Contrôle vestimentaire qui tourne au cauchemar dans une école : vives réactions

OTTAWA – 24 heures après une manifestation d’élèves devant l’École secondaire catholique Béatrice-Desloges à Orléans contre le code vestimentaire de l’établissement, les réactions de soutien aux élèves continuent d’affluer, y compris sur le terrain politique, en pleine campagne électorale provinciale. De son côté le Conseil des écoles catholiques du Centre-Est (CECCE) a présenté ses excuses dans un communiqué, ce samedi.

Sur Twitter, plusieurs politiques ont apporté leurs soutiens aux élèves et notamment aux adolescentes, qui auraient été la cible d’humiliations jeudi lors d’une vérification vestimentaire menée par l’établissement scolaire. 

« Les jeunes filles méritent respect, peu importe ce qu’elles portent. Pas de jugement. Pas d’humiliation. Plus jamais », indiquait la cheffe NPD Andrea Horwath sur son Twitter.

Stephen Blais, candidat sortant libéral à Orléans, dit être en contact avec Dan Boudria. Ce vice-président du CECCE indique vouloir participer au dialogue pour réviser le code vestimentaire.

Michelle Petersen, candidate du Parti vert dans la même circonscription, rappelle en entrevue que « nous sommes le mois de mai, qui est le mois de la sensibilisation aux agressions sexuelles ». La candidate s’est indignée à son tour sur les réseaux sociaux, apportant son soutien aux porteuses et porteurs de shorts « trop courts ».

Un exercice qui tourne mal

Jeudi dernier, la direction de l’École secondaire catholique Béatrice-Desloges a décidé de contrôler le respect des règles du code de vie, dont le code vestimentaire.

La manière employée a été contestée par une majorité d’élèves et de parents. Selon de nombreux témoignages vidéo et sur les réseaux sociaux, les élèves ont témoigné que des camarades de classe étaient amenées au bureau du directeur afin qu’on mesure la longueur de leur short, parfois devant des hommes et des femmes employées de l’école.

« Les filles ont dû se pencher et toucher leurs orteils afin de voir si les shorts et jupes étaient trop courts, afin de constater si leurs sous-vêtements étaient visibles. Ils ont même pris des règles pour mesurer et les ont touchés sur les cuisses pour leur montrer que, ce qu’elles portaient n’était pas correct », relate une élève au micro d’ONFR+.

Certains témoignages sur les réseaux sociaux indiquaient par ailleurs que ces vérifications avaient été parfois effectuées devant une classe entière. Selon cet élève de 9e année, « le personnel a même discriminé les plus rondes, car les shorts paraissaient plus courts sur leur corps et c’était une distraction pour les garçons, d’après la hiérarchie ».

Les élèves ne veulent pas d’arrêter là. Il manifesteront mardi. Pour eux, cette humiliation, ces remarques n’ont pas leur place en 2022. « Il fait chaud et on ne s’habille pas de même pour distraire les garçons », rajoute cette même adolescente. « On m’a demandé de mettre mon manteau parce que ma poitrine est trop grosse, mais je n’y peux rien, moi. C’est mon corps », déplore-t-elle.

« Ils ont aussi envoyé des élèves à leur maison pour se changer. Certains ont dû marcher une
heure en plein soleil, jeudi. C’était la journée la plus chaude. Ils ont gardé les téléphones des
élèves comme monnaie d’échange pour être sûr qu’elles reviennent en classe. »

D’après elle, plus de 60 élèves se sont fait rappeler à l’ordre et ont dû trouver un moyen
pour se changer. Aucun des garçons qui portaient des shorts n’a été interpellé par l’école.

Intervention musclée de la police

Vers 11h30, le service de police d’Ottawa a été appelé vraisemblablement pour trouble à l’ordre public devant l’école. Une centaine d’élèves garçons et filles brandissaient des pancartes. Cependant une personne d’une école voisine de Béatrice-Desloges a été arrêtée pour intrusion. Une vidéo circule sur les réseaux sociaux montrant un jeune homme sévèrement plaqué sur une voiture de police.  

« Il était sur le trottoir d’en face, qui appartient à la ville d’Ottawa, donc il n’y a pas eu intrusion », estime Cloé, une élève témoin de la scène. « C’est de l’abus, car des étudiants étaient juste là pour nous soutenir. »

La conseillère municipale Catherine Kitts s’est même demandé le véritable intérêt d’une intervention de la police via une publication sur Twitter. Pour Josée, la mère de Cloé, « c’est ma décision, en tant que parent, de dire à ma fille de se changer ou non, ou si sa façon de s’habiller est correcte ».

Premières conclusions d’une enquête interne

Le CECCE affirme prendre cette situation « très au sérieux ». Dans un communiqué diffusé ce samedi, la direction explique avoir dépêché vendredi deux cadres pour « faire la lumière » et entendre des élèves. Dans leurs conclusion préliminaires, ils confirment qu’une vérification de l’habillement a été faite mais qu’aucun élève n’aurait été prié de se pencher.

« Aucun élève n’a été assujetti à une mesure par une règle ou autre, comme le décrivent certaines versions des événements qui circulent en ligne », poursuivent les rapporteurs, reconnaissant que « bon nombre d’élèves se sont sentis dégradés et humiliés ». Et d’ajouter : « Cette stratégie de vérification du code vestimentaire n’est pas encouragée par le CECCE et n’est pas acceptable. »

L’administration du CECCE présente, dans ce même communiqué, ses excuses auprès des élèves et de leurs familles. « Des suivis sont en cours auprès de l’ensemble des écoles du conseil scolaire afin de s’assurer qu’une telle situation ne se reproduise plus. »