L’immigration francophone au cœur du rapport de Boileau

Le commissaire aux services en français de l'Ontario, François Boileau. Crédit image: Patrick Imbeau

TORONTO – Le rapport 2017 de François Boileau ciblait les dix dernières années, le document de 2018 fait quant à lui des projections pour les dix prochaines. Le onzième rapport annuel du commissaire aux services en français de l’Ontario, dévoilé ce mercredi, se projette en 2028 pour mieux convaincre de l’urgence de l’immigration francophone.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

Plus volumineux que les années précédentes [113 pages], le document insiste sur la situation alarmante de l’immigration francophone. « Pour l’ensemble des scénarios présentés, la proportion de francophones en Ontario diminuerait pour s’établir entre 3,9 % et 4,0 %. Ceci représente une diminution du poids des francophones des 4,8 % en 2011 à 4,7 % en 2016. »

En guise de méthode de travail, le CSF se base sur la Définition inclusive de l’Ontario. On sait que les chiffres de Statistique Canada, publiés en 2016 et centrés sur la première langue officielle parlée, évoquaient une proportion de 4,1 % de Franco-Ontariens contre 4,3 % en 2011, et 4,5 % en 2006.

« Il est écrit dans la Loi sur les services en français (LSF) que l’Assemblée législative reconnaît l’apport du patrimoine culturel de la population francophone et désire le sauvegarder pour les générations à venir », soutient Me Boileau en entrevue à #ONfr. « Cela est vrai, encore faut-il qu’il y ait des francophones pour les années à venir. Par ce rapport, je privilégie donc pas seulement une approche légiste de la LSF, mais aussi une approche plus holistique. »

Des 14 recommandations dressées par le commissaire, sept concernent directement l’immigration francophone dans la province. Un chiffre se situant entre 2 et 2,5 %, bien que la province se soit dotée d’une cible de 5 % d’immigration francophone en 2012.

Parmi elles : que le gouvernement se penche « sur la problématique de la baisse anticipée de la proportion de la population francophone en Ontario et détermine des stratégies d’action », que soit renommé « Destination Ontario » en « Destination Ontario français » ou encore, l’augmentation du nombre de candidats que la province peut désigner dans le cadre du Programme ontarien des candidats à l’immigration.

Sur ce dernier point, le chien de garde aux services en français se montre pour le moins illustratif. « L’immigration est comme un tango. C’est une danse à deux. On sait que c’est le fédéral qui a le lead, mais le provincial doit davantage participer. Seulement 6 600 immigrants sont choisis par le gouvernement provincial. Et même dans ce chiffre, le gouvernement n’atteint pas la cible de 5 %. »

Le commissaire espère toujours un « un plan ambitieux » du gouvernement ontarien pour la croissance démographique, citant du même coup le Plan d’action fédéral sur les langues officielles. « Un peu comme le Plan Dion, il pourrait y avoir le Plan Mulroney. »

En après-midi, l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) a fait part de sa satisfaction. « Nous appuyons ces 14 recommandations qui rejoignent celles de l’AFO, énoncées entre autres dans nos livres blancs. Nous espérons que le nouveau gouvernement mettra en place rapidement des stratégies pour que notre communauté s’épanouisse. Il faut agir maintenant et rendre notre communauté plus forte », a déclaré le président, Carol Jolin.

Même sentiment du côté de la porte-parole néo-démocrate aux Affaires francophones France Gélinas par voie de communiqué. « Le rapport présenté l’année dernière par le CSF faisait état des réussites et des défis que les Franco-Ontariens ont connus dans la décennie ayant suivi la création du CSF. Le rapport de cette année indique les mesures que la province doit mettre en œuvre afin que notre culture franco-ontarienne continue de fleurir. »

Légère augmentation du nombre de plaintes

Au cours de l’exercice financier 2017-2018, le CSF a reçu un total de 315 plaintes et demandes de renseignements. Il s’agit ici d’une petite augmentation par rapport à l’an passé où 301 doléances s’étaient retrouvées sur le bureau du commissaire.

Du nombre, 186 plaintes (59 %) ont été jugées recevables. Comme en 2016-2017, les ministères les plus visés ont été ceux de la Santé et des Soins de longue durée ainsi que du Procureur général. Les services en personne (36 %) restent le type de services le plus exposé aux plaintes.

« On doit absolument être informé. Si les gens ne nous informent pas, on ne peut pas être au courant. »

Première rencontre « excellente » avec Caroline Mulroney

À peine le changement de gouvernement opéré à Queen’s Park, François Boileau n’a pas perdu de temps. Il a déjà rencontré la nouvelle ministre déléguée aux Affaires francophones, Caroline Mulroney. « Nous avons eu une excellente discussion. C’est une ministre qui est à ses affaires. Elle prenait beaucoup de notes lorsque je lui parlais. »

La refonte de la LSF, l’un des points majeurs du rapport du Commissariat en 2016, a d’ailleurs été soulignée au cours de la rencontre. « Elle n’a pas pris position, mais je ne vois pas non plus d’obstacles politiques. Ça sera au gouvernement de faire un choix. »