Le fédéral, dernier espoir pour l’Université de l’Ontario français

La présidente du conseil de gouvernance de l'Université de l'Ontario français, Dyane Adam.

OTTAWA – La présidente du Conseil de gouvernance de l’Université de l’Ontario français (UOF), Dyane Adam, a plaidé pour un financement temporaire de son institution par le fédéral, le temps de trouver des solutions.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Devant les élus fédéraux, ce jeudi matin, l’ancienne commissaire aux langues officielles du Canada a demandé pour une intervention du gouvernement de Justin Trudeau.

« Ce qu’il faut, c’est acheter un peu de temps pour trouver des solutions. Je veux que le fédéral fasse preuve d’un leadership fort et musclé, qu’il prenne des mesures positives pour favoriser l’épanouissement de la communauté franco-ontarienne par le soutien d’une institution – l’université franco-ontarienne – qui est au cœur de son développement économique, intellectuel et culturel. »


« On en est au dernier jalon et on se fait couper l’herbe sous les pieds » – Dyane Adam


Alors que les deux paliers de gouvernement ne cessent de se renvoyer la balle, le fédéral se disant prêt à financer la moitié de l’UOF si la province en fait la demande, Mme Adam juge qu’il y aurait des moyens pour Ottawa de contourner le gouvernement de Doug Ford.

« Normalement, c’est 50-50 pour l’appui financier des communautés en matière d’enseignement supérieur. Mais il y a d’autres façons d’appuyer le projet. Le gouvernement fédéral investit dans la recherche, l’innovation, l’infrastructure, le développement économique… Si tu veux, tu peux! On est dans une situation urgente, il y a des moyens pour intervenir. »

À court terme, elle estime que l’espoir est donc entre les mains du fédéral. Cela pourrait permettre, selon Mme Adam, d’entamer ensuite des discussions entre toutes les parties.

« Il faut arrêter de se blâmer et être en mode solution. Il y a une communauté qui est en jeu. On ne peut pas perdre le temps à se chicaner. »

Depuis l’énoncé économique du 15 novembre, qui a sonné le glas du projet d’université, la présidente du Conseil de gouvernance indique n’avoir eu aucune rencontre, malgré les demandes, avec la ministre aux Affaires francophones Caroline Mulroney et la ministre de la Formation et des Collèges et Universités, Merrilee Fullerton.

L’opposition convaincue

Le porte-parole aux langues officielles du Parti conservateur du Canada (PCC), Steven Blaney, se montre convaincu par les arguments de Mme Adam et demande à la ministre du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie, Mélanie Joly, d’agir.

« Il est temps qu’elle passe de la parole aux actes. Mme Adam a été très claire : le temps de la passivité et de l’attentisme est révolu. C’est le temps de l’action positive et ça passe par un leadership fédéral. Le gouvernement fédéral a des responsabilités constitutionnelles de soutenir les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Il y a plusieurs avenues qui ont été proposées : un financement direct, un financement par le biais du gouvernement de l’Ontario ou un financement temporaire. »

Son homologue pour le Nouveau Parti démocratique (NPD), François Choquette demande aux libéraux de faire preuve de créativité.

« On a tous compris que c’est une compétence provinciale, l’Université de l’Ontario français. Mais il faut contourner cette situation-là, par exemple en changeant la mission du Conseil de gouvernance pendant un certain temps, afin de pouvoir le financer pour maintenir la volonté et l’expertise en place. Ça nous donne du temps, et c’est ce dont on besoin en ce moment. »

Car le temps presse pour l’UOF dont le financement s’achèvera le 15 janvier, même si Mme Adam a concédé que la date pourrait être flexible en cas de garantie de financement. Outre la question financière, le promoteur immobilier du lieu qui avait été choisi pour accueillir le campus temporaire de l’université a laissé jusqu’au 15 janvier pour fournir une réponse, aux mêmes conditions que prévu initialement.

L’objectif de 2020 s’éloigne

La perspective d’accueillir les 300 premiers étudiants, tel qu’envisagé au départ, s’éloigne jour après jour, reconnaît Mme Adam.

« C’est sûr que 2020, ça commence à être difficile. Nos programmes ont été développés, mais ils n’ont pas été soumis pour approbation par la ministre Fullerton. On espérait une approbation pour le printemps 2019 afin d’en faire la promotion dans les écoles. »

La coprésidente du Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO), Kelia Wane, confie toutefois que l’objectif de son organisme reste encore 2020.

« Pour nous, c’est clair : peu importe le lieu, on veut absolument que l’Université de l’Ontario français ouvre ses portes en 2020. On veut travailler avec le gouvernement pour trouver une solution, même si on sait que plus le temps passe, plus ce sera difficile. »

Le comité convoquera des sous-ministres ontariens

Le comité permanent des langues officielles poursuivra ses travaux sur la francophonie canadienne, et plus particulièrement sur la situation en Ontario français, au retour de la Chambre, fin janvier.

Alors que la ministre Mulroney et sa collègue Mme Fullerton ont refusé l’invitation lancée par les députés fédéraux, le comité a décidé, par une motion adoptée ce jeudi, de convoquer leurs sous-ministres.

« Nous prévoyons faire un rapport d’ici la mi-février pour dépôt en Chambre », explique le président du comité, le député libéral Denis Paradis. « C’est sûr qu’à côté, on va continuer à pousser, car je pense qu’il est important de maintenir vivant le dossier. »