La nécessaire relance d’Amanda Simard

La députée indépendante Amanda Simard, lors du Facebook Live le 18 mars. Capture écran ONFR+

[ANALYSE] 

TORONTO – Amanda Simard ne laisse jamais indifférent. Décriée durant la campagne des élections provinciales, l’an passé, pour son manque de communication, l’élue de Glengarry-Prescott-Russell (GPR) devenait quelques mois plus tard l’égérie de La Résistance franco-ontarienne face aux coupes de Doug Ford. Aujourd’hui, la voilà qui souffle de nouveau le chaud et le froid.

Désormais étiquetée indépendante sur les bancs de Queen’s Park, Amanda Simard a vécu une première partie d’année compliquée. Certes, son temps de parole a été considérablement réduit, mais ses détracteurs lui reprochent à raison ses nombreuses absences à l’Assemblée législative de l’Ontario. À titre d’indépendante, Mme Simard n’a pris part qu’à sept votes sur une possibilité de 60. Trop peu.

Déplacement à Washington, à la conférence globale du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, ou encore à Buckingham Palace, Amanda Simard a aussi beaucoup voyagé durant les derniers mois. Des séjours en tant que représentante de la province de l’Ontario, mais qui sont mal passés pour certains…

À 500 kilomètres de Queen’s Park, Amanda Simard n’a pas été épargnée non plus par les critiques. Son absence manifeste lors des inondations au printemps dans sa circonscription de l’Est ontarien a provoqué la colère de beaucoup de résidents, et fait sourciller du même coup les maires.

Comment dès lors interpréter ces critiques? La principale intéressée l’avait justifié elle-même à ONFR+ en juin. Queen’s Park? « Ce n’est plus une séance de questions, c’est une séance d’applaudissements! C’est tout le temps une garderie. » Pour ses absences à l’étranger, la députée avait fait montre de son sens de la formule caractéristique. « On ne dit pas non à la Reine! »

Il y a du vrai dans les explications de la députée. Sauf que les 19 952 résidents qui ont choisi, en juin 2018, de l’envoyer à Queen’s Park attendaient peut-être autre chose de leur représentante.

Une voix particulière

La voix de l’élue de Glengarry-Prescott-Russell à l’Assemblée législative n’est pas n’importe laquelle. Il s’agit la plupart du temps d’une des rares voix en français et capable de représenter le milieu agricole. Des spécificités sous-estimées voire méconnues du côté de Toronto. Dans ces conditions, la députée de ne peut pas se taire ou se résigner au silence.

Rien n’est perdu pour la députée. Le formidable élan de sympathie né de la crise linguistique peut être retrouvé. Dans l’esprit de ses électeurs et des Franco-Ontariens, Amanda Simard restera pour longtemps « une héroïne », au même titre que Gisèle Lalonde lors de la crise de SOS Montfort, ou encore Jean-Robert Gauthier opposé au rapatriement de la Constitution en 1982.

Les limites d’être indépendante

Reste que pour se maintenir en politique provinciale, Amanda Simard devra redoubler de présence et de visibilité. Sans l’étiquette progressiste-conservatrice ou libérale, sa réélection en 2022 n’est pas assurée.

Se priver de l’absence d’Amanda Simard dans les affaires provinciales n’est aujourd’hui pas souhaitable pour les Franco-Ontariens. D’une, l’élue de GPR reste l’une des rares voix francophones à Queen’s Park bientôt privé de Marie-France Lalonde et Nathalie Des Rosiers. Élevée dans les institutions francophones depuis son enfance, elle est l’une des seules à comprendre des subtilités qui échappent même à la ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney.

Plus que jamais, Amanda Simard a aujourd’hui son destin en main : rester une étoile filante en partie grâce à la crise linguistique de l’automne 2018, ou aller plus loin et plus haut.

Cette analyse est aussi publiée dans le quotidien Le Droit du 29 juillet.