École virtuelle : « Le gouvernement a attendu que les choses s’aggravent » – Anne Vinet-Roy

Anne Vinet-Roy, présidente de l'AEFO. Gracieuseté

[ENTREVUE EXPRESS]

QUI :

Présidente de l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO), Anne Vinet-Roy défend les intérêts du personnel scolaire de langue française.

LE CONTEXTE :

Des milliers d’élèves reprennent le chemin de l’école, ce mercredi, mais en mode virtuel. Les classes en présentiel resteront fermées pendant au moins deux semaines.

L’ENJEU :

Avec ce changement de cap, le gouvernement espère contrer la propagation du variant Omicron et atténuer la surcharge hospitalière qu’il fait peser sur l’Ontario.

« Aurait-on pu éviter ce retour à l’école en mode virtuel?

Absolument et c’est exaspérant de voir à quel point le gouvernement a attendu que les choses s’aggravent avant de prendre une décision. On savait déjà avant Noël que le variant Omicron faisait courir de grands risques. Une partie des élèves et du personnel a dû s’isoler pendant le congé des fêtes à cause des éclosions. C’est frustrant.

La décision est intervenue il y a deux jours. Les enseignants ont-ils pu se préparer de façon optimale dans ce court laps de temps? Quelles vont être les conséquences sur les élèves?

Il va y avoir un apprentissage de qualité car nos membres vont se dévouer à la tâche, mais on doit leur accorder du temps pour s’ajuster car on leur a d’abord annoncé un retour en présentiel, puis on est revenu sur cette décision pour annoncer le contraire. On espère que les conseils scolaires vont être flexibles comme ils l’ont été par le passé.

Élèves et parents doivent-ils s’attendre à un enseignement à distance similaire ou amélioré, par rapport aux précédentes expériences virtuelles?

On l’a déjà fait avant, donc ce sera différent dans le sens où on peut s’attendre à ce que les écoles réutilisent les stratégies qui ont bien fonctionné et délaissent celles qui n’ont pas porté leurs fruits. Il n’en demeure pas moins que l’apprentissage à distance ne sera jamais la situation optimale. On a vu les conséquences sur la santé mentale des enfants et sur les choix pédagogiques du personnel. Ils vont faire du mieux qu’ils peuvent avec ce qu’ils ont, en privilégiant la qualité sur la quantité.

Craignez-vous que l’école à la maison dure au-delà du 17 janvier, l’horizon fixé par le gouvernement?

Ça pourrait. On espère que non, car notre objectif est d’être capable de retourner le plus rapidement possible en classe. C’est le mieux pour tout le monde à condition que cela se fasse en toute sécurité. On a besoin des masques N95 et de régler la question de la ventilation. On sait qu’on n’aura pas de réduction de taille de classe, mais il faut des conditions de sécurité minimales.

Le masque N95 a été rendu obligatoire dans certains pays, notamment dans les transports en commun ou certains commerces. Faut-il le rendre obligatoire dans les écoles ontariennes, lors du futur retour en classe?

Dans le discours du ministère de l’Éducation, c’est quelque chose d’optionnel mais ça devrait être obligatoire. On sait que le virus se répand par les gouttelettes respiratoires et les aérosols et que le masque N95 est plus efficace que les autres. Ça fait des mois que les experts le disent. Il faut donc investir dans de meilleurs équipements pour assurer la santé et la sécurité de toute la communauté scolaire.

Pour améliorer la ventilation, le gouvernement n’a-t-il pas fait sa part en investissant, cette semaine, dans 3 000 unités de filtrage supplémentaires?

Le fait que le gouvernement revienne à la charge avec ça nous dit que ça n’a pas été fait complètement par le passé. Améliorer la ventilation, le gouvernement en parle depuis janvier 2021, au moment où on avait rouvert les écoles de façon progressive! Tout ça aurait dû donc être réglé depuis longtemps, d’autant que le gouvernement a surtout investi l’argent du fédéral.

Les tests rapides sont-ils suffisamment et efficacement déployés dans les écoles, selon vous?

Les élèves en ont reçu avant de partir en congé mais on les a refusés au personnel scolaire sous prétexte de disponibilité. Ça devait servir à assurer un retour en sécurité. C’est un outil important pour savoir qui peut revenir à l’école et qui doit s’isoler. Si on les offre aux élèves, le personnel devrait aussi y avoir accès.

L’intention du gouvernement de ne plus déclarer les éclosions en milieu scolaire vous inquiète-t-elle?

Le gouvernement n’est pas revenu sur cette décision qui reste en suspend avec l’école virtuelle. Enlever les mécanismes et chiffres de dépistage et de déclaration des éclosions serait dommageable. C’est ridicule car comment savoir si l’école est sécuritaire si on ne sait pas qui est malade et qui est en santé? On ne peut pas juste se fier à l’absentéisme.

Quelle est la position de l’AEFO sur la troisième dose chez les élèves et les enseignants?

On est toujours d’avis que la vaccination devrait être obligatoire pour les travailleurs de l’éducation et, si ça l’est pour eux, ça devrait l’être aussi pour les élèves, afin que tout le monde contribue à la sécurité de la communauté dans son ensemble. »