Les progressistes-conservateurs se préparent déjà pour 2018

Le chef progressiste-conservateur, Patrick Brown, prépare déjà 2018. Archives

OTTAWA – Sur fond d’élections partielles dans les circonscriptions d’Ottawa-Vanier et de Niagara Ouest-Glanbrook, le Parti progressiste-conservateur de l’Ontario (Parti PC de l’Ontario) accélère le rythme des investitures afin de préparer les prochaines élections provinciales de 2018. Au total, ce sont déjà 24 circonscriptions dans lesquelles le Parti PC de l’Ontario compte nommer ses candidats d’ici la fin de l’année.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Le Parti PC de l’Ontario veut surfer sur la vague de sa victoire lors de l’élection partielle dans Scarborough-Rouge River, le 1er septembre, pour attirer de nouveaux candidats susceptibles de renverser le parti de Kathleen Wynne lors des élections provinciales de 2018. Une méthode que le parti applique même dans les bastions libéraux.

C’est notamment le cas dans Glengarry-Prescott-Russell (GPR) où une investiture devrait avoir lieu d’ici la fin du mois de novembre. Fief du Parti libéral de l’Ontario (PLO) depuis 1981, cette circonscription majoritairement francophone est actuellement représentée par Grant Crack depuis 2011.

Après les tentatives de Marilissa Gosselin en 2011, puis de Roxane Villeneuve-Robertson en 2014, plusieurs personnes se sont montrées intéressées à représenter le PC de l’Ontario dans cette circonscriptions de l’Est ontarien, selon la présidente de l’association locale.

« Nous avons déjà un candidat, mais d’autres personnes ont manifesté de l’intérêt. On sent un désir de changement réel dans la circonscription, comme dans toute la province. Les gens sont frustrés contre les libéraux de Kathleen Wynne, notamment sur la question des prix de l’électricité », explique Marilissa Gosselin.

Deux candidats dans GPR

Amanda-Simard_Derek-Duval

Une deuxième candidature s’est ajoutée à celle de Derek Duval, qui avait exprimé son intention cet été. Pressentie depuis plusieurs mois, la conseillère municipale de la municipalité de Russell, Amanda Simard, a officialisé sa candidature à l’investiture, le mercredi 19 octobre.

« Tout comme de nombreux résidents, je suis préoccupée par la direction prise par la province sous le gouvernement actuel. Les taux inabordables d’électricité, les coupures dans le milieu de la santé et de l’éducation ainsi que la mauvaise gestion économique font partie de l’héritage libéral de l’Ontario, et ces choses sont tout simplement inacceptables. L’Ontario est le gouvernement le plus endetté au monde, et nous devons changer la direction actuelle pour en assurer la prospérité future », déclare-t-elle dans un communiqué.

La jeune franco-ontarienne de 27 ans a été élue conseillère municipale pour la première fois en 2014, totalisant le plus de voix de tous les candidats.

https://twitter.com/DrkDuval/status/745417016589246464

Son seul adversaire à ce jour, Derek Duval, 33 ans, n’est pas non plus totalement étranger à la politique puisque son père, Paul-Émile Duval, est conseiller municipal du canton de Champlain.

Dans un échange de courriels avec #ONfr, M. Duval indique vouloir se concentrer à vendre des adhésions en vue de la prochaine course à l’investiture progressiste-conservatrice dans GPR, mais détaille tout de même les raisons de sa première tentative politique.

« Ça fait des années que je travaille comme bénévole pour le parti. J’ai voulu me présenter parce que je crois que nous avons besoin de quelqu’un qui peut résoudre les problèmes que nous avons comme Ontariens. Nous avons besoin de quelqu’un qui va représenter Glengarry-Prescott-Russell à Toronto et non de quelqu’un qui représente Toronto à Glengarry-Prescott-Russell. Il faut quelqu’un qui comprenne les problèmes ruraux. »

Chances réelles

Les deux candidats espèrent suivre les traces du progressiste-conservateur Joseph Albert Bélanger qui fut le député de l’ancienne circonscription de Prescott et Russell de 1967 à 1981 (la circonscription est devenue Glengarry-Prescott-Russell lors des élections de 1999).

En 2014, le Parti PC de l’Ontario avait obtenu 32% des suffrages, contre 51,5% pour le candidat libéral.

Pour le chercheur postdoctoral à la Chaire de recherche sur la francophonie et les politiques publiques de l’Université d’Ottawa, Martin Normand, les chances du Parti PC de l’Ontario sont réelles dans la circonscription.

« En élisant rapidement un candidat, le Parti progressiste-conservateur se donne l’occasion de le faire connaître. Cela permet aussi à ce dernier de bien intégrer le message du parti pour pouvoir mieux le véhiculer. Dans Glengarry-Prescott-Russell, les prix de l’électricité sont un réel enjeu et il semble y avoir une grogne propice au changement. Il ne faut pas oublier non plus qu’au niveau fédéral, la circonscription a été conservatrice pendant dix ans. »

Le pourcentage de quelque 60% de francophones dans la circonscription ne plaide pas non plus nécessairement en faveur des libéraux, ajoute le chercheur.

« Il faut que le candidat soit bilingue, c’est sûr. Préférablement francophone, même. Mais il suffit de regarder dans le nord de la province pour voir qu’il est faux de penser que les francophones votent toujours libéral. »

Raisons officielles et officieuses

L’empressement des progressistes-conservateurs dans GPR, comme dans les 23 autres circonscriptions déjà en préparation pour une course à l’investiture, s’explique de plusieurs façons, selon M. Normand.

Tableau PC de l'Ontario

« On se souviendra qu’au niveau fédéral, le Parti libéral du Canada avait adopté la même stratégie de nommer assez rapidement ses candidats, après l’élection de Justin Trudeau à la chefferie du parti. Ça leur a plutôt bien réussi. Pour un parti, cela permet de prendre du temps pour reconstruire son image, d’établir de nouvelles orientations et de faire du travail de terrain. C’est sans doute ce que souhaite faire le Parti progressiste-conservateur qui, de plus, est encouragé par les sondages qui lui sont favorables et la baisse du taux de satisfaction des Ontariens envers Mme Wynne et son gouvernement. »

La directrice des communications de Patrick Brown, Tamara Macgregor, confirme la stratégie du parti.

« Nous avons beaucoup de candidats qui sont intéressés à rejoindre notre équipe et nous voulons nous tenir prêts pour la bataille et pour notre victoire en 2018. »

En coulisses, il se murmure toutefois que les nouvelles règles de financement des partis politiques, qui entreront en vigueur le 1er janvier prochain, ne sont pas totalement étrangères à la volonté du Parti PC de l’Ontario d’investir le plus de candidats possibles, le plus rapidement. Les nouvelles règles de financement des partis prévoient, entre autres, de bannir les dons faits aux partis politiques par les syndicats, les compagnies et les groupes d’intérêts.

Le Parti PC de l’Ontario voudrait donc profiter des dernières semaines de 2016 pour pouvoir renflouer ses caisses, notamment via des dons d’entreprises, en vue des prochaines élections.