Le président de l'AFO, Carol Jolin. Crédit image: Patrick Imbeau

[ANALYSE]

RICHMOND HILL – Il était le plus attendu dans cette course à deux à la présidence de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO). Carol Jolin a été réélu, dimanche, à la tête de l’organisme porte-parole des Franco-Ontariens.

SÉBASTIEN PIERROZ
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Le président sortant a tout de même dû multiplier les poignées de main, et convaincre un minimum tout au long des quatre jours du congrès annuel de l’AFO. Dans les couloirs du vaste hôtel de Richmond Hill choisi comme lieu de l’événement, son opposant Pablo Mhanna-Sandoval promettait le changement et plus d’inclusion.

La partie avait été plus facile en 2016 pour Carol Jolin alors qu’il succédait à Denis Vaillancourt, après une élection sans opposition.

Le résident d’Orléans a-t-il réussi sa mission? D’une manière générale, oui. Car depuis deux ans, l’AFO a gagné en mordant face au gouvernement.

Née de la fusion en 2005 de l’Assemblée des communautés franco-ontariennes (ACFO) et de la Direction de l’Entente Canada-communauté Ontario (DECCO), l’AFO avait d’abord connu des premières années houleuses marquées par des problèmes de gestion.

Élu en 2010, Denis Vaillancourt a ensuite placé l’organisme sur de bons rails, lui donnant une crédibilité auprès des joueurs à Queen’s Park. Diplomate et prudent, ce dernier n’était pas de ceux privilégiant les grandes déclarations et le conflit. En tant qu’ancien président de l’Association des enseignantes et enseignants franco-ontariens (AEFO), Carol Jolin n’a pas eu autant de retenue.

En deux ans, le président a donné plus de fermeté à l’AFO, même si d’autres militants dénonceront toujours une soi-disant mollesse de l’organisme. Le président réélu a participé entre autres à la mise sur pied de l’Université de l’Ontario français et poussé sur le dossier de l’immigration francophone.

AFO plus politisée mais des défis

En vérité, l’AFO est plus politisée qu’elle ne l’a jamais été. Au fil des années, elle s’est même évertuée à gommer l’image de « gang des libéraux » qui lui collait aux basques. Les contacts sont aujourd’hui noués avec les trois principaux partis à Queen’s Park. Un jeu de coulisses qui oblige bien souvent à ménager la chèvre et le chou dans les déclarations publiques.

Au cours des prochains mois, deux défis attendent Carol Jolin. Le premier sera de poursuivre les rapports avec le gouvernement progressiste-conservateur de Doug Ford. Les premiers quatre mois ont pour l’instant été sans heurts, et moins sombres que prévu. Mais les probables compressions à venir s’annoncent comme le premier test dans cette relation.

Le second enjeu est bien sûr celui de l’inclusion. Comme ses deux prédécesseurs, Mariette Carrier-Fraser et Denis Vaillancourt, M. Jolin n’a pas réussi à satisfaire les minorités raciales et ethnoculturelles francophones. Taxée par les plus extrêmes de ces groupes d’être « colonialiste », l’AFO doit encore convaincre. Deux sièges sur les 11 du conseil d’administration de l’organisme sont pourtant réservés à ces minorités.

Pablo Mhanna-Sandoval et l’inclusion

Bien qu’il ait échoué à devenir président, Pablo Mhanna-Sandoval, 18 ans, a aussi beaucoup parlé d’inclusion au cours de sa campagne. Une inclusion en particulier des plus jeunes.

Au-delà du terme un tantinet paternaliste de « relève », il faut sans doute voir dans cette candidature le reflet d’une génération pour laquelle la francophonie ne peut plus être indissociable d’une parfaite représentation de la diversité et du combat pour la justice sociale. Pour satisfaire tout le monde dans les 24 prochains mois, Carol Jolin ne pourra pas se contenter des victoires politiques.

Cette analyse est aussi publiée dans le quotidien Le Droit du 29 octobre.