Et après nos 400 ans?

Que restera-t-il des célébrations du 400e anniversaire de présence française en Ontario? Archives, #ONfr

[CHRONIQUE]

Les célébrations du 400e anniversaire de la présence française en Ontario ont pris fin le 10 juin dernier après plus d’une année d’événements. À Penetanguishene, les dignitaires saluent une dernière fois la figure de Champlain, sans doute l’un des principaux pionniers de la présence française dans les « vrais » Pays d’en haut avec le controversé Étienne Brûlé.

SERGE MIVILLE
Chroniqueur invité
@Miville

Après tant de célébrations, le temps est maintenant à la réflexion. Que voulons-nous, réellement, pour l’Ontario français? Existera-t-il une francophonie ontarienne dans 400 ans? Quelle voie devrions-nous suivre pour nous maintenir dans le temps?

Soulignons au moins que les 400 ans de la présence française en Ontario nous ont permis de renouer avec de nombreux symboles forts importants pour donner un sens à l’expérience franco-ontarienne.

En réinvestissant Champlain, l’Ontario français a renoué avec un univers symbolique partagé avec le Québec. À cette époque où le Parti québécois cherche péniblement à se renouveler, et dont certains membres flirtent même avec l’idée d’un renouvellement avec le Canada, il faut profiter de ce rapprochement pour tisser des liens.

Ces célébrations ont aussi été hôte d’une année extrêmement mouvementée du côté politique. Avec le débat actuel sur le postsecondaire franco-ontarien qui s’éternise et les excuses pour le Règlement XVII, les Franco-Ontariens ont peut-être réussi à se doter d’un capital symbolique. Ils ont été présents sur le radar et ont obtenu la sympathie de nombreux médias anglophones. Il est rare d’obtenir cet appui, et il faut le cultiver.

Le défi de la visibilité

Car l’un des grands défis pour l’Ontario français est sa visibilité dans sa propre province et au Canada. Il doit toujours se distinguer et se justifier.

Souvent on oublie pourquoi le français a une place particulière dans la province. Souvent, les gens ne comprennent pas pourquoi une province anglophone donne tant à ses citoyens francophones.

Ce n’est pas simplement en raison du bilinguisme du pays. Cela s’inscrit dans une histoire longue de 400 ans et du fait que le leadership franco-ontarien estime toujours être une minorité pas comme les autres. Au même chef que les peuples autochtones et les Canadiens de langue anglaise, les Canadiens-Français ont façonné le pays et légué une histoire, une culture, une langue et des institutions au pays. Si la mémoire est une faculté qui oublie, les 400 ans de la présence française ont réussi dans leur devoir du souvenir.

Les problèmes persistent, toutefois. Plusieurs francophones ont une insécurité débilitante avec leur langue maternelle, le français n’est pas toujours utilisé à la maison et l’économie fait fuir les jeunes dans les villes francophones. Les défis restent donc de taille.

Il est impossible de prédire l’avenir, surtout qu’un historien est un mauvais futurologue. Mais si l’Ontario français continue dans la voie qu’elle a tracée durant ces célébrations, on peut oser espérer un avenir meilleur.

Serge Miville est docteur en histoire et chargé de cours en histoire à l’Université Laurentienne.

Note : Les opinions exprimées dans cette chronique n’engagent que son auteur et ne sauraient refléter la position de #ONfr et du Groupe Média TFO.