Grève : à Espanola, l’impact redoutable du manque d’activités scolaires

Josée Lapointe, enseignante et orientrice à l’École secondaire catholique Franco-Ouest, et Cammie Thibert, enseignante à l’École Saint-Joseph d’Espanola. Crédit image: Didier Pilon

ESPANOLA – Dans les petites villes, la grève des enseignants est moins visible. Alors que des milliers d’enseignants bloquent des rues de Toronto à la circulation, ils ne sont à peine que 25 à débrayer devant les écoles d’Espanola. Mais pour une communauté francophone minoritaire, l’impact est d’autant plus important.

Environ 15 % des 5 000 habitants d’Espanola se considèrent francophones, selon le plus récent recensement. La transmission de la langue française n’est pas quelque chose à tenir pour acquis.

« On est dans une ville majoritairement anglophone », note Josée Lapointe, enseignante et orientatrice à l’École secondaire catholique Franco-Ouest. « Il faut vraiment faire valoir la culture francophone et la langue si l’on veut que les élèves maintiennent leur français. »

Les écoles, dit-elle, jouent un rôle essentiel quant à la socialisation en français des élèves.

« Il n’y a pas beaucoup d’espaces francophones à Espanola. On est à 45 minutes de Sudbury, donc on participe aussi à leurs activités culturelles au Théâtre du Nouvel-Ontario, à Science Nord, etc. Mais ce n’est pas tout le monde qui peut s’y rendre. Les activités à l’école sont donc une partie vraiment importante de la socialisation en français de nos élèves. »

« On essaie habituellement de faire le plus de rassemblements possibles », renchérit Cammie Thibert, enseignante à l’École Saint-Joseph d’Espanola. « Par exemple, les élèves de l’école secondaire sont venus, en septembre, pour organiser une journée de jeux. »

Cependant, tout au long de la grève du zèle, les membres de l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO) ne peuvent plus organiser d’activités ou accueillir d’invités.

« Pourtant, ce sont ces activités qui marquent vraiment le parcours de nos élèves », affirme Annie Lapointe, enseignante en 2e année. « Ce sont vraiment les enfants qui souffrent dans tout ça. »

Annie Lapointe, enseignante en 2e année à l’École Saint-Joseph d’Espanola. Crédit image : Didier Pilon

Si elle souhaite toujours encourager les élèves à vivre activement leur francophonie, ses mains sont liées, dit-elle.

« On veut leur transmettre la passion de la langue française. Mais, tout au long de la grève, la responsabilité d’organiser des activités en français retombe sur les parents. »

Selon Josée Lapointe, cette situation constitue un défi particulier pour les francophones.

« Durant la grève, les élèves anglophones continuent de vivre leur culture », souligne-t-elle. « Ils ont encore accès à plein de médias dans leur langue : les émissions de télévision, les films, la radio, etc. Mais pour bien des élèves francophones, l’école est souvent le seul endroit public où ils vivent en français. »

Volte-face sur les cours en ligne

Plus tôt cette semaine, le gouvernement Ford a fait volte-face sur l’imposition de cours en ligne.

Le ministre de l’Éducation, Stephen Lecce a déclaré que le gouvernement continuera à développer un nouveau système d’apprentissage en ligne, mais que les cours ne seront pas obligatoires pour l’obtention du diplôme d’études.

Josée Lapointe se réjouit de ce retournement.

« Les élèves ont besoin de mettre leur téléphone cellulaire et leur ordinateur de côté, de se déconnecter de leurs médias sociaux et de parler avec des êtres humains devant eux », affirme-t-elle.

« Ils font ça en salle de classe avec des enseignants. Les placer dans un isoloir avec leurs ordinateurs, c’est réduire encore plus leurs habilités sociales. »