Pas toujours facile de savoir où sont les services bilingues

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OTTAWA – Avoir la liste des aéroports désignés bilingues au Canada n’a pas été une mince affaire pour #ONfr. Dès lors, comment inciter les francophones à demander leurs services dans leur langue maternelle quand ils ne savent même pas où ils sont en droit de le faire?

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Il aura fallu quatre échanges de courriels avec le Secrétariat du Conseil du Trésor et trois différentes listes pour parvenir à obtenir une version à jour des aéroports où les Canadiens peuvent demander à recevoir des services en français et en anglais.

Une liste de 19 aéroports qui n’est pas tout à fait celle que l’on retrouve sur le site internet du Commissariat aux langues officielles (CLO) consacré aux droits linguistiques dans les aéroports. Sur cette dernière liste, dont on précise qu’elle « n’est pas exhaustive », l’aéroport Mirabel, à Montréal, est désigné bilingue, mais Churchill, au Manitoba, ne s’y retrouve pas, contrairement à ce qu’indique le Secrétariat du Conseil du Trésor à #ONfr.

La question avait-elle été mal posée? La situation ne surprend pas Gaël Corbineau, directeur général de la Fédération des francophones de Terre-Neuve-et-Labrador (FFTNL).

« Les listes ne sont pas mises à jour et il est difficile pour monsieur et madame Tout-le-monde de savoir quel bureau est bilingue ou non. »

Un outil méconnu et critiqué

Un outil existe pourtant, qui devrait permettre aux citoyens de savoir où trouver leurs services bilingues, rappelle M. Corbineau. L’outil fédéral Burolis est une base de données du gouvernement fédéral qui regroupe les bureaux des institutions qui doivent fournir des services dans les deux langues officielles. L’outil est toutefois méconnu du grand public et pas toujours à jour.

À plusieurs occasions, le commissaire aux langues officielles lui-même en a fait le constat. En 2015, Graham Fraser remarquait dans sa Vérification de la prestation des services bilingues aux voyageurs par l’Agence des services frontaliers du Canada aux postes d’entrée aux aéroports et aux frontières terrestres que la liste des bureaux désignés de Burolis n’était pas complète. Les aéroports de Kelowna, en Colombie-Britannique et de Saskatoon et Régina, en Saskatchewan, qui auraient dû être désignés bilingues, n’y figuraient pas, alors que sur le terrain, on ne trouvait pas de services de qualité égale dans les deux langues officielles.

En 2016, dans son Rapport de vérification de la prestation des services bilingues aux visiteurs à Parcs Canada, le commissaire remarquait des irrégularités dans le cas des services bilingues. Au total, 180 sites étaient inscrits dans Burolis, alors que Parcs Canada en dénombrait 223 sur son site internet.

La FFTNL avait signalé ce type de problème au CLO et formulé des plaintes.

« Mais nous n’avons pas vraiment vu d’amélioration », regrette M. Corbineau.

Joint par #ONfr, le CLO n’a pas donné suite à nos demandes d’entrevue.

Des bureaux bilingues sans le savoir

La FFTNL s’est penchée pendant plusieurs années sur ce problème récurrent en enquêtant dans les bureaux fédéraux où les services en français devaient être accessibles.

« On faisait le tour des bureaux des services fédéraux qui devaient offrir des services bilingues selon la liste du gouvernement fédéral, sur Burolis. Certains ne le savaient même pas quand on allait les voir! »

Comment alors demander aux francophones d’utiliser les services en français quand les bureaux fédéraux eux-mêmes ne savent pas qu’ils doivent le faire?

Promouvoir les services bilingues

L’ancien président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), Denis Vaillancourt, avait l’habitude d’encourager les Franco-Ontariens à adopter « le réflexe franco » en demandant leurs services dans leur langue maternelle, pour bien en prouver l’utilité.

Le président de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, Jean Johnson, ne déroge pas à cette idée, mais met également le gouvernement fédéral en face de ses responsabilités.

« C’est la responsabilité des francophones de demander leurs services en français, mais c’est aussi celle du gouvernement fédéral de donner la bonne information. Ça doit être plus proactif que le simple « Hello/Bonjour! ». Les services et les droits linguistiques ne sont pas bien publicisés, il faut les promouvoir davantage, faire des campagnes publicitaires… »

Un citoyen ontarien, Mathieu Otis, s’est étonné de la liste des aéroports fournie à #ONfr qui prouve, selon lui, que les critères ne sont pas clairs. Et outre ce manque d’information, il regrette l’absence de services de qualité quand on est en droit de les exiger.

« C’est sûr qu’il faut mieux informer les gens sur leurs droits linguistiques, mais il faut aussi que les services soient là quand ils devraient l’être et accessibles. Trop souvent, on nous fait sentir qu’on dérange quand on demande des services en français, si bien qu’on se tanne. De bons services bilingues, ça devrait être la norme! »