L’urgence de moderniser la gestion des déchets

Les commerces, les industries et les institutions de l’Ontario produiraient trop de déchets et ne recycleraient pas assez. Archives #ONfr

[ANALYSE]

TORONTO – Des solutions toujours archaïques pour un problème du 21e siècle. La gestion des déchets du gouvernement ontarien continue de mécontenter. À commencer par la commissaire à l’environnement, Dianne Saxe, qui a profité du dépôt de son rapport, la semaine dernière, pour tirer la sonnette d’alarme. Encore.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

Ce n’est pas la première fois que le chien de garde en matière d’envionnement tape du poing sur la table. Son prédécesseur Gord Miller était coutumier du fait. Sauf que cette sortie intervient un an après le vote par le gouvernement d’une Loi pour un Ontario sans déchets.

Si le texte est une bonne chose pour Mme Saxe, il faut tout de même aller plus loin dans le long terme : interdire par exemple les matières compostables des sites d’enfouissement. Pour l’instant, les 12 millions de tonnes de déchets produites par l’Ontario sont encore beaucoup trop pour la commissaire. Surtout lorsque 6 millions partent vers les sites d’enfouissement.

Difficile d’être contre la vertu. La province devrait davantage serrer la vis aux commerces,  industries et institutions de l’Ontario pour qu’elles produisent moins de déchets.

Ces trois secteurs, dont la compétence est pourtant entièrement provinciale, voient 25 % de leurs déchets être conduits au recyclage, là où la proportion atteint 66 % pour les déchets résidentiels, de compétence municipale.

Malgré le premier pas avec la loi de 2016, les mesures ne suffisent pas encore. Il faudrait selon les spécialistes mettre à jour l’inventaire des sites d’enfouissement. Un travail qui n’aurait pas été fait depuis des lustres.

Quant aux municipalités, des créatures provinciales, les solutions diffèrent pour le traitement des déchets. L’uniformisation des procédés manque encore, sans que la province n’intervienne. Pour certains, l’Ontario aurait tout à gagner à imposer des objectifs de compostage. Au Québec, les cibles provinciales sont par exemple de 70 % pour le recyclage et de 60 % pour le compostage.

Le fiasco de l’entreprise Plasco à Ottawa

Sur le terrain, par exemple à la Ville d’Ottawa, la spécialisation dans la gazéification des déchets était sur le point d’aboutir. Mais l’entreprise Plasco n’avait finalement pas pu livrer la marchandise à la municipalité, faute d’argent. L’affaire aurait peut-être été différente en cas d’un engagement financier de la province.

Faut-il pour autant jeter la pierre sur le gouvernement? L’équation n’est en réalité pas si simple pour les différentes couleurs politiques se succédant à Queen’s Park. L’Ontario n’est en effet pas la Nouvelle-Écosse, citée en exemple par la commissaire pour avoir interdit les déchets compostables des dépotoirs il y a 20 ans.

La grandeur du territoire rend toujours délicate l’uniformatisation des pratiques. Sans compter qu’imposer des directives aux municipalités, soient-elles les plus nobles, comme la mise en place du compost, a parfois un coût drastique dans les grandes villes.

Un enjeu encore trop secondaire

On pourrait en déduire que tout n’est question que de volonté politique. Et pour beaucoup d’électeurs, l’environnement reste secondaire en comparaison des enjeux comme l’éducation, la santé ou encore l’infrastructure. Pas de quoi donc pour libéraux sortir les grands slogans écologistes.

Lors de passage au ministère de l’Environnement, Glen Murray avait par exemple clairement préféré faire de l’action contre le changement climatique sa marotte.

En privilégiant toujours l’enfouissement comme solution, le gouvernement Wynne ne répond pas totalement au défi. Au risque que cette urgence devienne à long terme un gros problème.

Cette analyse est aussi publiée dans le quotidien Le Droit du 10 octobre.