Le budget de l’Ontario le 23 avril
TORONTO – Le grand argentier de l’Ontario, Charles Sousa, promet de déposer l’« un des budgets les plus progressistes et innovateurs » qu’a connu la province, le jeudi 23 avril. Un budget qui s’annonce assez à droite, moins d’un après que le Parti libéral se soit fait reconduire au pouvoir avec un programme de gauche.
FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault
M. Sousa a dit de son troisième budget qu’il pavera le chemin « pour la prochaine génération » lors d’un bref point de presse dans un incubateur de haute technologie à l’Université Ryerson, à Toronto, le mardi 14 avril.
Le clan libéral à Queen’s Park aurait toujours l’intention de finir d’éponger un déficit de 10,9 milliards $, de loin le plus élevé de toutes les provinces canadiennes, d’ici 2018. Et il aurait toujours dans sa mire d’investir 13 milliards $ par année dans l’infrastructure au cours de la prochaine décennie.
Mais un an après avoir défendu un programme qu’on disait même plus à gauche que celui des néo-démocrates, M. Sousa a clairement signalé un virage vers la droite. « C’est important qu’un gouvernement soit engagé. Mais il n’est pas question de créer un gouvernement plus gros. Il est question de créer plus d’opportunités », a-t-il indiqué à la presse.
Vente d’Hydro One
Les libéraux de Kathleen Wynne auraient donc bien l’intention de se départir d’une partie la société provinciale de distribution et de transmission d’électricité Hydro One et d’injecter les profits de cette vente, estimés à 15 milliards $, dans l’infrastructure.
« C’est important de dégager la valeur de nos sociétés d’État », a insisté M. Sousa. « Nous savons que nous devons investir dans notre infrastructure – dans nos routes, nos ponts, dans nos transports en commun – si nous voulons demeurer compétitifs sur le long terme. Il faut trouver des manière de financer ces investissements ».
Le ministre des Finances a aussi promis de rendre public « au cours des prochains jours » le rapport d’un panel d’experts sous l’égide de l’ex-banquier Ed Clark qui est censé guider le gouvernement vers la privatisation partielle d’Hydro One, de même qu’une libéralisation de la vente d’alcool dans la province.
« Il y a du changement qui se brasse en Ontario », a lancé à la blague M. Sousa, sans rien ajouter sur ses plans pour casser le quasi-monopole vieux de neuf décennies que détient le Beer Store sur la vente de bière.
Fait intéressant : lorsque les libéraux de Dalton McGuity avaient rendu public le rapport de l’économiste Don Drummond sur l’assainissement des finances de la province, en 2012, ils l’avaient fait selon les règles de l’art pour un document de cette envergure – dans un huis clos, avec des experts à la disposition des médias et des politiciens prêts à réagir. Trois ans plus tard, le rapport Clark n’aura droit vraisemblablement qu’à un dépôt en catimini à une semaine d’un budget.
Marché du carbone
À peine une journée après l’annonce de l’adhésion de l’Ontario à un système de plafonnement et d’échanges de crédits du carbone, le ministre Charles Sousa est aussi demeuré muet au sujet des coûts ou des retombées possibles d’un telle mesure environnementale pour les contribuables et les entreprises de l’Ontario.
« Nous n’avons pas encore déterminé l’impact complet de cette mesure. Mais nous savons que ça coûte beaucoup plus cher de ne rien faire », a esquivé M. Sousa, faisant allusion aux menaces météorologiques qui pourraient faire bondir les primes d’assurances, entre autres.
Le budget de l’Ontario sera déposé deux jours après celui du gouvernement fédéral.
« C’est clair que les libéraux ont déjà tout décidé », a brandi Victor Fedeli, critique progressiste-conservateur en matière de Finances. « Ils vont nous dire une chose et faire le contraire, comme ils l’ont fait avec cette taxe sur le carbone », a-t-il ajouté. « Ils vont vendre des biens publics et utiliser l’argent pour tenter d’équilibrer le budget. »
À la période de questions à Queen’s Park, la chef néo-démocrate Andrea Horwath a pilonné le gouvernement libéral pour avoir, selon elle, renié son engagement à ne jamais vendre Hydro One au privé. « C’est la mauvaise direction pour l’Ontario. Il y a d’autres outils de revenus, comme les impôts sur les grandes entreprises, que nous pouvons utiliser au lieu de vendre nos biens publics », a-t-elle déclaré à la presse à sa sortie de la Législature.