La vérificatrice générale de l’Ontario exige des preuves

Bonnie Lysyk, Vérificatrice générale de l'Ontario. Crédit photo: Jean-François Morissette

TORONTO – La vérificatrice générale de l’Ontario, Bonnie Lysyk, souhaite que le gouvernement fournisse davantage de preuves écrites avant de pouvoir utiliser les surplus de 10,7 milliards de dollars de deux fonds de retraite gérés conjointement par la province et des syndicats pour éponger le déficit.

JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE
jmorissette@tfo.org | @JFMorissette72

Lors d’une première sortie publique depuis la publication d’un rapport d’experts indépendants lundi dernier sur la gestion des fonds, le chien de garde des finances publiques ontariennes a martelé, le jeudi 16 février, que son Bureau restait intègre et indépendant.

Trois jours auparavant, un groupe d’experts indépendants a affirmé que le gouvernement pouvait utiliser le surplus de 10,7 milliards de dollars comme un actif de l’État. Ce montant permet en théorie au gouvernement de réduire le déficit de la province en diminuant ses cotisations aux différents régimes. L’usage de ces fonds est essentiel pour l’arrivée à l’équilibre budgétaire, prévu dès le prochain budget.

« Ce litige n’oppose donc pas le Bureau du vérificateur général et le gouvernement. Il oppose plutôt les deux parties qui ont, en quelque sorte, un compte bancaire conjoint », s’est exclamée Bonnie Lysyk lors d’un point de presse.

Pour Mme Lysyk, sans une autorisation écrite des syndicats, le gouvernement de Kathleen Wynne ne peut comptabiliser ces surplus en actifs.

« Le problème est que la province veut que notre Bureau émette une opinion sans réserve à l’égard de ses états financiers, acquiesçant du coup à son vœu d’avoir accès à ces fonds sans aucune restriction. Et nous ne pouvons pas émettre cette opinion sans réserve tant que les deux syndicats de la fonction publique, qui sont les co-répondants, n’accepteront pas par écrit d’autoriser la province à utiliser cet argent », a-t-elle expliqué.


« Cet argent n’est pas à moi. Il est destiné aux employés et aux retraités qui ont cotisé pour bénéficier d’une retraite confortable. Ce n’est donc pas ma pension, et ce n’est pas mon déficit budgétaire. » – Bonnie Lysyk


En exemple, la vérificatrice générale a rappelé que la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick, les seules deux autres provinces dont les régimes de retraite publics affichent des excédents, ne traitent pas les excédents comptables comme des actifs comptables nets.

Pas de lettre de consentement requis

Par voie de communiqué, la présidente du Conseil de Trésor de l’Ontario, Liz Sandals, a défendu l’indépendance du panel d’experts dirigé par Tricia O’Malley. Elle a également affirmé qu’il ne fallait pas nécessairement de lettre de consentement de la part des différentes parties pour utiliser ces fonds.

« Il (le panel) a conclu que le gouvernement n’avait pas besoin de lettre de consentement de la part des syndicats parce que les directives de chacun des plans expliquent comment peuvent être utilisés les fonds », a-t-elle expliqué par voie de communiqué. « Il (le panel) a également conclu que les normes comptables du secteur public ne requièrent pas de consentement écrit lorsqu’il vient le temps de déterminer quand et comment les contributions peuvent être réduites au-delà de l’arrangement déjà en place », a ajouté la présidente du Conseil du Trésor.

Liz Sandals a rappelé que le groupe d’experts indépendants mandaté par son gouvernement avait statué que le calcul de ces surplus dans les actifs financiers de la province permettait d’avoir une meilleure idée sur l’état réel de la santé économique de l’Ontario.

Le gouvernement a accepté lundi 13 février les conclusions de ce groupe d’experts.

Des appuis à Bonnie Lysyk

Lisa MacLeod, critique du Conseil du Trésor pour le Parti progressiste-conservateur de l’Ontario (PC de l’Ontario), a salué la démarche de la vérificatrice générale de l’Ontario.

« Les faits restent que le gouvernement ne peut pas user légalement ces surplus pour équilibrer son budget sans l’accord des deux syndicats. Il n’y a aucune preuve réelle que les chiffres des syndicats et ceux du gouvernement concordent », a-t-elle expliqué.

Après la sortie du rapport donnant raison au gouvernement, Warren Thomas, président du Syndicat des employées et employés de la fonction publique de l’Ontario (SEFPO), avait publiquement appuyé la position de Bonnie Lysyk. Selon M. Thomas, « les avoirs de retraite appartiennent aux participants du régime ».

« Je le dis tout de suite à la première ministre (Kathleen Wynne) : l’argent dans ces régimes appartient aux participants de ces régimes. Ce n’est pas son argent et elle ne peut pas jouer avec », a-t-il déclaré.

Selon les données du ministère des Finances, les surplus du Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario (RREO) sont évalués à 10,1 milliards de dollars, alors que ceux du régime de retraite du SEPFO sont de 521 millions de dollars.