Est ontarien : un sommet pour promouvoir une réglementation bilingue

Le pont du Long-Sault avec, en arrière-plan, la Ville d'Hawkesbury dans l'Est ontarien.

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HAWKESBURY – L’Association canadienne-française de l’Ontario (ACFO) de Prescott-Russell souhaite donner une nouvelle impulsion pour l’adoption du bilinguisme dans les huit municipalités de son territoire, a appris #ONfr.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @SebPierroz

L’organisme porte-parole des 65% de francophones de la région entend organiser un grand sommet à l’automne pour dynamiser l’application de l’affichage bilingue dans toutes les municipalités de la région de Prescott et Russell, dans l’Est ontarien.

« Nous aimerions tenir une grande consultation publique pour avoir le pouls des résidents sur le sujet », explique à #ONfr Tina Desabrais, la présidente de l’ACFO de Prescott-Russell. « Nous sommes actuellement à la recherche de subventions qui nous permettraient de réaliser ce projet et d’obtenir un document précis. »

Un sommet qui pourrait, outre les résidents, réunir le commissaire aux services en français de l’Ontario, François Boileau, ou encore les universitaires Linda Cardinal et Martin Normand.

Les recommandations émises seraient dans un second temps déposées directement sur la table du Comtés unis de Prescott et Russell (CUPR), le gouvernement régional de huit municipalités de l’Est ontarien.

Quatre d’entre elles possèdent actuellement une réglementation sur l’affichage bilingue. Clarence-Rockland avait ouvert le bal en 2005, suivie dans la foulée par les municipalités de La Nation, Casselman et Russell, celle-là au prix d’un long combat judiciaire. Un cas dès lors unique en Ontario puisqu’aucune autre municipalité de la province ne possède un règlement sur l’affichage de la sorte.

Les quatre autres municipalités des CUPR, à savoir les cantons d’Alfred-et-Plantagenet, Champlain et Hawkesbury-Est ainsi que la Ville de Hawkesbury, n’ont toujours pas de règlement sur l’affichage bilingue en dépit de leurs populations francophones parfois supérieures à 80%. Elles se cantonnent à des politiques internes.

« Nous avons commencé des discussions avec les différents maires, mais ce n’est pas encore gagné », souligne Mme Desabrais.

« Je ne suis pas pour ou contre l’idée, mais tout simplement pour le statu quo », résume la mairesse de Hawkesbury, Jeanne Charlebois, en entrevue pour #ONfr. « Nous avons déjà des services bilingues qui fonctionnent dans notre municipalité, et beaucoup de documents traduits dans les deux langues. »

 

Réglementation bilingue

Toujours est-il que le projet ne vise pas seulement l’affichage bilingue. D’autres innovations plus larges comme une traduction plus efficace sur les sites internet, « un service en français renforcé » et des procès-verbaux traduits dans les deux langues, sont également à l’étude.

« Avec l’accord de la population, notre projet ne s’arrêterait effectivement pas seulement à l’affichage bilingue. Nous aimerions élargir la réglementation bilingue, éventuellement par des amendements, pour les quatre municipalités où l’affichage bilingue est déjà en place », précise Mme Desabrais.

Critiquée par certains, l’initiative est en tout cas louable pour l’universitaire Gilles Levasseur, lui-même rédacteur en partie de ces règlements dans l’Est ontarien : « Il faut un règlement formel, et non pas une politique dans l’intention. Lorsque les grandes entreprises comme Walmart ou Canadian Tire s’installeront aux alentours de Hawkesbury, il sera peut-être déjà trop tard. Il faut protéger dès maintenant. »

Point névralgique de l’Est ontarien, la Ville de Hawkesbury voit sa population globale diminuer au fil des ans, absorbée par l’attrait d’Ottawa ou de Montréal : « Le conseil municipal est actuellement francophone dans cette municipalité, mais qu’adviendra-t-il le jour où les documents ne seront pas disponibles en français? », prévient la présidente de l’ACFO.

 

Le commissaire satisfait

Du côté du commissariat aux services en français, Me Boileau avoue son « enthousiasme » pour le projet. « C’est quelque chose (les réglementations bilingues) qu’il faut faire maintenant. On ne sait pas ce que seront les démographies des différentes municipalités dans le futur. »

Le commissaire cite d’ailleurs, en exemple, les villes du nord de l’Ontario à l’instar de Kapuskasing et Timmins qui ont adopté un règlement sur les services en français. « Même au niveau de l’affichage bilingue, le modèle unique de l’Est ontarien peut-être selon moi exportable à d’autres municipalités. »

Dans son rapport dévoilé en 2013, Me Boileau avait appelé une première fois la trentaine de villes membres de l’Association française des municipalités de l’Ontario (AFMO) à se doter d’un règlement ou d’un arrêté municipal « officialisant l’emploi du français dans l’exécution de leurs programmes et services ».