Des députés recommandent plus de pouvoir au fédéral en éducation

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OTTAWA – Afin de pallier les manques de services à la petite enfance, des députés du comité permanent des langues officielles veulent serrer la vis aux provinces et territoires pour s’assurer que l’argent versé par le fédéral permette aux communautés francophones de recevoir des services de qualité égale à ceux de la majorité.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Manque de places, de nouvelles garderies, faiblesse des espaces existants, lacune dans l’offre de services spécialisés en français pour les enfants ou de formation pour les éducateurs… La visite des membres du comité permanent des langues officielles dans l’Ouest canadien, en février dernier, leur fait dresser un constat sans appel sur les manquements en matière de petite enfance en français à l’extérieur du Québec.

Dans un rapport publié le mardi 8 mai, intitulé Grandir en français dans l’Ouest canadien : critique des programmes d’appui fédéraux pour l’éducation à la petite enfance, ils dressent six recommandations pour répondre à ces besoins et assurer le continuum en éducation.

« On s’est concentré sur l’Ouest, mais c’est très similaire à travers le Canada. Les défis sont les mêmes », précise le député libéral acadien de la Nouvelle-Écosse, Darrell Samson.

L’objectif : s’assurer que les fonds transférés par le gouvernement aux provinces et territoires pour les aider à offrir une éducation dans la langue officielle minoritaire soient adéquatement utilisés, notamment pour la petite enfance.

 

Meilleure reddition de compte

Les élus plaident notamment pour que le gouvernement fédéral précise mieux à quoi doivent servir ces sommes.

Récemment, la Commission scolaire de langue française (CSLF) de l’Île-du-Prince-Édouard a menacé de traîner son gouvernement devant les tribunaux après s’être aperçue que la province utilisait les fonds du fédéral pour payer des salaires d’enseignants.

Les députés préconisent aussi une meilleure consultation des communautés, des mesures de rendement et des clauses pour connaître la part exacte des investissements des provinces et territoires qui revient aux communautés francophones.

« Nous appuyons ces recommandations qui s’inscrivent dans ce que nous demandons depuis plusieurs années en termes de reddition de compte, de consultations et de meilleure définition du concept de coûts supplémentaires. Reste à savoir comment ce concept sera défini », commente le directeur général de la Fédération nationale des conseils scolaires francophones (FNCSF), Roger Paul.

 

Guerre avec les provinces?

Afin de renforcer le pouvoir du gouvernement fédéral, les élus militent également pour que la Loi sur les langues officielles soit modifiée pour consacrer et encadrer un rôle accru pour le gouvernement fédéral dans le domaine de l’éducation dans la langue de la minorité, notamment au stade de la petite enfance.

Les membres du comité permanent des langues officielles. De gauche à droite, René Arseneault, Denis Paradis, Darrell Samson, Linda Lapointe et Alupa Clarke. Crédit image : Benjamin Vachet

S’attaquer à cette compétence provinciale pourrait susciter quelques heurts que le député Samson minimise.

« Je pense que nous avons une responsabilité comme gouvernement fédéral à partir du moment où on transfère de l’argent vers les provinces. »

Le président du comité, le député libéral, Denis Paradis, souligne l’intention du groupe d’élus de rencontrer les provinces et territoires pour une discussion sur le sujet.

« Je pense qu’on travaille tous dans le même sens, mais il faut peut-être accélérer le dialogue quelquefois. Vous savez, en politique, il faut répéter! »

Soulignant les investissements directs en petite enfance dans les communautés, promis dans le Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023, la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, assure qu’elle tiendra compte des recommandations des communautés dans les négociations avec les provinces.

« Nous avons déjà dit qu’on allait prendre sur nous les recommandations des conseils scolaires et que nous allons les présenter dans le cadre de nos négociations avec toutes les provinces. »

 

Le NPD demande un service universel

Le rapport du comité vient s’ajouter à celui du commissaire aux langues officielles d’octobre 2016 qui pointait déjà du doigt le problème. À l’époque, Graham Fraser insistait sur le fait que le développement de la petite enfance dans les communautés francophones devait être une priorité du gouvernement fédéral.

Dans un rapport complémentaire, le porte-parole néo-démocrate aux langues officielles, François Choquette, propose d’aller plus loin.

« Il faut appliquer les recommandations du commissaire aux langues officielles, mais ça nous prendrait aussi un système universel de garde, abordable, qui prendrait en compte les communautés de langue officielle en situation minoritaire. C’est la seule option pour contrer l’assimilation. »

 

 


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