Francophonie : pas de statut de plein droit à prévoir pour l’Ontario

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TORONTO – Selon toute vraisemblance, l’Ontario restera un membre observateur de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) au terme du prochain Sommet de la Francophonie, en octobre. La ministre des Affaires francophones, Marie-France Lalonde, considère pour l’instant qu’un statut de plein droit n’en donnerait pas nécessairement plus à la province.

ÉTIENNE FORTIN-GAUTHIER
efgauthier@tfo.org | @etiennefg

Il ne reste que deux mois à l’Ontario pour signifier son désir de devenir un membre de plein droit de l’OIF. Mais avec l’échéancier électoral, le coût d’un tel statut et les préparatifs nécessaires pour soumettre un dossier, tout porte à croire que l’Ontario n’ira pas de l’avant avec une telle demande.

En vertu des règles de l’OIF, un État observateur qui souhaite changer son statut doit le signifier au plus tard 6 mois avant le prochain Sommet de la Francophonie. Ce délai doit permettre aux instances de l’OIF d’étudier la demande et de mener différentes vérifications sur le terrain.

La ministre des Affaires francophones, Marie-France Lalonde, est dorénavant plus claire sur les intentions de la province à ce sujet. « Nous allons continuer de cheminer à titre de membre observateur pour les prochains mois. Il y a une perspective logistique : le 7 juin, c’est l’élection », a-t-elle confié à #ONfr lors d’un récent événement public, en janvier. « L’important est d’être là, d’être présent, d’être reconnu, d’être engagé. Ça fait en sorte qu’on est aussi important qu’un membre de plein droit », ajoute-t-elle.

Dans une lettre envoyée à Justin Trudeau, en 2016 en vue de l’obtention de son statut d’observateur, la première ministre ontarienne partageait son désir de voir l’Ontario devenir à terme un membre de plein droit.

Mme Lalonde affirme que l’Ontario se distingue au sein des membres observateurs, en raison de la qualité de ses contributions.


« Comme membre observateur, nous devons être fiers. Le gouvernement doit avoir la tête très haute considérant ce qu’on a fait en si peu de temps et de la reconnaissance que l’on a. À court terme, ça ne donnerait pas énormément plus d’être membre de plein droit » – Marie-France Lalonde


Ultimement, Kathleen Wynne devra trancher sur la suite des choses, affirme Marie-France Lalonde. « Je vais respecter la décision de la première ministre. Mais en attendant, je crois qu’il faut peut-être arrêter de toujours utiliser le terme d’observateur. On est membre de l’OIF. Moi, je suis membre de l’OIF », lance-t-elle.

Positionnement de l’Ontario en 2018

Selon des documents de l’OIF, les membres de plein droit peuvent profiter de certains avantages comparativement aux membres observateurs. Un membre de plein droit peut présenter des candidatures aux postes à pourvoir dans les institutions de la Francophonie. Le Québec par exemple a pu placer plusieurs de ses hauts fonctionnaires au siège de l’OIF à Paris. Il peut aussi se porter candidat pour accueillir différentes conférences et réunions de l’OIF, mais également son grand Sommet. L’Ontario aurait également un précieux droit de vote pour influencer les décisions de l’OIF.

Un intervenant actif dans les institutions francophones, qui préfère conserver l’anonymat, affirme que l’Ontario pourrait assez facilement devenir membre de plein droit. Mais il explique le peu d’enthousiasme du gouvernement par le coût qui sera associé à ce changement.

« L’Ontario pourrait se positionner dans tous les programmes et profiter des retombées s’il devenait membre de plein droit. La création de l’université francophone sera un argument fort pour la province si elle veut changer de statut. Mais le PIB de l’Ontario étant très élevé, la province aura une grosse contribution à faire! Plus que le Québec. On peut penser à plusieurs millions de dollars. Est-elle prête à faire cette contribution? », se demande-t-il.

Plusieurs intervenants bien au fait des rouages de l’OIF se sont confiés à #ONfr au cours des derniers jours. Il semble clair, selon leurs dires, que l’Ontario a tout avantage à demeurer encore un peu plus longtemps membre observateur. Les employés du gouvernement doivent davantage se familiariser avec les organes de l’OIF et la province n’a pas tiré tout ce qu’elle peut tirer de son adhésion actuelle. Notons qu’aucune discussion sur un changement de statut de l’Ontario au sein de l’OIF n’est en cours avec les autres provinces ou le fédéral, actuellement. Le gouvernement ne prépare pas non plus de dossier pour aller de l’avant avant l’échéance prévue du mois d’avril.

Dans les prochaines semaines, le gouvernement ontarien devrait annoncer les détails d’un grand événement faisant suite à la participation de plusieurs leaders franco-ontariennes à la Conférence des femmes de la Francophonie en Roumanie, l’automne dernier. Il doit aussi renouveler sa contribution volontaire et préciser les projets qu’il compte appuyer en lien avec l’égalité hommes/femmes et l’éducation.

Trois facteurs à considérer

La contribution obligatoire d’un membre de plein droit : le Québec a versé 5,5 millions de dollars à l’OIF en 2015. En comparaison, la même année, le Nouveau-Brunswick a contribué à hauteur de 400 000 $. L’Ontario a un PIB plus élevé que le Québec, on peut croire que la facture pourrait facilement atteindre plus de 7 millions de dollars, en incluant les montants à verser de manière obligatoire et volontaire.

L’engagement de la province pour la francophonie : c’est l’un des facteurs étudiés par l’OIF lors d’un changement de statut. L’Ontario ne devrait pas avoir de difficultés à ce niveau, alors qu’elle pourra évoquer son large réseau éducatif de langue française, ses investissements pour la création d’une université de langue française et d’autres gestes qui démontrent son attachement à la francophonie ontarienne et internationale.

Une force de frappe canadienne : le gouvernement canadien a tout intérêt à voir le plus de provinces possible se joindre à lui comme membre de plein droit. Par le passé, cependant, certains pays se sont montrés hésitants face à l’arrivée des provinces canadiennes au sein de l’Organisation. Ils craignent que le Canada aille trop de poids face aux autres pays, notamment quand vient le temps d’effectuer un vote.


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