Les entreprises francophones créent plus de richesse que les anglophones

Longtemps attendue par les acteurs franco-ontariens opérant dans la chose économique, l’étude concoctée conjointement par la Fédération des gens d’affaires francophones de l’Ontario (FGA) et l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) vient d’être dévoilée ce mercredi, et ses résultats sont pour le moins surprenants.

Livre blanc de l’économie franco-ontarienne, c’est ainsi que se nomme le rapport présenté par l’AFO et la FGA mettant l’accent sur le rôle enfin quantifié que jouent les entreprises franco-ontariennes dans le tissu économique de la province.

Huit mois étaient nécessaires pour dessiner ce portrait à cause de commandes spéciales et payantes à Statistique Canada pour créer des données qui n’existaient pas auparavant selon les commanditaires de l’étude.

Par ailleurs, cette initiative fait office d’une première du genre. En effet, hormis un profil sommaire dressé par la FGA l’année dernière et quelques chiffres parcellaires et agrégés glanés çà et là, il était quasi-impossible de trouver des données fiables à propos des sociétés franco-ontariennes. Aucune étude, y compris gouvernementale, n’avait vu le jour jusque-là. 

   

Richard Kempler, directeur général de la FGA. Archives ONFR+

« L’idée de base était de savoir le plus précisément et le plus finement possible qu’est-ce que l’économie franco-ontarienne et son poids dans l’économique de la province, notamment sur le plan démographique et sectoriel. Cela va nous permettre d’être crédibles et précis vis-à-vis de nos demandes adressées aux différents paliers du gouvernement pour aider à la croissance et au développement de la communauté des affaires franco-ontariennes », explique Richard Kempler, directeur général de la FGA.

Les entreprises francophones engendrent plus d’emplois et de revenus

Avec 30 150 entreprises francophones, soit 4,3% de l’ensemble des sociétés, l’Ontario compte près de 50% des PME francophones du Canada hors Québec. À titre comparatif, le rapport publié par la FGA en mars 2021 estimait le nombre d’entreprises francophones qu’à 18 875, faute de n’avoir pas inclus les entreprises constituées sous un schéma sans aucun employé.  

Autre fait saillant, la main-d’œuvre bilingue crée quelque 80 milliards de dollars de valeur et participe de la sorte à hauteur de 12% du PIB de la province.

Source : Statistique Canada

Mieux que cela, à en croire ce nouveau document, « la proportion d’entreprises créatrices d’emplois est plus importante chez les francophones que chez les non-francophones. De plus, ces entreprises sont proportionnellement plus nombreuses à générer des revenus supérieurs à 50 000 $ ». Autrement dit, les entreprises francophones créent plus de richesse que leurs homologues anglophones et autres.

Pour le revenu comme pour l’emploi, M Kempler attribue majoritairement ce mérite au biculturalisme.

« C’est fortement lié à l’immigration. Nécessité faisant loi, quand un immigré francophone arrive ici et qu’il monte une société, pour recruter, il va aller chercher des immigrées francophones comme lui, c’est ce qui explique qu’il existe un foisonnement légèrement plus important que les anglophones en termes d’emploi. »

Quant à « l’excédent » en revenu, il préfère citer le philosophe et historien français, Michel Serres : « Quand tu es l’héritier de deux cultures, tu es plus que la somme de deux cultures ». C’est cette capacité d’ouverture d’esprit et cette faculté d’adaptation qui se retrouvent dans les idées et le processus créatif des entrepreneurs francophones d’après le directeur général de la FGA.

Source : livre blanc FGA/AFO

Gare au Nord

Néanmoins, si le nombre d’entreprises francophones a augmenté de 19% en sept ans, soit deux points de plus que les entreprises non francophones, il n’en est pas moins vrai que le Nord accuse un déficit, voire une régression en la matière pour se situer bien en deçà de la moyenne de la région.

« Dans le Nord, il y a un certain vieillissement de la population et on sait qu’on entreprend plus lorsqu’on est jeune. C’est ce qui explique, en grande partie, ce recul de l’entrepreneuriat francophone. Et pourtant, c’est une région qui possède toutes les conditions pour la réussite de telles entreprises, comme l’université francophone, le bassin d’une population dynamique et la présence de matières premières », s’interroge Richard Kempler.  

Toutefois, si cette étude a le mérite de présenter un premier tableau de bord de l’économie franco-ontarienne, elle n’en demeure pas moins non exhaustive. Et pour cause, un point important n’y a pas été abordé, et ce par souci d’une quantification précise, selon ses auteurs. Il s’agit de la digitalisation des sociétés franco-ontariennes dont 60 à 80% ne possèdent pas de solution e-commerce d’après la FGA. Un véritable handicap dans le développement et l’organisation d’une entreprise en cette ère prépandémique.

Au cours de la conférence de presse, Carol Jolin a souligné le fort potentiel de l’économie franco-ontarienne qui peut désormais s’appuyer sur un portrait précis, utile aux prises de décision futures pour la développer.