Le compte à rebours est commencé avant les élections

Crédit image: Maxime Delaquis

TORONTO – À un an jour pour jour du scrutin, les partis politiques ontariens ont du pain sur la planche s’ils veulent convaincre l’électorat de leur pertinence. Avec le dernier droit qui s’amorce, #ONfr s’est entretenu avec des politologues pour analyser les défis à venir.

JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE
jmorissette@tfo.org | @JFMorissette72

Au cours des dernières semaines, le Parti libéral de Kathleen Wynne a tenté de séduire un électorat de la gauche avec des mesures comme l’augmentation du salaire minimum à 15 $ de l’heure en janvier 2019 et la création d’une assurance médicament pour les jeunes de moins de 25 ans.

Laure Paquette, politologue à l’Université de Lakehead, estime qu’il s’agit de la seule chance de la première ministre ontarienne si elle veut rester au pouvoir dans un an.

« Quand on va voir les campagnes publicitaires prochainement, à moins d’un revirement soudain dans l’opinion publique en faveur de Mme Wynne, on va surtout parler de ces positions plus à gauche », prédit Laure Paquette.

Par ailleurs, malgré la promesse de réduire les factures des Ontariens de 25 %, le problème de l’électricité ne cessera pas de hanter le gouvernement de la première ministre Kathleen Wynne, rappelle Mme Paquette.

« Les gens sont fâchés et il faudrait renverser la vapeur plus que ce qu’elle (Kathleen Wynne) a fait, mais je ne vois pas comment ça peut être fait étant donné les autres décisions à prendre » – Laure Paquette

Mme Paquette note également que la personnalité de la première ministre, Kathleen Wynne, reste un problème majeur.

« Ce n’est pas une personnalité qui suscite de l’intérêt (…) et ce qui risque d’arriver est que le parti (libéral) va devoir vendre leurs positions plutôt que la première ministre », estime la politologue.

Geneviève Tellier, politologue à l’Université d’Ottawa, note, pour sa part, qu’il ne faut pas négliger l’effet de lassitude de l’électorat face au parti de Mme Wynne. Selon elle, cela jouera certainement en la défaveur du gouvernement au cours des prochains mois.

« On avait entendu cela au cours de la dernière élection et au final, Mme Wynne est restée en poste alors il ne faut pas uniquement se concentrer sur cela » – Geneviève Tellier

« Tout ne va pas bien dans la province, quand on pense au logement, à l’électricité et autres, et la stratégie des libéraux est de montrer qu’ils sont proactifs et qu’ils sont capables d’offrir des services dont voudrait la population et que les autres partis ne seraient pas capables d’offrir », analyse Mme Tellier.

 

Les défis de Patrick Brown

Mme Paquette estime que les défis ne manqueront pas dans la prochaine année pour le chef du Parti progressiste-conservateur de l’Ontario, Patrick Brown. 

« Le grand problème de Patrick Brown est que les gens ne savent pas qui il est, même si ça fait un certain temps qu’il est en poste. (…) C’est inhabituel à un an des élections », note-t-elle.

La politologue croit également que la frange plus à droite du parti de M. Brown pourrait nuire à la formation politique si elle commence à faire trop de bruit.

Patrick Brown
Le chef du Parti progressite-conservateu de l’Ontario, Patrick Brown. 

Un avis partagé par Mme Tellier.

« Il a un parti très divisé sur différents thèmes et il doit essayer de les rassembler. Il ne faut pas oublier qu’une partie de son électorat est ce qu’on appelle des conservateurs sociaux », explique-t-elle.

« Il doit rassembler plusieurs électeurs qui n’ont pas nécessairement la même vision et on voit qu’il cherche encore une façon de le faire », ajoute la politologue.

Pour elle, cela explique en partie l’ambiguïté de M. Brown dans certains dossiers.

« Les gens ne savent pas encore exactement ce que cela veut dire d’appuyer Patrick Brown. À l’époque de Mike Harris [premier ministre de 1995 à 2002], on le savait, c’était clair (…), mais Patrick Brown, c’est encore difficile. Il essaye de ménager un peu tout le monde dans les deux pôles de son parti et de montrer qu’il est un personnage de consensus, mais on n’a pas encore vu le résultat de cela », analyse Mme Tellier.

 

Vers un gouvernement libéral?

Malgré les sondages défavorables à M. Wynne, Mme Paquette prédit que les libéraux ont encore des chances de rester en selle au prochain scrutin, mais rien n’est encore joué.

« Je ne peux pas voir comment les deux autres chefs pourraient vraiment remporter suffisamment de sièges. Si Mme Wynne rentre à la prochaine élection, ce sera parce qu’il n’y aura pas eu de bonne opposition par les deux autres chefs », nuance-t-elle toutefois.

La politologue de l’Université de Lakehead note tout de même que bien des éléments peuvent survenir d’ici un an, ce qui pourrait changer les tendances actuelles.

Kathleen Wynne
La première ministre de l’Ontario, Kathleen Wynne.

Sans donner la victoire à qui que ce soit, Mme Tellier indique qu’elle ne serait pas surprise de voir un succès de la part des libéraux.

« Je ne veux pas dire qu’ils (les libéraux) vont gagner, loin de là, mais les conservateurs lors des dernières élections se sont eux-mêmes tirés dans le pied. On a vu des surprises et je n’ai rien vu qui me permet de dire que cette époque est terminée », explique-t-elle.

La scrutin provincial aura lieu le 7 juin 2018.