COVID-19 : l’Ontario arrive à un tournant

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[ANALYSE]

Le virus circule toujours, et depuis quelques semaines, les cas ne baissent pas. Ce constat amer s’impose, même si aujourd’hui, en Ontario et au Canada, le coronavirus tue moins que lors du « printemps meurtrier ». À voir maintenant si la province la plus peuplée du pays pourra échapper à la fameuse « seconde vague » tant redoutée.

En Ontario, on est très loin du pic de 640 nouveaux cas quotidiens enregistré la journée du 24 avril. Mieux encore, il faut remonter au 21 juillet pour voir la barre des 200 nouveaux cas dépassée. Ce vendredi, Santé publique Ontario a d’ailleurs confirmé le nombre de 148 personnes infectées. Un chiffre sensiblement dans la moyenne des jours précédents.

À défaut d’être brillants, les résultats semblent à priori encourageants, d’autant que les bureaux de santé publique ontariens ont multiplié les tests au cours des derniers mois. La courbe épidémique n’a pas grimpé, prouvant au passage l’inexactitude de la martingale du président américain Donald Trump justifiant dans son pays la hausse des cas par l’augmentation drastique des tests.

Comparaison n’est bien sûr pas raison, mais l’Ontario s’en tire aussi mieux que le Québec. L’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) vient de confirmer que la transmission de la COVID-19 repart à la hausse dans la Belle province.

Un double écueil en perspective

Reste que crier victoire serait insensé. Comme toutes les autres provinces, l’Ontario fait face en ce début septembre à un double écueil : d’une part, la rentrée scolaire, mais aussi le retour des travailleurs dans les entreprises.

Si l’épidémie semble maîtrisée dans les foyers de soins de longue durée, que les mesures de distanciation sociale imposées et la généralisation du port du masque limitent la propagation, les foyers de contamination sont aujourd’hui ces lieux inhérents à la vie éducative et l’activité économique.

Bien sûr, les élèves et les travailleurs de moins de 50 ans ont très peu de chances de mourir du coronavirus. Mais leur capacité de le transmettre aux populations plus vulnérables est bien réelle. Dans ces conditions, le bon déroulement de la rentrée scolaire en Ontario, débutée jeudi dans la région d’Ottawa, sera crucial pour éviter les effets d’une « seconde vague ».

Les récentes prises de bec entre le gouvernement Ford et les syndicats enseignants sur les mesures de précaution sanitaires témoignent de l’extrême sensibilité de l’enjeu.

L’équipe conservatrice qui a imposé le port du masque dès la 4e année (le masque est obligatoire à partir de la 5e année au Québec) reproche aux syndicats de chercher le conflit. Doug Ford n’a de cesse de délégitimiser leurs arguments au profit de l’expertise des scientifiques.

Pendant ce temps, les syndicats dénoncent la faiblesse des mesures de distanciation sociale dans les classes, les possibles problèmes de ventilation, sans oublier l’argent insuffisant pour financer les nouvelles normes sanitaires.

Peu de chance d’une « deuxième vague » meurtrière mais…

Soyons réalistes. Il y a peu de chances que l’Ontario, et plus largement le Canada, subissent une « deuxième vague » meurtrière. En dehors de Toronto, et Montréal, la faible densité démographique du pays fait figure de rempart contre une possible propagation du virus. Une différence notable avec l’Europe ou certaines régions des États-Unis.

En revanche, cet atout ne doit pas diminuer la proactivité des gouvernements et la collaboration des citoyens pour vaincre ensemble la COVID-19. L’inverse aurait des conséquences catastrophiques.

Cette analyse est aussi publiée dans le quotidien Le Droit du 5 septembre.