Les 10 circonscriptions à surveiller pour les Franco-Ontariens

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C’est ce soir que les Ontariens connaîtront les noms de 124 députés de l’Assemblée législative. #ONfr a identifié 10 circonscriptions que les Franco-Ontariens devront surveiller à la loupe au cours de la soirée. Tour d’horizon. 

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

Glengarry-Prescott-Russell : un duel fratricide

Cas assez inédit, ce sont deux personnalités de la même municipalité qui s’affrontent, ce soir. D’un côté, le maire du canton de Russell, Pierre Leroux, sous la bannière libérale. De l’autre, la conseillère municipale du canton de Russell, Amanda Simard, représente les couleurs progressistes-conservatrices. Entre les villages d’Embrun, Casselman, et Rockland, la campagne n’a pas été de tout repos entre les deux aspirants. M. Leroux s’est fait remarquer par une vidéo maladroite sur Vanier, tandis que Mme Simard n’a pas accordé la moindre entrevue aux médias. Pendant ce temps, la néo-démocrate Bonnie Jean-Louis a profité de la « vague orange » pour grimper dans les sondages. Majoritairement francophone et imprégnée de l’agriculture, Glengarry-Prescott-Russell possède une identité forte. La circonscription pourrait basculer aux mains du Parti progressiste-conservateur (Parti PC) pour la première fois depuis 1981, et connaître sa première femme députée.

Guelph : et si le Parti vert l’emportait?

À priori, le territoire de Guelph ne présente aucune particularité francophone. Quelque 2 000 Franco-Ontariens seulement seraient établis dans cette circonscription baromètre. Mais les résultats de jeudi soir pourraient avoir un impact indirect sur les francophones. Car Mike Schreiner, le chef du Parti vert, a des chances de devenir le premier candidat de sa formation élu sur les bancs de Queen’s Park. Le Parti vert pourrait-il devenir un parti allié des francophones? Dans son programme électoral, il propose en tout cas la fusion des conseils scolaires publics et catholiques. Un thème toujours sulfureux du côté des 12 conseils scolaires francophones. En cas de présence à l’Assemblée législative de l’Ontario, le parti devra aussi convaincre davantage les francophones. Pour le moment, les communications du parti restent résolument unilingues.

Le candidat du Parti vert, Mike Schreiner, jeudi 7 juin avec ses partisans. Crédit image : Twitter

Kingston et les Îles : un château fort libéral en danger

Depuis 1985, la circonscription de Kingston et les Îles n’a connu qu’une seule couleur : le rouge libéral. Seule exception : l’intermède du néo-démocrate Gary Wilson de 1990 à 1995. Ce soir, il pourrait y avoir du changement. Arrivée en 2014, Sophie Kiwala n’est pas certaine d’être réélue. De cette course à trois, les derniers sondages donnaient toujours une légère avance au candidat du Nouveau Parti démocratique (NPD), Ian Arthur. Plus de 4 000 dans cette circonscription, les francophones de Kingston seront très attentifs au choix de ce soir. Pour beaucoup d’entre eux, il y a le sentiment d’avoir été oublié dans le dossier de la construction des écoles francophones dans la région. En début d’année et après des mois d’attente, le gouvernement était allé de l’avant en annonçant la construction de deux écoles secondaires de langue française… mais depuis, les choses traînent en attendant la première pelletée de terre. Le nouveau député aura pour mission de gagner la confiance d’une partie de ces Franco-Ontariens.

Mushkegowuk-Baie James : le NPD favori

Des centaines de kilomètres séparent les différentes communautés de la circonscription de Mushkegowuk-Baie James. Aux derniers sondages, des dizaines de points séparaient aussi le néo-démocrate, Guy Bourgouin, en tête, de ses deux rivaux, le progressiste-conservateur André Robichaud et le libéral Gaëtan Baillargeon. Composée de 60 % de francophones et de près de 30 % de membres des Premières nations, Mushkegowuk-Baie James est avant tout un territoire à l’identité affirmée. Autre particularité : il s’agit de l’une des 17 nouvelles circonscriptions en place pour cette élection. Elle couvre en grande partie de l’ancienne circonscription de Timmins-Baie James. Pendant deux décennies, le néo-démocrate Gilles Bisson y a instauré une véritable forteresse orange. Le futur député devra composer avec les thèmes de l’emploi et des soins de santé déficients.

Guy Bourgouin devant son bureau de campagne à Kapuskasing. Crédit image : Étienne Fortin-Gauthier

Orléans : la carrière politique de Marie-France Lalonde en jeu

En juin 2014, Marie-France Lalonde, quasi-inconnue, s’emparait de la circonscription d’Ottawa-Orléans. Novice en politique, la nouvelle élue a gravi une à une les marches, au point d’occuper deux postes ministériels (Affaires francophones, et Sécurité communautaire et des Services correctionnels). Les résultats de ce soir pourraient malgré tout mettre en suspens la carrière politique de Mme Lalonde. Depuis plusieurs semaines, les différentes enquêtes d’opinion la placent derrière le progressiste-conservateur Cameron Montgomery. Circonscription baromètre, Orléans suit le plus souvent les résultats au niveau provincial. Dans l’ombre d’Ottawa, les 100 000 résidents d’Orléans veulent des améliorations quant au transport en commun et à la création d’emplois. Une volonté de changement qui pourrait faire du tort à Marie-France Lalonde.

Ottawa-Vanier : un bastion francophone sous surveillance

Le château fort d’Ottawa-Vanier pourrait-il tomber? De toutes les élections précédentes, jamais la circonscription, libérale depuis 1971, n’aurait été si proche de changer de couleur. Élue à l’issue d’une élection partielle en novembre 2016, Nathalie Des Rosiers tente cette fois d’obtenir un mandat complet. La ministre sortante des Richesses naturelles et des Forêts part avec l’atout de l’expérience face à ses deux principaux opposants. La néo-démocrate Lyra Evans s’affiche comme la première transgenre candidate pour un parti élu, tandis que le progressiste-conservateur, Fadi Nemr, pourrait bénéficier des bons sondages de son parti. Contrairement à la croyance populaire, Ottawa-Vanier (30,8 % de francophones) n’est pas le comté le plus francophone en Ontario. Son poids symbolique reste tout de même considérable du fait de l’influence de ses anciens représentants (Bernard Grandmaitre, Madeleine Meilleur).

Nathalie Des Rosiers, Lyra Evans, et l’interprète de celle-ci, lors du débat les opposant, vendredi 25 mai. Crédit image : Sébastien Pierroz

Sault-Sainte-Marie : les progressistes-conservateurs veulent confirmer

Il y a quasiment un an jour pour jour, les progressistes-conservateurs s’emparaient de Sault-Sainte-Marie lors d’une élection partielle. Cette victoire marquait la fin de 32 ans de domination des néo-démocrates, puis des libéraux. Ross Romano, le député élu, avait alors bénéficié du soutien inconditionnel du précédent chef progressiste-conservateur, Patrick Brown. Ce ne fut donc pas le cas au cours des quatre dernières semaines de campagne, malgré la visite récente de Doug Ford. Les sondages donnent pour le moment une mince avance à M. Romano devant la néo-démocate Michele McCleave-Kennedy. Moins nombreux qu’à Sudbury ou Timmins (un peu plus de 2 000), les francophones surveilleront d’un œil attentif le déroulement de la soirée. L’adoption en 1990 par le maire Fratesi d’un règlement interdisant l’usage du français dans l’appareil municipal avait plongé la Ville dans une crise linguistique à portée nationale. Des cicatrices que les Franco-Ontariens de l’endroit aimeraient définitivement refermer.

Stormont-Dundas-South Glengarry : Jim McDonell mais…

L’ancienne circonscription de Noble Villeneuve devrait rester dans le giron progressiste-conservateur. À moins d’un incroyable retournement de situation, Jim McDonell devrait être réélu, ce jeudi soir, pour un troisième mandat. À une centaine de kilomètres d’Ottawa, le comté a deux visages : la ville de Cornwall qui englobe la moitié de la population, et le reste, essentiellement rural, qui comprend les comtés unis de Stormont, Dundas et Glengarry. Le logement social et la lutte contre le chômage ont été les thèmes récurrents de la campagne. D’autant que la circonscription est l’une où le revenu moyen est le plus bas dans la province. Dans ces conditions, ce n’est donc pas un hasard de voir le NPD et son candidat, Marc Benoit, approcher les 40 % dans les intentions de vote. Si le parti de Doug Ford l’emporte ce soir, Jim McDonell deviendrait l’un des membres de la formation au pouvoir à bénéficier du plus de francophones dans son territoire. Quelque 19 000 Franco-Ontariens y résident.

Jim McDonell, Marc Benoit (NPD) et Elaine Kennedy (Parti vert) lors du débat à Martintown, mardi 22 mai. Crédit image : Sébastien Pierroz

Sudbury : vers la chute de Glenn Thibeault

Lorsqu’il a remporté l’élection partielle dans Sudbury en février 2015, Glenn Thibeault ne se doutait probablement pas qu’il allait vivre trois années aussi agitées. Transfuge du NPD fédéral, l’élu libéral ne partait pas avec un plébiscite. La tempête du Sudburygate (les libéraux étaient accusés d’avoir choisi illégalement Glenn Thibeault plutôt qu’Andrew Olivier), puis la gestion délicate du dossier de la vente d’Hydro One ont considérablement miné la popularité du ministre de l’Énergie. Selon toute vraisemblance, M. Thibeault cédera son siège à partir de ce soir. Le néo-démocrate Jamie West, président du Conseil du travail du district de Sudbury, a pour le moment dominé les sondages. L’ancien joueur de hockey et candidat progressiste-conservateur, Troy Crowder, n’a pas franchement convaincu. Point sombre pour la francophonie : aucun des trois candidats principaux de cette circonscription aux 17 000 francophones n’est capable de s’exprimer dans un français fluide.

Timmins : un huitième mandat pour Gilles Bisson?

De tous les députés à Queen’s Park, Gilles Bisson fait figure de vétéran. Le plus expérimenté des membres du caucus néo-démocrate pourrait être élu pour une huitième fois d’affilée, ce soir. Sauf que la campagne 2018 est synonyme de changements pour le député francophone sortant. Voilà maintenant l’ancienne circonscription de Timmins-Baie James coupée en deux, avec d’un côté Mushkegowuk-Baie James, et de l’autre Timmins. C’est un électorat beaucoup plus urbain et moins francophone qu’a dû affronter en campagne M. Bisson. Longtemps donné à la traîne dans les sondages contre le progressiste-conservateur, Yves Génier, le candidat NPD a depuis refait son retard. Pilier au sein de son parti, M. Bisson pourrait obtenir un maroquin ministériel dans le cas où sa chef, Andrea Horwath, parviendrait à former un gouvernement.

Gilles Bisson lors d’un débat. Crédit image : capture d’écran.