Des services juridiques gratuits en français menacés

Andrée-Anne Martel, directrice générale de l’Association des juristes d’expression française de l’Ontario (AJEFO). Archives

OTTAWA – Le Centre d’information juridique d’Ottawa ne sait pas de quoi son avenir sera fait. Malgré des résultats encourageants, il pourrait mettre la clé sous la porte, fin mars, faute de financement. Plusieurs initiatives similaires menées à travers le pays sont dans la même situation.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

« Je ne peux pas m’imaginer où iraient les gens si on devait fermer nos portes », s’inquiète Andrée-Anne Martel directrice générale de l’Association des juristes d’expression française de l’Ontario (AJEFO).

Depuis son ouverture en janvier 2015, le Centre d’information juridique d’Ottawa propose, par téléphone ou en personne, une rencontre gratuite de 30 minutes avec un avocat afin d’obtenir des conseils juridiques.

En trois ans, le Centre a reçu plus de 5 400 personnes à la recherche d’information dans les deux langues officielles. Une demande qui a augmenté de façon constante et qui concerne 30 % de francophones. Aujourd’hui, le Centre fonctionne à pleine capacité plusieurs fois par semaine, assure l’AJEFO, qui pilote le projet pilote en Ontario.

La majorité des demandes portent sur le droit de la famille, dans des cas de divorce ou pour des questions de pensions alimentaires, par exemple.

« On privilégie les rencontres en personne, car c’est plus simple dans des situations de détresse », glisse Mme Martel. « Mais comme 30 % de nos utilisateurs viennent de l’extérieur de la région d’Ottawa, il y a aussi le numéro téléphone gratuit. Le nombre de rencontres n’est pas limité. L’idée, c’est d’outiller les justiciables en leur expliquant leurs options et en les dirigeant vers les ressources appropriées de la région et de la province. »

L’AJEFO a longtemps caressé le rêve d’ouvrir un bureau satellite à Sudbury. Toutefois, malgré l’étude de faisabilité réalisée en 2016, le projet ne s’est pas concrétisé.

Fin des services le 31 mars?

À l’occasion du troisième anniversaire du Centre d’information juridique d’Ottawa, l’AJEFO s’inquiète.

« Des initiatives comme celles-ci sont essentielles pour la communauté, car elles répondent aux besoins de personnes vulnérables. Depuis la création du Centre, les statistiques ont dépassé nos espérances. Mais le financement s’arrête fin mars et nous n’avons aucune indication. Ce qui est certain, c’est que nous ne pourrons pas continuer au-delà du 31 mars sans le financement fédéral. »

Le Centre d’information juridique d’Ottawa a reçu une somme de 1 575 000 $ pour une période de quatre ans du Fonds d’appui à l’accès à la justice dans les deux langues officielles. La province de l’Ontario lui verse quant à elle 30 000 $ par année afin de financer la ligne téléphonique gratuite.

Dans l’attente du renouvellement du plan d’action pour les langues officielles, l’avenir du projet à Ottawa s’inscrit en pointillé.

La situation est la même en Saskatchewan, en Nouvelle-Écosse et en Alberta où des centres similaires ont été créés, a notamment confirmé à #ONfr la directrice générale de l’Association des juristes d’expression française de l’Alberta (AJEFA), Denise Lavallée.

Plus de fonds demandés

Ces centres d’information juridique ont été mis en place à la suite de plusieurs rapports portant sur l’accès à la justice pour les Canadiens.

« Nous avons des retours très positifs des gens qui viennent nous voir et qui nous disent qu’ils n’auraient pas su où aller sans ça », explique Mme Martel. « Nous aimerions que ce service devienne permanent, car il a prouvé son utilité. C’est le premier du genre en Ontario et le seul et unique endroit où des services d’information juridique sont offerts dans tous les domaines du droit et sans critères d’admissibilité. »

La directrice générale de l’AJEFO souhaiterait également que plus de fonds y soient consacrés afin d’ouvrir le bureau satellite de Sudbury et d’embaucher un deuxième avocat à temps plein.

Contacté par #ONfr, le ministère fédéral de la Justice, principal bailleur de fonds du projet, explique être en période de renouvellement du Fonds d’appui à l’accès à la justice dans les deux langues officielles pour un nouveau cycle de financement de cinq ans, soit d’avril 2018 à mars 2023.

« Les organisations admissibles seront invitées à soumettre pour considération des demandes de financement pour le prochain cycle de financement. Les demandes soumises pourront inclure des projets pluriannuels ayant une date de fin maximale au 31 mars 2023. Les décisions de financement liées aux demandes reçues seront faites sur une base régulière, commençant au printemps 2018 », indique Simon Rivet, porte-parole du ministère, dans un échange de courriels avec #ONfr.


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