Climat : le plan Murray attendu

Glen Murray, désormais l'ex-ministre de l’Environnement et de l’Action en matière de changement climatique de l'Ontario. Archives #ONfr

TORONTO – Le ministre de l’Environnement et de l’Action en matière de changement climatique, Glen Murray, refuse de montrer tout de suite son jeu malgré les fuites et les rumeurs qui se multiplient au sujet de son plan d’action pour réduire l’empreinte environnementale de l’Ontario au cours des cinq prochaines années.

FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault

Queen’s Park pourrait dépenser jusqu’à 7 milliards $ sur quatre ans pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES) et éliminer graduellement d’ici 2050 le gaz naturel comme source d’énergie pour le chauffage, selon ce que rapporte le Globe & Mail, citant un document ministériel dont le quotidien anglophone aurait obtenu copie.

« Notre plan d’action sera dévoilé au cours des prochaines semaines. Lorsque le plan sera dévoilé, nous aurons amplement le temps d’en parler », a botté en touche M. Murray à sa sortie de la période de questions à l’Assemblée législative, lundi 16 mai. « Mais non, nous n’allons pas bannir l’utilisation du gaz naturel », a-t-il nié simplement.

Dans leur plus récent budget, les libéraux de Kathleen Wynne se sont d’ailleurs engagés dans un programme de rénovations domiciliaires de 100 millions $ pour améliorer, entre autres, l’efficacité énergétique des fournaises et des chauffe-eau au gaz naturel.

Le ministre de Toronto dit que les grandes industries ont participé à l’élaboration de son plan d’action contre le changement climatique – « une des mesures législatives les plus complexes » dans l’histoire de la province, selon lui.

« Pour demeurer compétitifs dans une économie qui est appelée à connaître de grands changements, nous devons appuyer nos industries et nous devons investir massivement dans nos industries », a signalé M. Murray à la presse parlementaire, affirmant du même souffle que le gouvernement va aider aussi les contribuables « à faire la transition vers des technologies sobres en carbone ».

S’il dit avoir écouté les grandes industries, Glen Murray ne serait toutefois pas tout à fait sur la même longueur d’ondes que ses collègues Bob Chiarelli, à l’Énergie, et Brad Duguid, au Développement économique, dont les ministères seront directement touchés par son plan d’action et qu’il aurait peu consultés ou dont il aurait ignoré les conseils, selon le Globe & Mail.

Le ministre de l’Environnement et de l’Action en matière de changement climatique aurait aussi irrité quelques-uns de ses collègues lorsqu’il a reproché à l’industrie automobile de ne pas en faire assez pour limiter les émissions de GES lors d’un discours devant l’Economic Club du Canada, le mois dernier.

Le plan Murray qui est attendu en juin pourrait paver la route à des incitatifs de 285 millions $ pour doper les ventes de véhicules électriques, qui représentent environ 0,6% des ventes de véhicules neufs à l’heure actuelle, à 12% des ventes d’ici 2025.

Marché du carbone

Le gouvernement libéral à Queen’s Park prévoit financer en grande partie sa lutte au changement climatique à partir des revenus d’un programme de plafonnement et d’échange du carbone avec le Québec et la Californie, auquel il doit adhérer l’an prochain.

Or, ni le Québec, ni la Californie ne prévoient bannir dans un avenir prévisible l’utilisation du gaz naturel comme combustible à chauffage.

« Le gaz naturel est utilisé pour chauffer 76% des édifices dans la province et son élimination pourrait nous coûter 42000 emplois. Je ne comprends pas d’où vient cette idée », s’est insurgé le progressiste-conservateur John Yakabuski, le 16 mai. « Où allons-nous trouver les mégawatts nécessaires pour nous chauffer, alors que nous entamons deux décennies de travaux de remise à neuf de nos centrales nucléaires? Ce n’est même pas plausible. »

L’élu de la région de Renfrew croit que les libéraux retardent délibérément le dépôt de leur plan d’action pour éviter d’avoir à en débattre avec l’opposition d’ici la fin de la session parlementaire, début juin.

« C’est inquiétant de voir les libéraux élaborer leur plan derrière des portes closes », a dénoncé la chef néo-démocrate Andrea Horwath. « Nous sommes inquiets pour les emplois dans les industries plus polluantes et pour la capacité des gens ordinaires à défrayer les coûts des changements qui seront proposés. Mais tant que nous n’avons pas le plan d’action sous les yeux, c’est difficile de savoir si les libéraux font bien leur travail. »

Le gouvernement Wynne s’est engagé à réduire d’ici 2050 les émissions polluantes de l’Ontario à 80% de ce qu’elles étaient en 1990.