Directeurs d’éducation sans expérience en enseignement : « Le gouvernement Ford prend des décisions sans consultation »

Rémi Sabourin, président de l'AEFO. Crédit image: Étienne Fortin-Gauthier

[ENTREVUE EXPRESS]

QUI :

Rémi Sabourin est le président de l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO).

LE CONTEXTE :

Le gouvernement progressiste-conservateur de Doug Ford a déposé, mercredi, un projet de loi omnibus, Loi de 2020 visant à favoriser la reprise économique face à la COVID-19, dans lequel se trouvent plusieurs mesures pour relancer l’économie ontarienne durement éprouvée par la COVID-19.

L’ENJEU :

Dans son projet de loi, le gouvernement a également mis en place plusieurs mesures dont la suppression de l’exigence voulant que « les directeurs de l’éducation soient des agents de supervision qui ont acquis les qualités requises pour ce poste en tant qu’enseignants ».

« Que pensez-vous de la volonté du gouvernement de supprimer l’obligation pour les directeurs de l’éducation des conseils scolaires d’avoir une expérience en éducation?

C’est une décision préoccupante, car encore une fois le gouvernement la prend sans aucune consultation. On sait que ce genre de choses se fait déjà en santé, mais une abolition aussi arbitraire, sans en parler avec le système, ce n’est jamais une bonne idée. On commence à avoir l’habitude avec ce gouvernement. Il y a un pattern. Il prend des décisions en disant que c’est bon pour le système, mais il ne parle même pas avec les acteurs de ce système. Pendant l’année scolaire, il les annonçait le vendredi après-midi, là on dirait que le gouvernement profite de l’été pour les passer, ce qui donne l’impression qu’il a quelque chose à cacher…

Qu’est-ce qui vous dérange dans cette modification?

C’est le fait qu’on ne sait rien, qu’on n’ait pas été consulté! C’est difficile d’être enthousiaste dans ces conditions! On ne sait pas d’où vient la décision et quel sera le processus pour recruter ces directions de l’éducation, puisque rien n’est indiqué dans le projet de loi. Ça laisse la porte ouverte à des nominations arbitraires ou politiques, comme on l’a vu à l’Office de la qualité et de la responsabilité en éducation, où un ancien candidat progressiste-conservateur [Cameron Montgomery] a été choisi à la présidence du conseil d’administration.

Une telle mesure ne pourrait-elle pas permettre de recruter plus facilement des directions d’éducation quand on sait qu’il y a une pénurie dans le milieu?

Si c’est la raison, c’est une mauvaise décision, car nous avons beaucoup de gens qui développent leur leadership dans le système au fur et à mesure de leur carrière et qui peuvent ensuite être de bons candidats à ces postes.

Mais est-ce si important qu’un directeur de l’éducation ait de l’expérience en éducation pour faire son travail?

Dans mon rôle de président de l’AEFO, autant qu’au cours de mon expérience en éducation, je peux vous garantir qu’un directeur de l’éducation est impliqué en pédagogie. C’est donc préférable qu’il connaisse le système. Ça permet d’avoir des discussions franches, des débats plus constructifs… Les décisions que prend un directeur de l’éducation ont une incidence incroyable sur le système. Il imprime une vision. Peut-être qu’il y a de bons côtés à cette décision, mais pour le savoir, il aurait fallu qu’on nous en parle! »