’est de nouveau inscrite dans la campagne électorale fédérale en compagnie de son préféré dans la course, le libéral Justin Trudeau.

SERGE MIVILLE
Chroniqueur invité
@Miville

Cette fois-ci, toutefois, elle s’est attaquée contre le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD) Thomas Mulcair. Devant des journalistes et sur la plateforme Twitter, elle affirme que le parti de gauche ne peut se permettre ses promesses électorales et que les Canadiens seraient beaucoup mieux servis avec un gouvernement libéral à Ottawa.

Wynne s’est immergée dans la campagne il y a plusieurs semaines afin de dénoncer le régime Harper qui s’est acharné contre la dynastie libérale. De nombreux ministres, de Jim Flaherty à John Baird, chacun des anciens du régime Harris des années 1990, n’ont pas cessé de lancer des boulets contre l’ancien premier ministre McGuinty et Mme Wynne.

En critiquant M. Harper, Mme Wynne défend sa province. Mais si la première ministre est justifiée de se défendre contre les conservateurs, sa récente tirade contre M. Mulcair n’est rien de mieux qu’une attaque partisane qui mine la crédibilité de la première ministre ontarienne. En effet, M. Mulcair n’a jamais critiqué le régime libéral de l’Ontario.

Il est clair que M. Trudeau est le candidat chéri de Mme Wynne durant cette campagne électorale, mais il est rare, pour ne pas dire inédit dans l’histoire récente, qu’un premier ministre ontarien fasse activement campagne pour un candidat.

Les critiques contre M. Harper sont de bonne guerre, car le gouvernement fédéral refuse de collaborer avec la province sur ses propres champs de compétence. La crédibilité et les motifs de Mme Wynne sont toutefois remis en question lorsqu’elle s’attaque contre le leader dans les récents sondages, Thomas Mulcair, avec qui, pourtant, elle semble avoir plusieurs atomes crochus.

Mme Wynne aime se présenter comme une libérale progressiste avec un programme de justice sociale, ce qui cadre pourtant bien dans la plateforme néo-démocrate. Cette sortie s’explique en deux temps.

D’une part, il est important de comprendre à quel point l’Ontario est une clef dans cette élection. Avec 15 nouveaux députés qui siégeront à la Chambre des communes dont la majorité se situe dans la grande région métropolitaine de Toronto-, l’Ontario envoie un tiers des députés d’Ottawa, d’où l’importance pour la province dans la campagne des trois principaux partis. Mme Wynne cherche sans doute à tirer son épingle du jeu lors de cette élection on ne peut plus critique.

D’autre part, il est impossible de cacher le fait que le gouvernement Wynne est dans la soupe chaude. Récemment, des groupes de premières nations ont vertement critiqué le gouvernement libéral concernant le processus de vente d’Hydro One en raison des nombreux accords conclus entre les groupes autochtones et la société d’État. De plus, la rentrée scolaire peut être perturbée par de nombreux conflits de travail avec la province. La campagne fédérale est une excellente occasion de s’acheter du temps afin que puisse passer la tempête.

Enfin, il est possible que M. Trudeau demande un peu de retenue de son homologue provincial par peur que sa sortie lui apporte des ennuis en Ontario, où il est troisième dans les sondages. Les libéraux doivent mettre les bouchées doubles pour regagner la confiance des Canadiens perdue au profit des conservateurs et des libéraux lors du dernier scrutin.

 

Serge Miville est candidat au doctorat en histoire à l’Université York.

Note : Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que leurs auteur(e)s et ne sauraient refléter la position de #ONfr et du Groupe Média TFO.