Les deux « nouveaux venus » à Queen’s Park

Les députés élus Stephen Blais et Lucille Collard. Crédit image: Étienne Ranger, journal Le Droit.

[ANALYSE]

OTTAWA – À l’Est, rien de nouveau. Aucune surprise n’a marqué les deux élections partielles de jeudi dernier. Les victoires de Stephen Blais et de Lucille Collard ont permis aux libéraux de conserver les circonscriptions d’Orléans et d’Ottawa-Vanier.

On attend maintenant les deux nouveaux députés au tournant. D’autant que les vainqueurs de ces scrutins spéciaux ne passent jamais inaperçus. En novembre 2016, une double élection partielle avait amené sur les bancs de l’Assemblée législative Sam Oosterhoff et Nathalie Des Rosiers.

Le premier avait fait parler de lui par sa jeunesse et des positions jugées controversées sur l’avortement, la seconde, en parvenant à arracher une officialisation provinciale du caractère bilingue d’Ottawa.

Dans un autre registre, l’arrivée du libéral Glenn Thibeault sur les bancs de Queen’s Park à l’issue d’une élection partielle en 2015 avait déclenché le Sudburygate. Une affaire qui avait fait vaciller le trône de la première ministre, Kathleen Wynne.

Qu’en sera-t-il vraiment pour Lucille Collard et Stephen Blais? La nouvelle élue d’Ottawa-Vanier, jusqu’alors présidente du Conseil des écoles publiques de l’Est de l’Ontario (CEPEO), possède un bagage intéressant sur l’éducation. Dans une atmosphère électrisée par le conflit entre le gouvernement et les enseignants, le Parti libéral devrait mettre en avant Mme Collard sur les dossiers des écoles.

Mais la successeure de Nathalie Des Rosiers a une courbe d’apprentissage. À la différence de ses nouveaux collègues libéraux Amanda Simard et Stephen Blais, anciens conseillers municipaux, Mme Collard commence sa carrière politique à l’échelle provinciale. Une marche d’un coup élevée.

Stephen Blais, le chaud et le froid

Élu du quartier Cumberland à Ottawa depuis 2010, Stephen Blais est, lui, un visage familier de la politique municipale. Dans ce territoire composé d’environ 40 % de francophones – un record parmi les 23 quartiers de la ville d’Ottawa – le nouveau député d’Orléans a établi un lien privilégié avec ses concitoyens. Aux dernières élections municipales, il était même plébiscité avec 89 % des suffrages.

Sur les dossiers francophones, M. Blais a en revanche soufflé le chaud et le froid. Bien que capable de s’exprimer en français, honoré « francophile de l’année » au Gala des prix Bernard Grandmaître en 2014, le nouvel élu d’Orléans n’a jamais pris une position publique en faveur du bilinguisme officiel à la Ville d’Ottawa.

Ironie du sort, c’est devant le manque d’intérêt de la majorité des conseillers municipaux incluant M. Blais, que les libéraux sous l’impulsion de Mme Des Rosiers avaient reconnu le « caractère bilingue d’Ottawa ». La formule légale n’avait qu’enchâsser le statu quo, sans véritables progrès, ni objectifs définis pour améliorer les services bilingues.

Le nouveau député devra aussi se couler dans la discipline d’un parti politique comportant seulement huit députés. « Le luxe d’être dans la position dans laquelle nous nous trouvons, c’est que je n’ai pas besoin d’écouter le chef du parti à Toronto », déclarait M. Blais à CBC peu avant sa victoire. Les choses ne seront pourtant pas si simples…

Élection d’un chef ce samedi

À ce propos, c’est ce samedi que les libéraux choisiront leur nouveau chef. On s’oriente vers le couronnement de l’ancien ministre Steven Del Duca.

Pour la nouvelle famille politique de M. Blais et Mme Collard, cette élection d’un chef marque la reconstruction d’un parti très affaibli. Avec dans le meilleur des cas : conquérir les électeurs déçus du fordisme, et méfiants du Nouveau Parti démocratique (NPD). Dans le moins bon : une longue traversée du désert.

Cette analyse est aussi publiée dans le quotidien Le Droit du 2 mars.