Les organismes francophones plaident pour une révision de la loi

Carol Jolin, président de l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario (AFO), et Peter Hominuk, directeur général de l'AFO, (de gauche à droite) autour de la table du comité.Crédit image: Benjamin Vachet

OTTAWA – L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), et plusieurs organismes de la francophonie canadienne, ont plaidé pour une refonte de la Loi sur les langues officielles (LLO) devant le comité sénatorial des langues officielles, le lundi 16 avril.

BENJAMIN VACHET
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Selon le président de l’AFO, Carol Jolin, « il est grand temps de la moderniser et de prendre en compte les besoins actuels des communautés de langue officielle en situation minoritaire ».

« Seule une modernisation complète de la Loi sur les langues officielles pourra régler le problème structurel au cœur de presque tous ces ennuis : la mise en œuvre systématiquement défaillante de la Loi », juge M. Jolin.


« Une langue qui n’évolue pas, meurt. Je crois sincèrement qu’il en est de même pour la législation en matière linguistique. » – Carol Jolin, président AFO


L’organisme porte-parole des Franco-Ontariens se range derrière les recommandations de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, notamment en demandant que le Conseil du Trésor devienne responsable de la mise en œuvre de la LLO. Une proposition qui suscite la crainte de la sénatrice franco-manitobaine Raymonde Gagné qui redoute que le dossier soit peu prioritaire pour une institution déjà bien occupée.

« Ça fait longtemps qu’on demande qu’il y ait une agence qui fasse respecter l’application de la Loi sur les langues officielles, car actuellement ça ne fonctionne pas. Le Conseil du Trésor aurait la crédibilité et le pouvoir de bien le faire. Il faudrait simplement lui donner les ressources nécessaires pour qu’il puisse faire ce travail », pense le président de l’AFO.

M. Jolin plaide également pour que le nouveau texte législatif reconnaisse le principe du « par et pour », notamment en consultant davantage les communautés.

« Il est important que les communautés soient non seulement consultées, mais aussi qu’on tienne compte des recommandations qu’elles amènent. Quand on regarde le plan d’action pour les langues officielles, on a eu une bonne écoute et il y a des éléments qu’on avait demandé qui s’y retrouvent, notamment en matière d’investissements directs sur le terrain. Mais en matière de langues officielles, on n’est pas toujours bien consulté… »

Lentille néo-brunswickoise

Les représentants franco-ontariens n’étaient pas les seuls à faire part de leurs doléances auprès des sénateurs en vue d’une révision de la LLO. Du côté de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB), les demandes étaient même beaucoup plus précises.

« C’est un non-sens que la Loi sur les langues officielles ne fasse pas mention des spécificités du Nouveau-Brunswick. Les réalités de la minorité francophone hors Québec sont différentes de celle du Nouveau-Brunswick qui est la seule province officiellement bilingue. La Loi actuellement n’en tient pas compte, ce qui a un impact au niveau du financement, en éducation, en petite enfance ou en immigration, par exemple », explique Joey Couturier, président par intérim de la SANB.

Dans le mémoire remis aux sénateurs, l’organisme porte-parole des Acadiens du Nouveau-Brunswick demande que la nouvelle loi reconnaisse la spécificité de la province, mais également oblige le gouvernement fédéral à n’avoir que des bureaux bilingues à travers la province et non seulement là où il juge que la « demande » est « importante ».

Le dossier de l’immigration est également évoqué par le représentant provincial à la SANB, Simon Ouellette.

« Chez nous, nous avons 32 % de francophones, selon Statistique Canada. Donc, quand le fédéral parle d’une cible en immigration francophone de 4,4 %, c’est un taux assimilateur au Nouveau-Brunswick. On ne peut pas appliquer la même formule pour toutes les provinces. »

La SANB souhaite également que la Loi engage le gouvernement fédéral à favoriser l’exercice des droits et des privilèges égaux des communautés acadienne et anglophone du Nouveau-Brunswick, notamment leur droit aux institutions d’enseignement et aux institutions culturelles distinctes nécessaire pour leur protection et leur promotion.

Coup de barre nécessaire

Les sénateurs étudient la possibilité de moderniser la LLO pour ses 50 ans, en 2019, alors que la dernière modification est intervenue en 2005 et que les derniers changements majeurs datent de 1988.

Pour la directrice générale de la Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse (FANE), Marie-Claude Rioux, il est temps de faire enfin appliquer la Loi.

« Le français comme langue officielle a été négligé par les institutions fédérales, un coup de barre est nécessaire. On ne peut pas s’attendre à ce que les provinces soient fortes quand le fédéral n’est pas fort lui-même. »

L’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA) milite, de son côté, pour qu’une LLO modernisée reflète la nouvelle réalité et les ambitions des communautés francophones en se concentrant sur l’immigration francophone, l’apprentissage du français pour tous, le dénombrement des ayants droit et la révision des pouvoirs du commissaire aux langues officielles du Canada.


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