L’ACFO-Toronto préoccupée par une réduction du conseil municipal

Le drapeau franco-ontarien devant l'hôtel de ville de Toronto.

TORONTO – L’Association des communautés francophones de l’Ontario (ACFO) de Toronto craint qu’en réduisant la taille du conseil municipal de la Ville reine, le gouvernement provincial nuise à la capacité des francophones de se faire entendre.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

« Nous sommes préoccupés par ce projet de loi. C’est déjà difficile de se faire entendre quand on est en situation minoritaire, de trouver la bonne porte à laquelle frapper, mais si en plus on réduit ces portes… », lance Constant Ouapo, président de l’ACFO-Toronto. « En diminuant le nombre de conseillers municipaux, ceux qui resteront auront encore plus de dossiers à gérer et ce sera encore plus difficile de faire entendre nos revendications. »

Ce vendredi, le gouvernement progressiste-conservateur a jeté un pavé dans la mare en annonçant le dépôt d’un projet de loi visant à « améliorer les administrations locales » dans lequel il propose notamment de réduire la taille du conseil municipal de Toronto de 47 à 25 conseillers, en s’alignant  sur les grilles électorales fédérale et provinciale actuelles.

« Dysfonctionnel et inefficace, le conseil voit sa mission entravée par différents intérêts spéciaux bien établis. En alignant le conseil municipal de Toronto sur les grilles électorales provinciale et fédérale actuelles, le maire de la Ville jouira d’un champ d’action étendu et les contribuables de Toronto pourront compter sur une administration locale plus efficiente et efficace », explique le gouvernement dans un document d’information.

Le CFT moins inquiet

M. Ouapo cite l’exemple du domaine de la santé où il est bien difficile de faire comprendre qu’il faut desservir la population francophone de Toronto en français, dans une ville où cette communauté représente un infime pourcentage et est parfois vue comme une minorité parmi les autres.

« Les conseillers municipaux risquent de se dire la même chose! », craint-il.

Mais pour le vice-président du conseil d’administration du Centre francophone de Toronto (CFT), René Viau, la proposition du gouvernement de Doug Ford n’est pas si surprenante.

« M. Ford a dit qu’il voulait réduire la taille du gouvernement. Il l’a déjà fait pour son conseil des ministres et cela suit la même logique. Il y a beaucoup de grosses villes américaines, comme Los Angeles, qui ont une population plus importante et moins de conseillers municipaux. Je ne pense pas que ça aura un impact sur les services en français, ça va plutôt conduire à une rationalisation des effectifs. Quant à la communauté franco-ontarienne, elle pourra continuer de faire part de ses revendications au comité consultatif francophone de la ville. »

Économies de 25,5 millions

Selon les calculs du Parti progressiste-conservateur (Parti PC) de l’Ontario, cette réduction permettrait une économie de plus de 25,5 millions de dollars sur quatre ans.

Outre la réduction de la taille du conseil municipal de Toronto, le projet de loi prévoit aussi de permettre aux administrations locales des régions de York, de Peel, de Niagara et de Muskoka de choisir elles-mêmes leurs présidents de conseil régional et non de devoir passer obligatoirement par une élection directe, comme l’avait votée le gouvernement libéral en 2016.

« On constate bien souvent que c’est au palier municipal que le gouvernement est le plus impliqué dans la vie quotidienne des gens », explique le ministre des Affaires municipales et du Logement Steve Clark. « Les mesures que nous proposons démontrent que la province sert les intérêts de la population. En veillant à ce que les administrations locales travaillent plus fort, plus judicieusement et plus efficacement, nous améliorerons la vie de tous les Ontariens. »

Le gouvernement prévoit poursuivre sa réflexion à travers toute la province, en procédant à un examen de la gouvernance régionale en Ontario qui comprendra des consultations avec les municipalités dès la prochaine conférence de l’Association des municipalités de l’Ontario, du 19 au 22 août, à Ottawa.

Besoin de consulter

Appuyant les propos du maire John Tory, M. Ouapo souhaiterait que le gouvernement s’adresse aux Torontois avant de prendre une telle décision.


« Cette décision concerne la population de Toronto. Elle devrait avoir son mot à dire. Je pense que ce serait bien de consulter les gens » – Constant Ouapo


Le projet de loi est d’autant plus regrettable, poursuit-il, qu’il intervient de manière tardive, alors que les candidats pour les prochaines élections municipales ont théoriquement jusqu’à aujourd’hui pour manifester leur intérêt.

Compte tenu de l’imminence des élections municipales en Ontario, prévues pour le 22 octobre, le gouvernement prévoit repousser la période de mise en candidature pour le scrutin municipal et scolaire de Toronto du 27 juillet au 14 septembre.

Les partis d’opposition à Queen’s Park ont fortement réagi à la proposition de M. Ford. La chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Andrea Horwath, juge que le premier ministre « abuse de ses pouvoirs et tente de manipuler les élections municipales de Toronto », en se comportant comme un « dictateur ».

Un point de vue partagé par le Parti libéral qui demande au gouvernement Ford de « mettre un frein à ce projet chaotique de dernière minute jusqu’à ce que les Ontariens et Ontariennes aient été dûment consultés. Il est tout simplement irresponsable de procéder à des changements antidémocratiques à ce moment ».

Dernière mise à jour le vendredi 27 juillet 2018 à 15h25