Lorsqu’il ne se consacre pas à l’écriture de son roman sur une invasion de mousses de nombril, Jean-Philippe Bélanger entretient sa fascination pour les mots du dictionnaire. Depuis qu’il est gamin, il s’endort en rêvant que les mots qu’il a lui-même inventés feraient un jour leur entrée dans le dictionnaire Larousse. On lui a toujours répété de poursuivre ses rêves les plus fous, mais y’a-t-il une recette spéciale à suivre si on veut inventer des mots de façon officielle ? C’est ce que Jean-Philippe vous fera découvrir dans cet épisode.
Avec Maxime Roy, Louis-Dominic Bertrand et Antoine Racicot, Thierry Boulanger, Fabien Deglise et Francis Pedneault.
Extraits audio additionnels :
Dominick Menard, EP07 | Vivre en van l’hiver au Québec – Mes 7 conseils, https://www.youtube.com/watch?v=lPTp7TqOi2c
Alex & MJ On the Go, Notre VANLIFE Tour ! (VanLife Mtl) | Jour 124 de 365, https://www.youtube.com/watch?v=2kSl9dSmW2c&t=6s
JVCOm, THE MESSENGER : Une pépite qui cache bien son jeu ! | TEST, https://www.youtube.com/watch?v=mAXLF5s5BUM
Linguisticae, La VÉRITÉ sur l’Académie française, https://www.youtube.com/watch?v=hfUsGmcr1PI
Ma vie en van, Pourquoi le Québec fait-il la guerre aux vans ? | LE SHOW NOMADE #1 https://www.youtube.com/watch?v=dxsIAhyShag
Transcription Audio
PRÉSENTATEUR :
J’en perds mes mots, un balado d’ONFR+.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
S’adressant au public de l’émission
En 2020, le dictionnaire Larousse a ajouté 150 nouveaux mots comme « ubériser », « écocitoyen » et « post-vérité ». Ouin, « post-vérité », ça, c’est le concept selon lequel on serait entrés dans une période où l’opinion personnelle, l’idéologie, l’émotion, la croyance, l’emportent sur les faits. Je le sais pas pour vous, mais moi, j’ai bien hâte que le mot « post-post-vérité » entre dans le Larousse.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP pousse un petit rire.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Vous êtes-vous déjà demandé comment les nouveaux mots sont créés ? Mon collègue Jean-Philippe Bélanger, oui. Jean-Philippe, c’est le genre de gars hyper curieux. Surtout pour les trucs un peu bizarres. Des phénomènes paranormaux aux théories du complot. N’importe qui m’aurait avoué avoir une fascination, voire une obsession pour le dictionnaire, j’aurais été surpris. Sauf pour JP. Je m’appelle Aimé Majeau Beauchamp, et aujourd’hui…
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Jean-Philippe Bélanger…
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
… vous raconte son histoire, mais aussi celle de la vérité derrière la création des mots. Ou devrais-je dire la post-vérité.
Des signaux sonores se font entendre et un extrait de conversation se fait entendre.
FEMME :
Tabarnouche !
ENFANT :
Un ordinateur !
FEMME :
T’es gâté, t’es gâté.
L’extrait prend fin.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
S’adressant au public de l’émission
On l’avait-tu, la belle vie, quand on était enfant ? Pensez-y : on avait des petites autos de course, des pogs, des Tamagotchis, des Pokémons, des Lego, des tortues ninja, des jeux vidéos. Mais étonnamment, moi, quand j’étais jeune, mon activité préférée, c’était rien de tout ça. Non. Moi, quand j’étais jeune, ce qui me faisait vraiment triper, c’était la lecture. Puis, c’était quoi le livre préféré d’un garçon de 10 ans ? « Harry Potter » ? « Chair de poule » ? Les livres de « La courte échelle » ? Non. Moi, mon livre préféré dans tous ceux qu’il y avait dans ma bibliothèque, c’était le Larousse 95. Maintenant que j’y repense, c’est fou, hein, à 10 ans, passer son samedi à lire le dictionnaire. Mais tu sais, c’est pas quelque chose que je cachais non plus. Pour moi, c’était normal. Il y avait juste quelque chose dans les mots : leur ordre, leurs agencements, leurs sonorités qui me fascinaient. Encore plus que leurs définitions. Par exemple, pourquoi les mots qui commencent par « X » sont aussi rares ? C’est quoi les mots les plus longs ? Combien d’animaux ont un nom qui commence par « Q » ? Hum… Je me souviens du Quetzal en tout cas… Pour moi, le dictionnaire, c’était le monde en condensé puis ça me faisait rêver. Même qu’une fois, pour me chicaner de je ne sais plus trop quoi, mon père avait fait semblant de jeter mon dictionnaire aux poubelles. Mon petit coeur d’enfant s’était brisé. Tu sais, quand tes parents te chicanent en t’enlevant un dictionnaire, c’est que je devais avoir fait quelque chose de vraiment pas correct.
Des enfants lisent des mots.
ENFANTS :
Poule. Poule. Poulailler. Poule…
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Mais c’est pas vraiment toute l’histoire. Entre vous et moi, il y a une autre raison pourquoi j’aimais autant lire le dictionnaire. C’est que j’ai un problème sensoriel qui me rend extrêmement sensible à certains bruits comme si quelqu’un grattait mon cerveau avec une fourchette et que j’arrivais pas à décrocher.
Des bruits stridents se font entendre.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
À l’époque où je suis tombé amoureux des mots, le problème avait commencé à se manifester de manière plus violente. Les pages du dictionnaire me servaient d’échappatoire. Le fait que tout y soit si bien organisé, ça me permettait de me « réancrer » dans le moment présent. En d’autres mots, ça m’offrait un semblant de stabilité.
Une annonce dans l’interphone d’une école se fait entendre.
HOMME :
Bonjour, les élèves, ici le directeur Champoux qui vous accueille pour une nouvelle année scolaire.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Rendu au secondaire, j’étais rendu pas mal plus tannant, disons. Tellement que j’avais été renvoyé de l’école dès ma première année. Pour me punir, mes parents m’ont fait passer un été complet dans ma chambre. Sans jeux, sans livres, sauf une exception : j’avais le droit de garder mon dictionnaire. Fait que j’ai décidé de lire la préface, puis je suis tombé sur une section qui décrivait les nouveaux mots ajoutés dans l’édition de l’année. Nouveaux mots ? Ah oui ? Comment ça, nouveaux mots ? C’est là que j’ai commencé à comprendre que la langue française, elle est pas figée.
Des conversations indistinctes se font entendre.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
S’adressant au public de l’émission
Plus tard au cégep, j’ai eu un prof qui était un peu plus… original. Genre de gars un peu sauté, à la limite du hippie, qui s’amusait à déconstruire la langue. Une fois, il m’a invité à une session de slam. Moi, j’avais préparé un beau petit texte bien cousu avec des belles rimes. Puis lui, il nous avait sorti un texte qui partait dans toutes les directions avec des mots inventés.
Des conversations indistinctes se font entendre, puis un bruit de micro. Un homme se met à parler en disant des mots inventés.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
S’adressant au public de l’émission
Puis là, je me suis dit…
Un grincement de vinyle se fait entendre.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Quel énergumène ! Regarde-le qui utilise des mots qui existent pas. Il s’est vraiment pas forcé. Oui, bien, vous savez quoi ? C’est lui qui a gagné la session de slam.
AIMÉ discute avec JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Bonjour, JP, et bienvenue à « J’en perds mes mots ».
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Bien, bonjour, Aimé. Bienvenue dans mon épisode.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Riant
Merci. Je t’écoute parler puis, tu sais, tu nous parles de ton enfance, de l’adolescence, du dictionnaire, mais j’ai l’impression que cette soirée de slam là, elle t’a marqué d’une manière particulière.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Oui, en fait, c’est à partir de ce moment-là que j’ai commencé à m’intéresser à la création de mots. Mais tu sais, Aimé, je savais pas trop comment m’y prendre. Fait que c’est pour ça qu’à travers ce balado, je me suis demandé : en fait, est-ce qu’il y a une recette spéciale pour créer des mots ?
De courtes interventions de différentes personnes se succèdent.
HOMME 1 :
Les mots servent à comprendre le monde autour de nous.
HOMME 2 :
Le français, il appartient à ceux qui le parlent.
HOMME 3 :
On est passionnés. On veut trouver le meilleur mot possible pour qu’il soit adopté.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
S’adressant au public de l’émission
Quand je pense aux mots, je pense immédiatement à l’Office québécois de la langue française, ou l’OQLF pour faire plus court.
HOMME 4 :
… la baisse des budgets de l’OQLF…
HOMME 5 :
On est ici devant les bureaux de l’OQLF où des annonces…
HOMME 6 :
… par le personnel compétent de l’Office québécois de la langue française.
HOMME 7 :
« Le » COVID ou « la » COVID, l’Office québécois de la langue française a tranché.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
L’OQLF, c’est un des bébés du mouvement souverainiste des années 60. À l’époque, on cherchait à franciser les milieux de travail qui étaient encore majoritairement en anglais. L’Office devait s’assurer que la vie commune se déroule en français. Aujourd’hui, l’OQLF est responsable de la politique linguistique au Québec. J’ai souvent pensé que c’était eux qui, comment dire, qui avaient le mot final. Parce qu’on entend souvent dans les médias que l’OQLF a créé tel ou tel mot. Je suis donc allé rencontrer Francis Pedneault, un coordonnateur linguistique de l’OQLF. Pour faire bref, c’est quelqu’un qui supervise la création de mots.
Une musique amusante se met à jouer.
VOIX DÉFORMÉES :
Chantant
♪ Hé ho hé ho ♪
♪ Nous on fabrique des mots ♪
♪ Hé ho hé ho ♪
♪ Nous on fabrique des mots ♪
♪ On fabrique des mots ♪
FRANCIS PEDNEAULT s’exprime en entrevue.
FRANCIS PEDNEAULT :
Les aspects à prioriser, c’est vraiment de s’attarder au sens des mots pour que ces termes français là, ces néologismes s’implantent. Il faut pas oublier que ces termes-là doivent être courts, doivent être transparents. Ils doivent permettre de bien comprendre rapidement la réalité qui est dénommée. En gros, dans le fond, qui crée le nouveau mot ? Ça peut venir du grand public, ça peut venir des entreprises, ça peut même venir des médias. Tout le monde est habilité à créer des nouveaux mots. Nous, à l’Office, on est 25 conseillers, conseillères linguistiques qui reçoivent différentes demandes pour la création de nouveaux mots et pour valider également des termes créés par les entreprises, par les médias, par l’administration, par le grand public.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
À vrai dire, ça me soulage d’entendre que les suggestions de nouveaux mots proviennent pas juste des spécialistes. À mon avis, ça rend le processus un peu plus démocratique.
JEAN-PHILIPPE s’adresse à FRANCIS PEDNEAULT.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Donc, demain, moi, si j’invente un mot, je peux te l’amener ?
FRANCIS PEDNEAULT rit.
FRANCIS PEDNEAULT :
Vous pouvez nous écrire. Vous pouvez nous écrire puis on va vous répondre à la mesure de votre question, de votre demande ou de votre suggestion, effectivement. Il y a un seul contact, c’est courriel gdt@oqlf.gouv.qc.ca.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Je me demande quelles personnes soumettent leur création à des institutions comme l’OQLF. J’imagine que Roland au fond de la rue, qui a inventé le « sous-marin-poutine-pizza » va pas aller soumettre ça. En cherchant des créateurs de mots qui font ça pour le plaisir, je suis tombé sur le site web « Le Mot pour la frime ». Ça, de ce que j’en ai compris, c’est un projet collaboratif de création de mots ouvert au public.
AIMÉ discute avec JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
JP, je suis curieux de savoir quel genre de mots on retrouve sur une plateforme qui est ouverte au public. J’imagine que ça doit être assez différent de ce qu’on retrouve sur l’OQLF par exemple.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Dans ce cas-là, c’est vraiment des mots inventés pour le fun. C’est pas des mots qui ont pour objectif principal d’être couramment utilisés, là. Comme par exemple, il y a « ordinosaure », un vieil ordinateur, ou encore « rêvaliseur », qui est un réalisateur de rêve.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Ah, j’aime ça.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Ou même « bonbombardier », un bonbon en forme d’avion.
Un vrombissement d’avion se fait entendre.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Maxime Roy, l’instigateur du projet, c’est un grand passionné de français qui crée des mots par plaisir. Je voulais comprendre sa démarche, c’est pour ça que je l’ai contacté en France. Il a commencé par m’expliquer pourquoi il a démarré le projet.
MAXIME ROY s’exprime en entrevue.
MAXIME ROY :
J’ai eu l’idée comme ça de proposer un site Internet sur lequel on découvrirait chaque jour un mot un peu inconnu, oublié du dictionnaire. Petit à petit comme ça, je constituais une réserve de mots que j’appelais un peu du vocabulaire à frime, puis après, il y a des gens qui ont commencé à faire des suggestions sur le site. Le but, c’était de s’amuser, de mettre dans les mains de tout le monde le pouvoir de créer des mots. Plus il y aura de gens qui s’approprieront la langue, qui la maîtriseront, plus on aura de façons de s’exprimer, plus on pourra dire des choses complexes, des choses précises.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Tu te souviens du premier mot que t’as créé ?
MAXIME ROY :
Le premier mot que j’ai dû créer, j’étais au collège, je crois que c’était par rapport à un ami. J’avais un copain qui était amoureux d’une fille et il était tellement amoureux, il se comportait de façon inattendue. Plutôt que d’essayer de sortir avec cette fille ou de l’embrasser ou d’être amoureux tous les deux, bien, il était tellement amoureux, qu’en fait, il cherchait juste à ce qu’elle soit heureuse sans forcément à ce qu’ils soient tous les deux ensemble. Du coup, je me suis dit : « Bien, c’est vraiment bizarre cette histoire, là ». Donc, j’ai inventé le mot « amoréluctance », c’était la fusion de deux mots latins. Donc l’un, c’était « amore » pour amour, et l’autre, c’était « reluctanter », qui voulait dire « avec résistance ». Donc, c’était l’amour avec résistance.
La tonalité d’un appel téléphonique se fait entendre.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
Allô ?
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Au téléphone
JP ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
Oui, oui. Aimé ?
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Au téléphone
Oui, tu m’as texté ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
Non, je t’ai pas texté. Pourquoi ?
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Au téléphone
Non, mais je sais pas, je viens de recevoir un texte de toi, mais c’était pas très lisible, fait que je me suis dit que j’allais t’appeler.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
Ah. Ah, ça doit être… Oui, j’ai dû m’accrocher. Mon téléphone était dans mon pantalon. Fait que, oui…
AIMÉ rit.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Au téléphone
Comment ça s’appelle ça, donc, quand t’appelles par accident puis que tu t’assoies sur ton téléphone ? Il y a pas un mot pour ça ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
C’est pas un butt… Ah, je le sais pas. Je pense que ça existe pas en fait en français. Ça « fitte » dans notre sujet. Il faudrait bien l’inventer, ce mot-là.
AIMÉ rit.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
Bien, je suis sérieux, là. Il faudrait vraiment l’inventer, ce mot-là.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Maxime, il a sûrement des astuces. Je lui ai demandé c’était quoi sa démarche quand il a créé le mot « césorateur ». Pour info, un « césorateur », c’est quelqu’un qui finit pas ses phrases.
MAXIME ROY s’exprime en entrevue.
MAXIME ROY :
Bien, il y a un peu de recherche. Pour celui-là, j’avais fait de la recherche dans un dictionnaire de latin pour trouver la locution d’origine. Il y a d’autres fois, c’est un peu plus instantané. C’est un peu plus fulgurant.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER réfléchit en parlant à voix haute.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
OK, fait qu’un message envoyé quand on s’assoit sur un téléphone… Ih ! OK, OK.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
De mon côté, j’ai décidé de faire une petite séance de brainstorm.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER réfléchit en parlant à voix haute.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
… téléphone ? Non, ouache, ouache ! Appel… Appel… Ou « télerreur » ? « Télerreur », non. Involontaire ? Ah, il y a de quoi comme « pantadon ». « Impantalon vol… » Ark, non. C’est pas beau hum… Fessier, fesse, cul… Un F… Un « fesse-MS ». Pas pire, pas pire. Mais non. Popotin ? Popotin, texto… « Popotexto ». « Popotexto » !
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
« Popotexto ». Définition : un SMS envoyé par mégarde en appuyant sur les touches d’un téléphone qui se trouve dans la poche arrière de notre pantalon. Combiné de « popotin » et « texto ». « Popotexto ».
NOMBREUSES VOIX :
Répétant
Popotexto.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
S’adressant au public de l’émission
Les mots sur le site web de Maxime se sont jamais retrouvés dans un grand dictionnaire. En d’autres mots, ils ont jamais été officialisés officiellement par un office. Mais dans mon cas, c’est pas ça qui va m’empêcher de promouvoir « popotexto ». Oh que non ! Il faudrait que je m’assure que ce mot-là soit pas déjà inventé. Soyons réalistes, il y a sans doute des milliers de mots que je connais pas. Voyons voir.
Il pose un dictionnaire sur une table et souffle dessus, puis en tourne les pages.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
OK, pop… Poppy… Popote… OK, non, il est pas dans mon dictionnaire 1995. Mais tu sais, quand on y pense, mon Petit Larousse chéri contient à peine 65 000 mots. Bon, à peine, je dis. Puis, à l’époque, on utilisait pas les mêmes technologies. Pour les besoins de la cause, j’ai décidé d’aller fouiller dans une banque de terminologie. La terminologie, c’est le langage spécifique d’une ou plusieurs spécialités. Chez l’OQLF, c’est « Le grand dictionnaire terminologique » qui se concentre principalement sur les termes des nouvelles technologies et du commerce. Mais c’est pas tout. Il y a aussi la banque de terminologie du gouvernement du Canada : « TERMIUM Plus », qui recense près de 3,7 millions de termes. 3,7 millions ! C’est 57 fois plus que mon Larousse. On y trouve pas mal de stock varié. Des synonymes, des acronymes, des noms de lieux, mais aussi leurs équivalences dans les autres langues des Amériques. Très inclusif, le TERMIUM. Bref, c’est vraiment la Cadillac des dictionnaires.
ANTOINE RACICOT s’exprime en entrevue.
ANTOINE RACICOT :
J’ai assisté par exemple à une soutenance de thèse d’une amie qui était une spécialiste dans la levure dans le yogourt. J’avais vraiment l’impression que c’était presque une langue étrangère pour moi. Et pourtant, on parlait bien français.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Ça, c’est Antoine Racicot. Lui et son collègue Louis-Dominic Bertrand font partie de l’équipe qui crée les fiches terminologiques de TERMIUM.
ANTOINE RACICOT poursuit son entrevue.
ANTOINE RACICOT :
De voir qu’il y a la langue générale et toutes ces langues de spécialité avec toute sa richesse et ses ressources linguistiques, c’est assez passionnant et quand on s’y penche, là, dans la terminologie, on voit que c’est un trésor, la langue française et toutes les autres langues. Et nous, dans le fond, le but, c’est de mettre en commun ça, de mettre ça sur une fiche en synthétisant l’information.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Mais pourquoi c’est important de recenser tous ces termes ?
ANTOINE RACICOT :
Ça devient un outil de mémoire collective. C’est du travail de longue haleine. De tester ces mots-là, de les rendre un peu officiels, même si la langue est vivante, on s’entend, de les rendre un peu officiels, de dire : « Oui, ceux-là, ils ont été validés par un terminologue, donc je peux l’utiliser avec confiance. »
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
C’est une démarche complètement différente de Maxime. Avec « Le mot pour la frime », il inventait carrément des nouveaux mots français. Mais les gens de TERMIUM semblent plutôt se concentrer sur la francisation de termes issus d’autres langues. N’empêche que selon Louis-Dominic, il y a quand même une portion créative là-dedans.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND s’exprime en entrevue.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
Quand on reçoit une demande d’un traducteur, on appelle ça une demande ponctuelle et c’est une demande d’équivalent. Donc, ça veut dire qu’en faisant sa traduction, il a pas trouvé, dans les outils à sa disposition, l’équivalent par exemple, l’équivalent français d’un terme anglais. Donc, il fait appel à nous. À ce moment-là, oui, nous, on fait nos recherches d’abord pour recenser ce qui existe. Et si on constate, effectivement, qu’il y a pas de solution, bien là, on est appelés à faire des propositions. Récemment, il y a un breuvage qui s’appelle Moon Milk en anglais, c’est un type de lait chaud assaisonné d’épices puis il y a une collègue ici au Bureau de la traduction qui a proposé « lait de Morphée ». C’est une belle idée.
Des bruits de touches de clavier se font entendre, puis JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
À mon grand honneur, « popotexto » était pas dans TERMIUM. En tout cas, pas encore. Mais en fouillant dans leur banque, j’ai fait d’autres petites découvertes. Des mots anglais dont j’ignorais carrément les francisations. Par exemple : on dira pas qu’on « tag » quelqu’un sur une photo, mais qu’on l’identiquette. Puis, on n’envoie pas des « smileys », mais des binettes. Mais un qui a particulièrement retenu mon attention, c’est nomadisme automobile. Qu’est-ce que c’est que ça ?
LOUIS-DOMINIC BERTRAND s’exprime en entrevue.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
Nomadisme automobile aussi, ça, c’est créé… C’est sur le modèle de course automobile. Donc, c’est pas quelque chose qui a été décidé, qui vient du ciel, là, ça a été réfléchi et ça correspond à la van life. Donc, on en a parlé pas mal cet été lorsqu’il y a eu la pandémie, les gens ont pris leurs vacances… Il y en a beaucoup qui ont loué des fourgonnettes pour voyager, mais là, c’est nouveau comme proposition, donc, on l’a vu dans les médias, repris par certains médias au Canada. Est-ce que ça va s’implanter ? Bien, ça reste à voir.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Ce que j’ai constaté, c’est que la plupart des youtubeurs qui ont ce mode de vie, ils utilisent l’expression van life, pas nomadisme automobile. Un youtubeur, ça veut avoir l’air cool, puis van life, c’est pas mal plus accrocheur que nomadisme automobile.
Un extrait de capsule est présenté.
DOMINICK MÉNARD :
Mon nom est Dominick. Ça fait maintenant plus de trois ans et demi que je suis dans ma van et cette année…
L’extrait prend fin.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
S’adressant au public de l’émission
C’est l’un des aspects principaux de la vie en van…
HOMME :
Ça coûte rien ! C’est ça la van life.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
OK, fait que TERMIUM, Le grand dictionnaire terminologique, le Larousse, ce sont tous des dictionnaires avec des missions et des publics différents. Ça fait en sorte qu’ils ont pas les mêmes critères de sélection de mots. Certains mots qui sont dans le Larousse ne seront peut-être même pas dans TERMIUM et vice versa, évidemment. Des dictionnaires, il y en a plein d’autres. Dans des dictionnaires libres en ligne comme le Wiktionnaire, j’ai même vu des mots inventés assez farfelus. Par exemple, un des personnages d’une BD de 1893, le savant Cosinus, invente…
Il se racle la gorge.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Tenez-vous bien, un « anémélectrorculpédel… » « Anémélectrorculpédalicoupe ». « Anémélectroreculpédalicoupe- ventombrosoparacloucycle ». Voilà. En général, les auteurs, et surtout les auteurs fantastiques, ils se font une joie d’insérer des mots inventés de toute pièce dans leurs oeuvres. On a juste à penser aux Mangemorts dans « Harry Potter », aux hobbits dans « Le seigneur des anneaux » ou Dothrakis de « Trône de fer ». Puis c’est sans compter tous les noms de lieux fantaisistes, de potions ou encore de chevaliers.
Des grognements se font entendre, suivis de bruits d’épées qui s’entrechoquent.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Dans « Cyrano de Bergerac », on mentionne même « l’hippocampéléphantocamélos », un croisement imaginaire entre l’hippocampe, l’éléphant et le chameau.
Un cri d’animal imaginaire se fait entendre.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Bref, n’importe qui peut créer un mot. Certains seront adoptés et utilisés couramment, d’autres seront utilisés dans des cercles plus restreints, comme des sous-cultures. Par exemple, chez les fans de mangas et d’animes, un « weeaboo » ou un « Kikoo Jap », c’est un terme péjoratif pour désigner une personne non japonaise obsédée par la culture japonaise. Et pour les adeptes d’e-sports, un « newb » désigne un débutant. En même temps, j’imagine qu’on se sent spécial quand on a un lexique qui nous est propre puis qu’on est les seuls à comprendre. Ça rend l’appartenance au groupe plus exclusive. Comme un droit de passage. Au fil de mes discussions, j’ai découvert qu’on utilise couramment des mots français qui en sont pas vraiment. En tout cas, pas selon l’OQLF et TERMIUM. Par exemple, « nominer », « faire application » ou « candidater », « procrastinateur ». Ouin… « Procrastinateur »… Moi, je dirais : gros paresseux qui passe la nuit sur Netflix.
Des craquements de croustilles se font entendre.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Mais pourquoi ces mots sont pas des mots ? Selon qui ? Tu sais, si la majorité des gens les utilise, ils devraient être considérés comme des mots français, non ? Même si techniquement, c’est des anglicismes. Puis, à l’inverse, pourquoi des mots comme « nomadisme automobile » sont officialisés alors que personne les utilise ?
FRANCIS PEDNEAULT poursuit son témoignage.
FRANCIS PEDNEAULT :
Quand vous parlez du processus d’officialisation, nous, il y a plusieurs consignes en français à respecter pour qu’un mot soit un mot en français. C’est vraiment de voir si ça respecte l’esprit de la langue en français.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Francis de l’OQLF m’a donné comme exemple le MOOC. M O O C. En anglais, l’acronyme signifie : Massive Open Online Course. Si on traduit en français, ça donne : « Cours en ligne ouvert et massif ». C’est une expression qu’on voit courir sur le web. Le problème, c’est que « massif » en français, ça signifie pas ouvert à tous, mais plutôt épais ou gros.
FRANCIS PEDNEAULT poursuit son témoignage.
FRANCIS PEDNEAULT :
Donc, on a ici un exemple de terme qui est tout à fait français entre guillemets, mais qui s’insère pas nécessairement dans l’esprit de la langue.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Je me suis posé tout un tas de questions. Dès qu’un mot sort d’une bouche, ça en est un, non ? Et ça, peu importe si l’OQLF, TERMIUM ou l’Académie française l’ont approuvé. Non ? AIMÉ discute avec JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Je le sais pas ce que t’en penses, JP, mais j’ai toujours trouvé la langue française un peu élitiste. Puis en fait, si on regarde au niveau historique, l’Académie française, dans leurs premiers écrits fondateurs, il y avait vraiment à l’origine une volonté de distinguer les classes sociales. Donc, plus on maîtrisait la langue, plus on faisait partie d’une classe supérieure. C’est peut-être pas aussi présent aujourd’hui qu’à l’époque, mais est-ce que c’est possible que ça se poursuive d’une certaine manière encore maintenant avec la création des nouveaux mots ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Oui, oui, oui, t’as tout à fait raison. Moi aussi, je pense qu’il y a un clivage entre les gens qui officialisent, tu sais, les érudits du français, puis le public en général.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Puis, ton intervenant de la France, celui des mots pour la frime, euh…
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Maxime.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Oui, Maxime, il en pense quoi, lui, de l’Académie française ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Maxime, c’est pas un fan.
MAXIME ROY s’exprime en entrevue.
MAXIME ROY :
Il y a plusieurs éléments qui font que l’Académie est assez peu entendue aujourd’hui en France par la plupart des gens. C’est justement son apparence d’organisme normalisateur et qui est là pour sanctionner, en fait, de définir le bon usage des mots. Le problème, c’est que la façon dont est gérée l’institution est difficilement en adéquation avec notre époque. Un autre facteur qui explique ça, c’est que tous les académiciens sont des gens très, très âgés. Il y a un youtubeur qui se moque et qui explique pourquoi l’Académie française est une institution en dehors de son temps, comme de tous ces vieux qui nous dictent nos règles de grammaire d’une main tremblante.
Un extrait d’une capsule est présenté.
YOUTUBEUR :
Conclusion, conclusion. Eh bien, l’Académie est une institution proche du pouvoir depuis sa création jusqu’à aujourd’hui, tout en restant politiquement très conservatrice.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
J’ai une autre anecdote pour vous. On est au printemps 1955, et les patrons d’IBM France se demandent comment appeler leur nouvelle machine électronique. Plusieurs idées flottent. « Systémateur », « congesteur », « combinateur »… Mais éventuellement, un des cadres demande conseil à son ancien professeur, Jacques Perret, qui lui propose le mot « ordinateur ». Parfait. IBM tente de protéger le mot comme une marque, mais dû à son succès monstre, le public l’adopte rapidement et IBM doit libérer le mot « ordinateur » pour que tout le monde puisse l’utiliser. C’est fou, hein, de penser que des mots que l’on utilise aujourd’hui à toutes les sauces pouvaient jadis appartenir à quelqu’un ou à une compagnie. Donc, la paternité des mots, ç’a quand même une certaine importance.
Un signal de modem se fait entendre.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
L’ordinateur, c’était une des plus grandes révolutions technologiques du vingtième siècle. Mais les experts prévoient qu’il va y avoir plus de percées scientifiques et technologiques dans les 20 prochaines années que dans toute l’histoire de l’humanité réunie. Les robots, les percées en médecine, la réalité virtuelle, la conquête de Mars, la vie éternelle. Wow ! Mais qui dit innovation dit évidemment nouveau lexique. En grande majorité, les mots à franciser viennent d’abord de l’anglais comme spoiler ou hashtag. Parce que l’anglais, c’est la langue dominante des sciences et technologies. Puis des organismes ou des individus vont se pencher dessus et franciser ces mots-là. Comme moi. Pour faire ma part, j’ai envoyé le mot « popotexto » à l’OQLF. On va voir ce qu’ils en pensent. Mais en attendant, j’étais curieux de savoir quels mots, eux, ils ont inventés.
FRANCIS PEDNEAULT poursuit son témoignage.
FRANCIS PEDNEAULT :
À l’Office, on s’attribue pas nécessairement la paternité des mots, mais je peux vous dire quand même qu’à l’Office, on a créé « hypertrucage » pour le deepfake, « divulgâcheur » pour le spoiler, « infonuagique », « hameçonnage », et j’en passe. Puis on valide également des mots comme « courriel », « égoportrait » qui sont pas des mots qui ont été créés à l’Office.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Qui a créé « égoportrait » ?
FRANCIS PEDNEAULT :
Riant
C’est une très bonne question qui a créé « égoportrait ».
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Si c’est pas l’OQLF qui a créé « égoportrait », c’est qui ?
Un extrait de conversation se fait entendre.
HOMME :
Ginette, où c’est que t’as mis mon égoportrait stick ?
Des bruits d’appareil photo se font entendre.
FABIEN DEGLISE s’exprime en entrevue.
FABIEN DEGLISE :
Comme journaliste dans un journal francophone qui couvrait à cette époque-là beaucoup l’actualité technologique, depuis plusieurs années déjà j’avais ce souci-là de franciser les mots technologiques ou techniques appartenant à une autre langue, de la franciser pour l’amener dans notre langue et pour amener cette réalité-là à être nommée dans notre langue.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Celui qu’on entend, c’est Fabien Deglise, journaliste de renom du Devoir. C’est lui qui a inventé « égoportrait ».
FABIEN DEGLISE poursuit son entrevue.
FABIEN DEGLISE :
C’est vrai que probablement le mot était en gestation dans mon cerveau plusieurs semaines avant que je le sorte et que je le façonne, mais ça faisait longtemps, je pense, ça me travaillait aussi cette histoire de selfie, parce que ça nommait quelque chose d’assez singulier qui se traduit relativement bien.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Aujourd’hui, le mot est couramment utilisé, notamment par les médias. En fait, je le vois souvent passer dans mon fil Facebook.
FABIEN DEGLISE poursuit son entrevue.
FABIEN DEGLISE :
Ça a été aussi beaucoup utilisé par le monde commercial ou par le monde institutionnel. Les ministères par exemple ou les musées. Il y a beaucoup d’utilisation de ce mot-là par la suite.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Comment ça se passe la paternité d’un mot ?
FABIEN DEGLISE :
Il y a pas de paternité en fait. Il y a pas de droit sur un mot. S’il y avait eu un droit sur les mots, peut-être que je serais pas là en train de vous parler. Je serais peut-être aux Bahamas en train de me prélasser sur une plage. Le mot a été reconnu dans « Le grand dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française », mais il y a pas de nom associé au mot. C’est sûr que mes enfants ont été beaucoup plus fier de moi que moi-même, on va dire, quand le mot est apparu dans le dictionnaire. Ils étaient très impressionnés.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
C’est quand même impressionnant.
FABIEN DEGLISE :
On le fait pas pour impressionner. On le fait pas pour être reconnu. On le fait pas pour aller chercher la gloire. On le fait surtout pas pour aller chercher de l’argent.
Riant
Parce que ça marche pas. La seule chose que j’ai faite qui relève de l’égocentrisme lié à ce mot-là, c’est que la journée où on a appris au Devoir que le mot rentrait dans le dictionnaire Larousse, j’ai envoyé un courriel à tous les employés et je leur ai demandé de venir dans la salle de rédaction, et on a fait un égoportrait de groupe pour souligner l’entrée du mot dans le dictionnaire.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Plus Fabien me décrivait la genèse de « égoportrait », plus je me remettais en question. Pourquoi est-ce que j’avais voulu créer un mot en fait ? Est-ce qu’il y avait un petit côté égocentrique dans ma quête ? Quand j’y pense, ça devrait plutôt être une démarche libératrice. Une manière pour moi de mieux comprendre ma langue et l’utiliser. Beaucoup de gens francisent pour combler un de leurs besoins. Par exemple, on utilise le mot anglais mansplaining. Ça, ça décrit un homme qui explique de façon condescendante à une femme quelque chose qu’elle sait déjà. Mais il y avait une lacune en français pour expliquer cette réalité sexiste là. Alors, la traductrice Audrey Pageau-Marcotte a inventé l’expression « pénispliquer ». Ça a du mordant et ça se comprend vite. C’est pour ça que l’expression est devenue très populaire dans certains milieux. Les terminologues francisent aussi pour combler les besoins des spécialistes ou des traducteurs. Donc, oui, il y a un côté utilitaire à leur démarche. Mais est-ce que le public général les utilise vraiment ? Quand je vous ai dit que mes parents m’avaient confiné dans ma chambre pendant tout un été avec mon Larousse 1995 comme seul ami, bien, je vous ai un peu menti. Mes parents vont l’apprendre en même temps que vous, mais j’avais caché un Game Boy sous mon oreiller. Comme ça, je pouvais jouer à Pokémon en secret. Ouais, un Game Boy. Euh, ou une Game Boy. Attends. Les Français disent une Game Boy, mais tu sais, « boy », ça veut dire garçon, là. Ah, anyway. Alors, oui, on s’entend. Une autre de mes grandes passions, c’est les jeux vidéos. À l’époque, tous les jeux étaient en anglais. Fait que quand on discutait entre nous dans la cour d’école, on utilisait souvent un vocabulaire qu’on avait adapté avec des mots inventés, puis on n’était pas les seuls à faire ça.
THIERRY BOULANGER s’exprime en entrevue.
THIERRY BOULANGER :
Tu sais, le classique de tu n’as plus de vie. Fait que là, il y a un écran qui est écrit « Game Over », mettons. Bien, nous autres, on appelait ça, on disait « t’es gimo », mettons. On avait comme nos diminutifs. Nos mots, ils n’existent pas pour de vrai pour tous ces trucs-là. Je me souviens de ça. Justement comme ça, dans la cour d’école, une anecdote, là : « Oh bien là, ça faisait trois fois que j’étais gimo, puis là, après ça, j’ai réussi… »
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Lui, c’est Thierry Boulanger, un mordu de jeu de la ville de Québec. En grandissant, Thierry a décidé de poursuivre sa passion de jeunesse en devenant développeur de jeux. J’ai moi-même étudié en multimédia dans un cégep francophone, mais je ne me souviens plus si on utilisait les mots originaux ou les francisations. Ouais. Je devais être un peu trop sur le party.
THIERRY BOULANGER poursuit son entrevue.
THIERRY BOULANGER :
… utilisaient eux aussi les termes anglos, les termes qui sont usuels dans le travail. Et des fois, ils faisaient la parenthèse, puis franchement, c’était presque humoristique la plupart du temps : « Et en passant, le mot français pour ça, c’est tel truc. » Puis ça faisait juste que tout le monde riait, puis après ça, on continuait puis on le réutilisait jamais. Fait que c’était plus vu comme des petits « Le Saviez-Vous ? » un peu intéressants, mettons. On a eu un prof qui était plus âgé, qui était comme un programmeur au gouvernement, qui s’était pris une session et tout. Puis lui, il était plus : « Eille ! Non, non ! Nous autres, sur les micro-ondes, on met des stickers en français par-dessus le mot timer. » Fait que lui, dans ses questions d’examen, c’était vraiment comme les termes francos, mais ouais, je pense qu’il y avait un consensus assez universel dans la classe de faire : « Il est bien téteux, lui, avec ça, là. »
Riant
Puis non, on n’a jamais revu ça autre que… Des fois, c’est drôle, un après-midi, juste utiliser les mots français pour rire, là.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Thierry a finalement démarré sa propre compagnie de développement : Sabotage Studios. Puis leur premier jeu, « The Messenger », a récolté les louanges des joueurs aux quatre coins du globe.
Une musique de jeu vidéo se fait entendre.
Un extrait de capsule se fait entendre.
HOMME :
Malgré des décennies de jeux vidéos derrière nous, il y a des titres qui parviennent à nous surprendre. « The Messenger », sujet de ce vidéo test, est l’un d’entre eux…
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Une vraie fierté canadienne.
JEAN-PHILIPPE s’adresse à THIERRY BOULANGER en entrevue.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
T’es allé sur le marché du travail, t’as parti ta compagnie. Là, vous êtes revenus dans les termes que tout le monde utilisait ?
THIERRY BOULANGER :
Ouais. Il y a des mots qui sont très simples. Si on parle d’un engin de jeu, mettons, on va dire que c’est dans l’engin. Du moment que ça devient un peu plus pointu, comme par exemple, une image en pixel d’un personnage, on va appeler ça un sprite. On sait que le terme « lutin » existe, mais c’est un peu… À part que d’en rire quand on se le fait dire par formalité à l’école, c’est un terme qui existe pas, là, pour deux raisons. La première, c’est que c’est pas vraiment pratique. Ça coule pas dans une phrase. Après ça, c’est que c’est pas usuel. Mais c’est surtout que si on se limitait à ces termes-là quand on cherche des solutions à nos problèmes ou quand on regarde des tutoriels sur comment travailler, des trucs comme ça, les termes sont simplement pas utilisés. Fait que si on utilisait ça en mot-clé pour chercher une solution à un problème, on se couperait probablement 99 % des solutions. Les seuls cas que je peux me rappeler d’avoir comme appris un nouveau terme technique en français, c’était tout le temps si quelqu’un d’autre, mettons un collègue, qui est tombé sur un mot quelque part dans des recherches ou sur un forum, puis là, il montre un screenshot de : « Eille, checke ça ! Ça, ils appellent ça de même. » Puis là, on rit 30 secondes puis on continue notre journée.
AIMÉ discute avec JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Est-ce que ça te surprend, JP, que les francisations sont pas si utilisées que ça finalement dans les milieux de travail, ou en tout cas pas dans le domaine des jeux vidéos ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Pas vraiment. Pour tout dire, j’ai trouvé certains tweets, là…
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Le reprenant
Certains gazouillis.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Oui, oui. Pardon. Certains gazouillis qui ridiculisaient les nouvelles francisations créées par l’OQLF. Je te donne des exemples, là. Il y a quelqu’un de la France qui disait : « Ne dites plus cosplayer, mais costumadier, in-game, mais intrajeu, beat-em-all, mais jeu de combat à progression. Je viens de trouver le vocabulaire du jeu vidéo de l’Office québécois de la langue française et c’est le plus beau jour de ma vie. » Évidemment, il écrivait ça de manière sarcastique. Puis là, il y a quelqu’un du Québec qui a répondu : « Ça contraste beaucoup avec la réalité au Québec. Je bosse dans le domaine du jeu vidéo et c’est l’anglicisme à toutes les sauces. En plus du fait que pas mal de développeurs ou de clients sont anglophones. »
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Hum-hum… Donc, finalement, c’est un point de vue qui est partagé par plusieurs.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On en vient à se demander pourquoi il y a autant de réfractaires. Je peux comprendre que ces trouvailles-là peuvent sonner bizarres à la première écoute, mais un peu d’ouverture, gang. Non ?
THIERRY BOULANGER poursuit son témoignage.
THIERRY BOULANGER :
Moi, je vois plus loin que ça. Je pense même que ce serait dangereux d’enseigner les termes français. Parce qu’après ça, t’aurais du monde formé qui sort de l’école, que c’est certain… Tu peux pas juste te limiter au marché franco si t’es pour avoir une carrière là-dedans. Fait que là, tu partirais même avec deux prises, parce que tu serais tout le temps en train de dire : « Hein ? C’est quoi ce mot-là ? Je comprends pas. » « Hein ? Je cherche une solution sur Internet, puis il y a personne qui parle du mot que moi je parle. » Si tu m’amènes un mot plus long, pas clair qu’il va falloir que j’explique, qui va m’empêcher de faire mes recherches, c’est fini, là. C’est certain. Non, là. Après ça, s’il faut absolument que je l’utilise dans une demande de financement, c’est sûr qu’on va le faire. Mais là, on est juste tous en train de se faire accroire que le mot existe puis qu’il est utilisé. Ton studio de Québec, ça se peut que ça marche, puis tant mieux si ça marche. Puis si tu te ramasses à PAX à montrer ton affaire, tu vas à un show qu’il y a 80 000 personnes qui sont là. Bien, ça va être des anglophones.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Puis il est pas le seul à penser de même. Maxime aussi travaille dans le domaine de la tech. Quand je lui ai parlé, il s’était même présenté comme product manager et non comme… un gestionnaire de produit.
MAXIME ROY poursuit son entrevue.
MAXIME ROY :
Moi, dans mon job aujourd’hui, on utilise plus que des anglicismes. C’est des mots anglais en fait à longueur de journée. Parce que le domaine de l’Internet, il y a énormément de concepts, de services, de choses qui sont issues de l’étranger. En fait, l’anglais, c’est la langue des affaires, mais c’est aussi la langue de la globalisation. Donc, tout ce qui est Internet, bien, c’est le réseau de la globalisation par excellence. Nous, on utilise énormément de mots anglais dans nos phrases en français. Je pense qu’il y a beaucoup trop de mots techniques qui sont fabriqués pour qu’on arrive à tous les franciser.
AIMÉ discute avec JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Les coordonnateurs de l’OQLF puis les terminologues de TERMIUM à qui t’as parlé, qu’est-ce qu’eux en pensent des gens qui sont réfractaires à utiliser leurs francisations ? Est-ce que t’as eu la chance de leur en parler ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Bien, honnêtement, leur objectif premier, c’est vraiment que le plus de monde possible utilisent les francisations qu’ils vont créer. Mais j’irais pas jusqu’à dire qu’ils pensent qu’il y a un clivage entre eux puis le public général.
FRANCIS PEDNEAULT poursuit son entrevue.
FRANCIS PEDNEAULT :
Qu’on propose des termes. Si ceux-ci, on voit au bout de trois, quatre, cinq ans, ce qui est très, très long en néologie, si on voit que ces termes-là ne sont pas nécessairement entrés dans l’usage, on s’assoit avec les spécialistes de la langue, on s’assoit avec les entreprises, on s’assoit avec différentes entités externes, pour tenter de trouver un terme qui serait plus adéquat, qui serait plus facilement implantable pour la population. Parce que l’objectif justement, c’est l’utilisation de la terminologie en français. Donc, si nous, on est seuls dans notre tour d’ivoire, si on veut, puis les gens n’utilisent pas la terminologie, bien, on fait pas notre travail.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Ça doit être un peu décourageant de voir que dans certains cas, des mots sur lesquels on a travaillé pendant des semaines sont soit ridiculisés soit pas utilisés pantoute.
FRANCIS PEDNEAULT poursuit son témoignage.
FRANCIS PEDNEAULT :
Nos moments de bonheur, c’est quand les termes s’implantent dans l’usage. C’est quand les entreprises acceptent. C’est quand on a des articles de journaux qui utilisent les termes qu’on a proposés ou qu’on a créés. C’est une consécration. C’est vraiment là qu’on a notre paye si on veut. Il y a des coups de circuit. Il y a des erreurs entre guillemets, parce qu’on tente habituellement de proposer des termes qu’on espère vont fonctionner, mais c’est l’usage qui fait foi de tout. Donc, si les personnes les utilisent, ça fonctionne. Sinon, on recogite sur quelque chose de plus facilement intégrable.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Puis vos plus gros coups de circuit, c’était quoi ?
FRANCIS PEDNEAULT :
Récemment, les termes qui se sont implantés comme « mot-clic ». Il y a « pourriel » qui s’est très bien implanté. Plus récemment, on a « divulgâcheur » également pour le spoiler.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Ça a marché, ça ?
FRANCIS PEDNEAULT :
Ça a très bien fonctionné. Il y a eu quelques petites réticences, parce que les gens considéraient que ces termes-là, avec « gâcheur », c’était pas un terme qui était nécessairement joyeux. Mais en même temps, un spoiler en anglais, ça rend exactement la même image, donc c’est « gâcher le moment » si on veut.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Ah bon ? Moi, ce que je constate, c’est que ceux sur Twitter qui l’utilisent sont beaucoup des gens des médias ou des coms, tandis que, pour Monsieur, Madame-Tout-Le-Monde, ça ressemble plutôt à ça. Guillaume Slash écrit :
« J’ai personnellement fait un AVC quand j’ai vu qu’on disait divulgâcheur pour dire spoiler au Québec. » Et Niveau 1 lui répond : « Je peux t’assurer que personne dit ça. »
On parle de pérennisation de la langue française. Mais qu’est-ce qu’ils en pensent, tous ceux que j’ai rencontrés depuis le début du balado ? Si on les crée pas ces mots-là, est-ce que ça peut devenir un risque pour
la pérennité de notre langue ?
PRÉSENTATEUR :
Francis Pedneault de l’OQLF.
FRANCIS PEDNEAULT répond à la question en entrevue.
FRANCIS PEDNEAULT :
Si l’Office ou si d’autres instances ne proposent pas une terminologie française pour dénommer des réalités qui seraient uniquement disponibles en anglais, il y a un risque pour la survie du français. C’est certain.
PRÉSENTATEUR :
Fabien Deglise, journaliste du Devoir.
FABIEN DEGLISE répond à la question en entrevue.
FABIEN DEGLISE :
Je suis pas sûr que ce soit nécessaire de le faire pour une question de pérennisation de la langue. La persistance du fait français en Amérique du Nord relève pas forcément… Ça en fait partie. La francisation des mots anglais fait probablement partie de l’équation, mais c’est minime dans l’équation.
PRÉSENTATEUR :
Maxime Roy, du « Mot pour la frime ».
MAXIME ROY prépond à la question en entrevue.
MAXIME ROY :
Tant qu’on a des mots pour recouvrir les notions qu’on veut partager, je pense que ça suffit. Et moi, personnellement, je préfère employer le mot selfie. Enfin, dans mon entourage déjà, personne n’utilise le mot « égoportrait ».
PRÉSENTATEUR :
Thierry Boulanger, développeur de jeux vidéos.
THIERRY BOULANGER répond à la question en entrevue.
THIERRY BOULANGER :
Si deux pompiers se parlent en termes techniques d’un outil de leur travail, on a-tu besoin d’une troisième personne qui vient leur dire comment ils devraient nommer ça d’une façon que ça prend plus de temps, puis quand ils sont en formation dans une autre ville, personne sait de quoi ils parlent ? Non. Ça a pas rapport. Va-t’en ! On éteint des feux puis on le fait comme du monde. Ça veut pas dire qu’on veut tuer le français. La journée que le français propose le terme le plus court, le plus clair puis le plus efficace, tout le monde va le prendre.
PRÉSENTATEUR :
Louis-Dominic Bertrand de TERMIUM Plus.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND répond à la question en entrevue.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
Au final, ceux qui décident, ce sont les locuteurs, les utilisateurs de la terminologie. On constate au Canada et ailleurs aussi, en Catalogne, chez nos concitoyens autochtones, il y a chez l’humain, un désir, dans tous les peuples, de pouvoir nommer les nouvelles réalités, ou le monde qui les entoure, dans sa langue.
AIMÉ discute avec JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
JP, est-ce que tu les utilises, ces traductions-là ? Dans ta vie de tous les jours ou en tant que réalisateur ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Bien, tu sais, honnêtement, pour moi, c’est plus une question de mix and match. Je t’avoue que la langue, je la vois plus comme une boîte à outils, là. Une palette de couleurs. Plus on a de couleurs, plus on a de possibilités, puis plus on est précis dans ce qu’on veut décrire.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Puis par rapport à « popotexto » finalement, est-ce que t’as reçu une réponse de l’OQLF ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Non, pas encore, mais j’ai quand même pu demander au gars de TERMIUM ce qu’il en pense.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND s’exprime en entrevue.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
Je pense qu’on avait déjà traité ce terme-là, puis c’est quelque chose comme « recomposition automatique », donc c’est quelque chose de descriptif moins drôle que ta proposition. On la prend en note.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND rit.
JEAN-PHILIPPE s’adresse au public de l’émission.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
« Recomposition automatique ou « popotexto » ? D’après moi, ça va être le grand débat de 2021. Bref, ma démarche était pas si égoïste que ça en fait. Ce qui avait commencé par une simple fascination pour le dictionnaire m’a finalement amené à comprendre les enjeux de la création de mots. Je pense que c’est super important qu’on ait accès à une grande variété de mots en français pour être capable de décrire nos réalités professionnelles, mais aussi personnelles. De mon côté, j’ai peut-être pas encore fait entrer « popotexto » dans le Larousse, mais je vais commencer à l’utiliser en ligne pour voir si ça génère des réactions. Puis peut-être qu’un jour, qui sait, quand on va ouvrir nos téléphones intelligents, on va pouvoir choisir une fonction « anti-popotexto ».
AIMÉ s’adresse au public de l’émission.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Vous venez d’entendre l’épisode « Popotexto ».
Entrevue et scénarisation,
Jean-Philippe Bélanger.
Recherche, Abigail Alves Murta.
Réalisation et animation,
Jean-Philippe Bélanger et
Aimé Majeau Beauchamp.
Musique originale, Medhi Cayenne.
Mixage, Pierre-Luc Barr.
Production, Gisèle Quenneville.
La série « J’en perds mes mots » est présentée par ONFR+.
N’hésitez pas à partager, à « liker », et surtout à vous abonner au balado pour ne pas rater les prochains épisodes.
À bientôt.
Une sonnerie de téléphone retentit.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
Allô ?
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
Au téléphone
Oui, salut, JP ! Louis-Dominic ici, du Bureau de la traduction. J’ai des nouvelles concernant ta… Tu nous avais fait une proposition pour désigner un message texte qui est envoyé accidentellement.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
Oui, oui. « Popotexto ».
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
Au téléphone
Exact. « Popotexto ». Je suis heureux de t’annoncer que ça va figurer sur une fiche dans TERMIUM.
JEAN-PHILIPPE éclate de rire et LOUIS-DOMINIC BERTRAND rit aussi.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
Merci, ça commence bien mon matin, là.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
Au téléphone
Bien, super. Ça me fait plaisir de t’annoncer ça. Puis donc, ça devrait apparaître dans TERMIUM dans les prochains jours.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
Bon, bien, je vais garder l’oeil ouvert. Je te remercie beaucoup, Louis-Dominic.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
Au téléphone
OK.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
Passe une belle journée.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Au téléphone
À la prochaine.
English Translation
PRESENTER :
J’en perds mes mots, a podcast by ONFR+.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
To the audience
In 2020, the Larousse dictionary added 150 new words, like “ubériser”, “écocitoyen” and “post-vérité”. Yeah ― “post-vérité”, as in “post-truth”, the concept that we have entered a time period where personal opinion, ideology, emotion, faith and beliefs triumph over facts. I don’t know about you, but I’m quite excited from “post-post-truth” to make it into the dictionary.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP laughs lightly.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Have you ever wondered how new words are created ? My colleague Jean-Philippe Bélanger has. Jean-Philippe is the hypercurious type. Especially for slightly weird stuff. Like paranormal activity or conspiracy theories. If anyone had told me they were fascinated, even obsessed by the dictionary, I’d have been surprised. Except in JP’s case. My name is Aimé Majeau Beauchamp, and in today’s episode…
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Jean-Philippe Bélanger…
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
… will tell his story, but also the truth that lies beyond the creation of words. Or perhaps I should say the post-truth.
Signals are heard, then a bit of conversation.
WOMAN :
I’ll be darned !
CHILD :
A computer !
WOMAN :
You’re spoiled, you’re spoiled.
The clip ends.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
To the audience
We sure had a good life when we were kids, didn’t we ? Think about it : we had matchbox race cars, pogs, Tamagotchis, Pokémon, Lego, Ninja Turtles, video games. But surprisingly, when I was young, my favourite activity was none of those things. No. When I was young, what really excited me was reading. And what was this 10-year-old’s favourite book ? “Harry Potter” ? “Goosebumps” ? Books published by “La courte échelle” ? No. My favourite book, of all those on my bookshelf, was the 1995 Larousse. Now that I think about it, it’s crazy to spend your Saturdays reading the dictionary at the age of 10. But you know, it’s not something I was embarrassed about, either. For me, it was normal. There was just something about words ―their order, their arrangement, their sounds― that fascinated me. Even more than their definitions. For example, why are words that start with “X” so rare ? What are the longest words ? How many animals have a name that starts with “Q” ? Hm… I remember the Quetzal, anyway… For me, the dictionary was the world in a nutshell. It made me dream. Once, to scold me for something, I don’t remember what, my father pretended to throw my dictionary in the trash. My little child heart broke. You know, when your parents punish you by taking away your dictionary… I really must have done something terrible.
Children are reading words.
CHILDREN :
Chicken. Chicken. Chicken coop. Chicken…
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
But that’s not really the whole story. Between you and me, there’s another reason I liked reading the dictionary so much. And that’s because I have a sensory problem that makes me extremely sensitive to certain noises, as if someone was scratching my brain with a fork, and I couldn’t make it stop.
Screeching sounds are heard.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
By the time I fell in love with words, the problem had begun to manifest more violently. The dictionary’s pages were my escape. The fact that everything was so well organized in the dictionary allowed me to “re-anchor” myself in the moment. In other words, it gave me some semblance of stability.
An announcement over the intercom of a school is heard.
MAN :
Hello students, this is Director Champoux welcoming you to a new school year.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
By the time I started high school, I was a lot more annoying, let’s just say. So much so that I was expelled from school in my first year. To punish me, my parents had me spend all summer in my room. No games, no books. Just one exception : I was allowed to keep my dictionary. So I decided to read the preface, and then I came across a section that described the new words added in that year’s edition. New words ? Is that right ? What do you mean, new words ? That’s when I began to understand that the French language is not static.
Indistinct conversations are heard.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
To the audience
Later on, in CEGEP, I had a teacher who was a bit more… original. He was a bit of a hippie. His fun was deconstructing language. Once, he invited me to a slam session. I had prepared a nice little text with nice rhymes. He came up with a text that was all over the place and used invented words.
Indistinct conversations are heard, then a mic sound. A man begins to speak using invented words.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
To the audience
And I was like…
Record scratch.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
What a weirdo ! Look at this guy, using words that don’t exist. He really didn’t try very hard. Well, guess what ? He won the slam session.
AIMÉ chats with JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Hi, JP, and welcome to “J’en perds mes mots”.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Hi, Aimé. Welcome to my episode.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Laughing
Thank you. I’m listening to you, and, you know, you talk about your childhood, your teen years, the dictionary, but I get the impression that this slam session was the pivotal point for you.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Yes. Actually, that was the moment I started to look into how words are created. Mind you, Aimé, I didn’t really know how to go about it. That’s why, through this podcast, I wondered : actually, is there a special formula to create words ?
Short comments from various people are heard.
MAN 1 :
Words exist to understand the world around us.
MAN 2 :
The French language belongs to the people who speak it.
MAN 3 :
We’re passionate. We want to find the best possible word for adoption into use.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
To the audience
When I think about words, I immediately think about the Office québécois de la langue française, or OQLF for short.
MAN 4 :
… a drop in OQLF budgets…
MAN 5 :
Here we are, in front of the offices of the OQLF, where announcements…
MAN 6 :
… by competent OQLF staff.
MAN 7 :
Is COVID masculine or feminine ? The Office québécois de la langue française has decided.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
The OQLF is one of the babies born out of the independence movement in the 60s. At the time, the goal was to make workplaces more French-speaking, since they were still mainly English-speaking. The Office meant to ensure that common life would be in French. Today, the OQLF is in charge of Quebec’s linguistic policy. I often thought they were those who had the final word, so to speak. Because we’d often hear, in the media, that the OQLF had created this word, and that word. So I met with Francis Pedneault, a linguistic coordinator at the OQLF. In short, he’s a word creation supervisor.
Fun music begins to play.
WARPED VOICES :
Singing
♪ Hey ho hey ho ♪
♪ We manufacture words ♪
♪ Hey ho hey ho ♪
♪ We manufacture words ♪
♪ Manufacture words ♪
FRANCIS PEDNEAULT speaks during an interview.
FRANCIS PEDNEAULT :
The aspects to prioritize are really a focus on the meaning of the words, so that these French terms, these neologisms, become established. We cannot forget that these new terms must be short, must be transparent. They must enable users to understand quickly what reality they refer to. In essence, who creates the new word ? It can originate in the general public, it can originate from companies, it can even be born in the media. Everyone is entitled to create new words. At the Office, we have 25 language advisers who receive various requests to create new words and validate terms created by companies, the media, the administration and the general public.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
In a way, I’m relieved to hear that new word suggestions don’t just come from specialists. In my opinion, it makes the process far more democratic.
JEAN-PHILIPPE speaks to FRANCIS PEDNEAULT.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
So I can make up a word and come to you afterwards ?
FRANCIS PEDNEAULT laughs.
FRANCIS PEDNEAULT :
You can write us. You can write, and we will respond to the measure of your question, your request or your suggestion, in essence. There is just one point of contact, and it’s by email, at gdt@oqlf.gouv.qc.ca.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
I wonder what kind of people submit their creations to institutions like the OQLF. I imagine Roland, down the street, who came up with “pizza-poutine-sub” won’t be the type to submit something like that. By looking for word creators who do it for fun, I stumbled on a website, “Le Mot pour la frime”. From what I can tell, it’s a collaborative word-creation project that is open to the public.
AIMÉ chats with JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
JP, I’m curious to know what kind of words you’d find on a public platform. I figure it must be pretty different from what you’d handle at the OQLF, for instance.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
In that case, it really comes to words that were made up for fun. They’re not words created for widespread and common use. For instance, you have “computosaurus” ―an old computer― or “dreamucer”, a dream producer.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
That’s nice.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
You have “bonbombardier”, for candy in the shape of a plane.
A plane engine thrums.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Maxime Roy, the project’s instigator, is a huge fan of the French language, and he creates words for fun. I wanted to find out what his process was, which is why I contacted him in France. He started explaining why he launched the project.
MAXIME ROY speaks during an interview.
MAXIME ROY :
I had this idea, just like that, to create a website where every day you’d discover a more or less unknown word, a word forgotten by the dictionary. Bit by bit, I was creating a reserve of words that I sort of considered to be show-off vocabulary. Then, people started making suggestions on the site. The point was to have fun, to make creating words a thing that anyone could do. The more people are appropriating the language and mastering it, the more we have ways of expressing ourselves, of conveying complex and precise notions.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Do you remember the first word you created ?
MAXIME ROY :
The first word I created, I was in college. I think it was about a friend. I had a friend who was in love with this girl, so in love he was behaving in unpredictable ways. And rather than ask her out or kiss her or getting with her, he was so in love that he was striving for her to be happy without them necessarily being together. And I thought, “That is so weird.” So I invented “amoréluctance”, the fusion of two Latin words. The first was “amore”, for love, and the other was “reluctanter”, meaning “with resistance”. It was reluctant love.
A phone’s dial tone is heard.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
Hello ?
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
On the phone
JP ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
Sure, sure. Aimé ?
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
On the phone
Yeah, you texted me ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
No, I didn’t text you. Why ?
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
On the phone
No, I don’t know, I just got a text from you. It wasn’t really clear, so I figured I’d call.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
Ah. Oh, that must be… I must have butt-texted. My phone was in my pocket. So, yeah…
AIMÉ laughs.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
On the phone
What do you call that in French, when you butt-dial someone by accident because you sat on your phone ? Is there a word for that ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
In English, isn’t it butt… Ah, I don’t know. I think it doesn’t exist in French. It fits our topic, though. We should make one up.
AIMÉ laughs.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
I mean it. We really should make one up.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Maxime must have some tips. I asked him what his process was when he created the word “césorateur”. Which, by the way, designates someone that doesn’t finish their sentences.
MAXIME ROY speaks during an interview.
MAXIME ROY :
Well, there’s some research involved. For that one, I had done some research in a Latin dictionary to find the original terms. Sometimes it’s much quicker. It strikes like lightning.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER thinks out loud.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Okay, so a text message sent by accidentally sitting on your phone… Eee ! Okay, Okay.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
For my part, I decided to brainstorm.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER thinks out loud.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
… phone ? No, yuck. Yuck ! Call… Call… “Telerror” ? No, not “telerror”. Involuntary ? Maybe something with “pants”. “Impantalon vol…” Ew, no. That sounds awful… Ass, butt, buttcheek… A f… “Fesse-MS”. Not bad, not bad. But no. Popotin ? Popotin, texto… “Popotexto”. “Popotexto” !
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
“Popotexto”. Definition : a text message sent accidentally by pressing on the keys of a phone which is located in the backside of one’s pants. It’s a combination of “popotin” and “texto”. “Popotexto”.
NUMEROUS VOICES :
Echoing
Popotexto.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
To the audience
Words on Maxime’s site are never featured in big dictionaries. In other words, they’ve never been officially officialized by an office. But that won’t keep me from promoting “popotexto”. No way ! First I should check it hasn’t been invented yet. Because let’s be realistic : there must be thousands of words I don’t know. Let’s see.
He places a dictionary on a table and blows on it, then cracks it open.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Okay, pop… Poppy… Popote… Okay, no, it’s not in my 1995 dictionary. Mind you, my darling little Larousse contains a mere 65,000 words. Sure, I say mere. At the time, we didn’t use the technologies we have today. For my purposes, I decided to search in a terminology database. Terminology is the specific language of one or many specialties. At the OQLF, the “Grand dictionnaire terminologique” focuses mainly on the vocabulary linked to new technologies and commerce. But that’s not all. The Government of Canada also keeps a terminology database, “TERMIUM Plus”, which contains some 3.7 million terms. 3.7 million ! That’s 57 times more than my Larousse. And it contains some pretty varied fare. Synonyms, acronyms, toponyms, but also their equivalents in other North American languages. TERMIUM is highly inclusive. In a way, it’s the Cadillac of dictionaries.
ANTOINE RASSICOT speaks during an interview.
ANTOINE RASSICOT :
I watched a friend defend her thesis. She was a specialist in yogurt yeast. It was like listening to a foreign language. Yet, it was still French.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
That’s Antoine Rassicot. He and his colleague, Louis-Dominic Bertrand, are part of the team that creates terminology records in TERMIUM.
ANTOINE RASSICOT continues.
ANTOINE RASSICOT :
Seeing that there is the general language, and a bunch of specialty languages, with all this wealth of linguistic resources is fascinating. When you look into it, into terminology, you see it for the treasure that it is, in French and in every other language. And for us, the goal is to share it, to put it into a record and summarize the information.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Why is it so important to keep track of all these terms ?
ANTOINE RASSICOT :
It becomes a collective memory tool. It’s definitely a long-term project. Testing those words, making them somewhat official, even though the language is alive, of course, making them somewhat official by saying, “Yes, these words were validated by a terminologist, so I can use them confidently.”
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
This is a completely different approach from Maxime’s. Through “Le mot pour la frime”, Maxime was straight-up inventing new French words. But the people at TERMIUM rather seem to focus on making terms born from other languages usable in French. That said, Louis-Dominic is of the mindset that the job involves some creative work anyway.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND speaks during an interview.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
When we receive a request from a translator, we call it a one-off request and it’s typically a request for a French equivalent. That means that, while translating, the translator didn’t find the French equivalent of an English term in the tools available. So the translator turned to us. At that point, we first do our research to determine what already exists. If we find that there is no preexisting solution, we then have to make suggestions. There’s this drink that recently appeared called Moon Milk in English, which is a sort of hot milk seasoned with spices. A colleague here at the Translation Bureau suggested we translate it with “lait de Morphée”. It’s a nice idea.
Keyboard clacking is heard, then JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
It is my great honour to confirm that “popotexto” is not in TERMIUM. Not yet, anyway. But while I was looking through the database, I made some other fun discoveries. Some English words have French equivalents I didn’t know at all. For instance, the verb “to tag” someone in a photo, is “identiqueter”. “Smileys”, for their part, are “binettes”. But the one that particularly caught my attention was “nomadisme automobile”. What is that ?
LOUIS-DOMINIC BERTRAND speaks during an interview.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
“Nomadisme automobile” too, that was created… We started from the base of “course automobile”. So this isn’t something that was decided out of nowhere. It was thought out and it means van life. We talked about it a lot this summer, during the pandemic. People were going on vacation… Many rented vans to travel. Mind you, this is a new suggestion, but we saw it was reused in some Canadian media. Will it actually take root ? Only time will tell.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
What I’ve noticed is that most of the YouTubers who have this lifestyle use the expression van life, not “nomadisme automobile”. YouTubers want to sound cool, and van life is a lot catchier than “nomadisme automobile”.
An excerpt from a clip begins.
DOMINICK MÉNARD :
My name is Dominick. I’ve been in my van for over three years, and this year…
The clip ends.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
To the audience
This is one of the main aspects of living out of a van…
MAN :
It doesn’t cost anything ! That’s the van life.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Okay, so TERMIUM, the Grand dictionnaire terminologique and the Larousse are all dictionaries with different missions and audiences. That means they don’t have the same word selection criteria. Obviously, some words in the Larousse may not even show up in TERMIUM, and vice versa. And there are many other dictionaries. Like, in free online dictionaries like Wiktionary, I’ve seen some pretty crazy made-up words. For instance, one of the characters in a comic strip from 1893, Cosinus the scientist, invented…
He clears his throat.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Hold on : an “anémélectrorculpédel…” “Anémélectrorculpédalicoupe”. “Anémélectroreculpédalicoupe- ventombrosoparacloucycle”. Yeah. In general, authors, especially fantasy authors, are happy to insert made-up words into their work. Just think of the Death Eaters in “Harry Potter”, the Hobbits in “Lord of the Rings” or the Dothrakis in “A Song of Ice and Fire”. And then there are all the fancy names for places, potions, and knights.
Grunts are heard, followed by swords clanging.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
In “Cyrano de Bergerac” there is even mention of an “hippocampéléphantocamélos”, an imaginary cross between the seahorse, the elephant and the camel.
An imaginary animal cry is heard.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
In short, anyone can create a word. Some will be adopted and used commonly, others will be used in more restricted circles, such as subcultures. For example, among manga and anime fans, a “weeaboo” or “Kikoo Jap” is a derogatory term for a non-Japanese person obsessed with Japanese culture. And for e-sports fans, a “newb” is a beginner. At the same time, I guess it makes you feel special to have your own lexicon that only your group understands. It makes belonging to the group more exclusive. Like a rite of passage. In the course of my discussions, I discovered that we commonly use French words that are not really French. At least, not according to the OQLF and TERMIUM. For example, “nominer”, “faire application” or “candidater”. Even “procrastinateur”. Yeah… “Procrastinateur”… I’d just say a lazy butt spending their nights on Netflix.
Chips cracking are heard.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
But are these words not words ? Who says ? You know, if the majority of people use them, they should be considered French words, right ? Even though technically they’re anglicisms. And, on the other hand, why are words like “nomadisme automobile” official if nobody uses them ?
FRANCIS PEDNEAULT continues.
FRANCIS PEDNEAULT :
When you talk about the process of making something official, there are several rules in French that must be met for a word to be considered a French word. It’s really a matter of seeing whether it respects the spirit of the French language.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Francis, from the OQLF, gave me the example of a MOOC. M O O C. In English, the acronym means Massive Open Online Course. If you translate it to French, you get, “Cours en ligne ouvert et massif”. This is an expression you see around the web. The problem is that “massive”, in French, doesn’t mean “open to all”, but rather “large”, “thick” or “big”.
FRANCIS PEDNEAULT continues.
FRANCIS PEDNEAULT :
This is an example of a term that is entirely French, so to speak, but which doesn’t necessarily meet the spirit of the language.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
I had all kinds of questions. As soon as a word comes out of someone’s mouth, does that not make it a word ? No matter whether the OQLF, TERMIUM of the Académie française approved it ? AIMÉ chats with JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
I don’t know about you, JP, but I’ve always through that French was a bit elitist. And in fact, if you look at the history of the Académie française, in their foundational writings, there was a real desire to create a divide between social classes. The more you mastered the language, the more you belonged to a higher class. This is perhaps not as true today as it was then, but is it possible that this continues in a certain way, even now, with the creation of new words ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Yes, yes, yes, you’re absolutely right. I also think there’s a divide between the people who formalize terms, you know, French scholars, versus the general public.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
And your French interviewee― the one with the words to show off, uh…
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Maxime.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Yes, Maxime. What does he think of the Académie française ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Maxime isn’t a fan.
MAXIME ROY speaks during an interview.
MAXIME ROY :
There are several elements that make it so most people in France these days don’t pay attention to the Académie. Precisely due its appearance as a standard-setting organization, one that is there to sanction, in fact, to define the correct use of words. The problem is that the way the institution is run is hardly in keeping with our times. Another factor is that all the academics involved are very, very old. There’s this a YouTuber who makes fun of the Académie française, explaining that it’s an institution out of its time, with all these old people who dictate our grammar rules with shaky hands.
An excerpt from a clip begins.
YOUTUBER :
Conclusion, conclusion. Well, the Academy has been an institution close to power, from its creation to today, while remaining politically very conservative.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
I have another anecdote for you. In the spring of 1955, the bosses of IBM France were wondering what to call their new electronic machine. Several ideas were floating around. “Systémateur”, “congesteur”, “combinateur”… Eventually, one of the executives asked his former professor, Jacques Perret, for advice and he suggested the word “ordinateur”. Perfect. IBM tried to protect the word as a trademark, but due to its huge success, the public quickly adopted it and IBM had to release the word “ordinateur” for common use. It’s crazy, isn’t it, to think that words that are now used in all sorts of ways could once have belonged to someone or some company in particular ? So, the authorship of words does have a certain importance.
A modem signal is heard.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
The computer was one of the greatest technological revolutions of the twentieth century. But experts predict that there will be more scientific and technological breakthroughs in the next 20 years than in all of human history combined. Robots, breakthroughs in medicine, virtual reality, the conquest of Mars, eternal life. Wow ! But innovation obviously means a new lexicon. The vast majority of words requiring a French term come from English, such as spoiler or hashtag. Because English is the dominant language of science and technology. Organizations or people will then look at these words and make them French. Like me. To do my part, I sent the word “popotexto” to the OQLF. We’ll see what they think. In the meantime, I was curious to know what words they came up with.
FRANCIS PEDNEAULT continues.
FRANCIS PEDNEAULT :
At the Office, we don’t necessarily take credit for words, but I can tell you we did come up with “hypertrucage” for deepfake, “divulgâcheur” for spoiler, “infonuagique”, “hameçonnage”, and so on. We also validate words like “courriel” or “égoportrait”, which were not created at the Office.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Who came up with “égoportrait” ?
FRANCIS PEDNEAULT :
Laughing
That’s a great question. Who created “égoportrait” ?
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
If the OQLF didn’t come up with the equivalent for “selfie”, who did ?
An excerpt of conversation is heard.
MAN :
Ginette, where did you put my “égoportrait stick” ?
Camera clicks are heard.
FABIEN DEGLISE speaks during an interview.
FABIEN DEGLISE :
As a journalist in a French-language newspaper that covered a lot of technological news at the time, I had already been thinking for several years about putting technological or technical words from another language into French, to bring them into our language, to bring this reality that had to be named in our language.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
We’re listening to Fabien Deglise, a renowned journalist from Le Devoir. He’s the one who came up with “égoportrait”.
FABIEN DEGLISE continues.
FABIEN DEGLISE :
It’s true that the word was probably gestating in my brain for several weeks before I took it out and shaped it, but I think this selfie thing had been bugging me for a while. It was the name of something rather singular that translates relatively well.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Today, the word is commonly used, especially by the media. In fact, I often see it on my Facebook feed.
FABIEN DEGLISE continues.
FABIEN DEGLISE :
It has also been used a lot by the commercial world and the institutional world. Departments, for example, or museums. The word was extensively used thereafter.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
How does it feel to have the paternity of a word ?
FABIEN DEGLISE :
There is no paternity, really. One doesn’t own a word. If words could belong to individuals, I might not be here to tell you about it. I’d be in the Bahamas lounging on a beach. The word has been recognized in Le grand dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française, but there is no name associated with it. My children were much prouder of me than I was, so to speak, when the word appeared in the dictionary. They were very impressed.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
It is quite impressive.
FABIEN DEGLISE :
We don’t do it to impress. We don’t do it to be recognized. We don’t do it in search of glory. We certainly don’t do it for money.
Laughing
Because that wouldn’t work. The only thing I did that was self-centered about the word was that, on the day we learned at Le Devoir that the word was entering the Larousse dictionary, I sent an email to all the employees and asked them to come to the newsroom, and we took a group selfie to mark the entry of the word in the dictionary.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
The more Fabien described the genesis of “égoportrait”, the more I wondered. Why had I wanted to create a word in the first place ? Was there a little bit of self-absorption in my quest ? When I think about it, it should rather be a liberating process. A way for me to better understand my language and use it. Many people use French to meet their needs. For example, we use the English word mansplaining to describe a man condescendingly explaining to a woman something she already knows. But there was a gap in French to explain this sexist reality. So translator Audrey Pageau-Marcotte coined the expression “pénispliquer”. It’s got a lot of bite and it’s easy to understand. That’s why the expression has become very popular in certain circles. Terminologists also create French terms to meet the needs of specialists or translators. So, yes, there is a utilitarian side to their approach. But does the general public really use them ? When I told you that my parents had confined me to my room for a whole summer with my 1995 Larousse as my only friend, well, I lied to you a bit. My parents will find this out along with you all, but I had a Game Boy hidden under my pillow. That way I could play Pokémon in secret. Yeah, a Game Boy, masculine. Uh, or a Game Boy, feminine. Wait. The French say Game Boy, feminine, but, like, “boy” does mean boy. Ah, anyway. So, right, you get it. Another great passion of mine is video games. At the time, all games were in English. So when we were talking to each other in the schoolyard, we often used a vocabulary that we had adapted with made-up words, and we weren’t the only ones.
THIERRY BOULANGER speaks during an interview.
THIERRY BOULANGER :
You know the classic where you run out of lives. And then there’s a screen that appears, saying “Game Over”. We used to call it― we used to say “you’re gimo”. We had, like, verbal shortcuts. Our words didn’t really exist. I remember that. Just like that, in the schoolyard at recess, you’d hear, “Oh well, I hit gimo three times, but then I succeeded…”
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
That’s Thierry Boulanger, a game enthusiast from Quebec City. Growing up, Thierry decided to pursue his childhood passion by becoming a game developer. I personally studied multimedia in a French CEGEP, but I don’t remember if we used the original words or the French ones. Yeah. I must have been out partying too much.
THIERRY BOULANGER continues.
THIERRY BOULANGER :
… they also used the English terms, the usual terms in the workplace. Sometimes, they’d do this aside, and honestly, it was almost comical most of the time, like, “By the way, the French word for that is this or that.” It made everyone laugh, then we resumed the class and we’d never use it again. So it was seen as this little “Did You Know ?”, more for the sake of curiosity than anything else. We had a teacher who was older. He was this government programmer or something, and he had decided to teach one session for the sake of it. He was a lot more like, “Hey ! No, no ! We put French stickers over the word timer on the microwave. So, for his exam questions, you really had to use the French terms. But overall, in the classroom, it was pretty universal to go, “Wow, what a ninny, insisting like that.”
Laughing
And then we never covered the matter again, other than… Sometimes we’d do it for fun. Like for one afternoon, using the French words for laughs.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Thierry eventually started his own development company : Sabotage Studios. Their first game, “The Messenger”, garnered praise from gamers all over the world.
Video game music is heard.
An excerpt of a clip is heard.
MAN :
Despite decades of video games to look back on, there are still titles that manage to surprise us. “The Messenger”, the subject of this test video, is one of them…
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
A real source of Canadian pride.
JEAN-PHILIPPE speaks to THIERRY BOULANGER during an interview.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
You got onto the job market, you started your company. Now you’re back to using the terms that everyone else was using ?
THIERRY BOULANGER :
Yeah. There are words that are really simple. Like, the words for game engine are pretty straightforward, so we’ll say, “C’est dans l’engin.” But as soon as it gets a bit more sophisticated, like to talk about the pixelated image of a character, we’ll stick to calling it a sprite. We know the term “lutin” exists, but it’s a bit… Aside from laughing about it when school makes a point of sharing it, the term doesn’t really exist in practice, for two reasons. The first is that it’s not really practical. It doesn’t fit nicely into a sentence. And secondly, it’s not commonly used. The thing is, if we limited ourselves to these terms when looking for solutions to our problems or when we’re looking at tutorials on how to work on these issues, we’d find nothing, because the terms aren’t used. If we used those keywords to look for a solution to a problem, we would probably cut out something like 99 % of the available information. The only times I can recall having learned a new technical term in French was always when someone else, like a colleague, stumbled on the word while researching something or browsing a forum, and he’d share this screenshot, like, “Hey, check this out ! This is how they call this thing.” And we’d laugh for like 30 seconds, and move on with our day.
AIMÉ chats with JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Are you surprised, JP, that French terms aren’t commonly used in the workplace, at least in the video game industry ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Not really. Full disclosure, I found some tweets…
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Correcting him
You mean “gazouillis”.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Sure, sure. Sorry. Some “gazouillis” ridiculing new French terms promoted by the OQLF. Lemme give you some examples. Someone from France was saying, “We no longer say cosplayer, but rather “costumadier”, nor in-game, but rather “intrajeu”, nor beat-em-all, but rather “jeu de combat à progression”. I just discovered the video game lexicon from the Office québécois de la langue française, and my day is made.” Obviously, he was being sarcastic. Then, someone in Quebec replied, “This really contrasts with the reality in Quebec. I work in the video game industry, and we use English at every turn. Plus, most developers and clients are English speakers.”
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
Hm-hm… So, ultimately, it’s a common viewpoint.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
One begins to wonder why so many people are resisting it. I get that some of these words might sound strange on first hearing them, but I feel like some openness is warranted, guys. No ?
THIERRY BOULANGER continues.
THIERRY BOULANGER :
I think it goes beyond that. I think it might be a risk to teach the French terms. Afterwards, you’d have people trained right out of school, and in this field… You can’t just stick to the French job market if you want to work in the field. So you’d be coming out of the gate with a handicap, since you’d spend all your time going, “Huh ? What’s that word ? I don’t understand.” “Huh ? I’m looking for solutions online, but there’s no mention of the word I’m using.” If you give me a longer word that isn’t clear, that I’ll have to explain, that will keep me from finding things I’m looking for, it’s over. For sure. No way. I mean, if I absolutely have to use it during a funding application, I will. But then we’d all be pretending that the word exists, since it’s being used. In your Quebec-based studio, it might work. And if it does, good. But if you wind up at PAX to show off your project, you’re going to a show with 80,000 attendees. And they speak English.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
He’s not the only one to think that way. Maxime also works in the tech field. When I spoke to him, he introduced himself as a product manager. Not as a “gestionnaire de produit”.
MAXIME ROY continues.
MAXIME ROY :
In my job, these days, we do more than just use English words. We use English basically all day long. Because in the field of the internet, there are so many concepts, services and things that come from elsewhere. English is the language of business, but also the language of globalization. And the internet is THE network of that globalization. We use a ton of English words in our French sentences. I think there are far too many new technical words being created to allow French to keep up.
AIMÉ chats with JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
What do the OQLF coordinators and TERMIUM terminologists you spoke to have to say about people who resist using their French suggestions ? Did you get to ask them about it ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Honestly, their primary goal is that the largest number of people use the French terms they create. But I wouldn’t go so far as to say that they think there’s a divide between them and the general public.
FRANCIS PEDNEAULT continues.
FRANCIS PEDNEAULT :
We suggest terms. If we see, some three, four, five years later, which is an eternity in neology, that these terms have not entered common use, we sit with language specialists, we sit down with companies, we consult various external entities, and we try to find a more adequate term, a term that the population could adopt more easily. Because the point is for that French terminology to actually be used. So if we’re the only ones using it, sitting in our ivory tower, so to speak, and people don’t use that terminology, we’re failing at our job.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
It must be discouraging to see that, in some cases, words on which you worked for weeks are being ridiculed or are going completely unused.
FRANCIS PEDNEAULT continues.
FRANCIS PEDNEAULT :
Our moments of joy are when we see our terms entering common use. When companies accept them. When newspaper articles use the words we suggested or created. Then, it’s like they’re enshrined. That’s when it really pays off, if you will. Some are home runs. And some are mistakes, quote-unquote, because we usually try to suggest terms we hope will work, but usage is the ultimate decider. So if people use them, it’s a victory. Otherwise, we go back to the drawing board for something that will be adopted more easily.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
What would you say were your best home runs ?
FRANCIS PEDNEAULT :
Recently, some terms have taken root, like “mot-clic” for a tag. “Pourriel”, for spam, was really well adopted. More recently, “divulgâcheur” worked, too, for spoiler.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
That worked ?
FRANCIS PEDNEAULT :
It worked really well. There was some pushback, because people thought that the term, given that it contained “gâcheur”, or ruiner, wasn’t necessarily a positive take. But then, a spoiler in English, gives the exact same mental image. It’s like “ruining a moment”, if you will.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Is that right ? What I’ve seen is that people on Twitter using that term are mostly in the media, whereas the average person will instead be quite opposed. Like, Guillaume Slash wrote,
“I personally had a heart attack when I saw that you’re supposed to say “divulgâcheur” to say spoiler in Quebec.” And Niveau 1 replied, “I can assure you nobody says that.”
This is about the long-term survival of the French language. So what do all these people I’ve met since the start of this podcast think about it ? If we don’t create those words, will that endanger the long-term survival of our language ?
PRESENTER :
Francis Pedneault from OQLF.
FRANCIS PEDNEAULT answers the question.
FRANCIS PEDNEAULT :
If the Office or other instances don’t suggest French terms to name realities that are only available in English, then the survival of French is at risk. For sure.
PRESENTER :
Fabien Deglise, journalist from Le Devoir.
FABIEN DEGLISE answers the question.
FABIEN DEGLISE :
I’m not sure it’s necessary to do it for the long-term survival of the language. The persistence of the French Fact in North America isn’t necessarily tied to… It’s part of the matter. It’s likely that creating French equivalents to English terms is part of the equation, but it plays a minimal role in the issue.
PRESENTER :
Maxime Roy, from “Mot pour la frime”.
MAXIME ROY answers the question.
MAXIME ROY :
As long as we have words to cover the concepts we want to convey, I think that’s enough. And I personally prefer to use the word “selfie”. At least, in my circles, no one uses “égoportrait”.
PRESENTER :
Thierry Boulanger, game developer.
THIERRY BOULANGER answers the question.
THIERRY BOULANGER :
If two firemen are speaking in technical terms about a tool they use, do you really need a third person butting in to tell them that they should call it something specific that takes longer, so that when they’re in training in another town no one knows what they’re talking about ? No. That’s ridiculous. Go away ! We put out fires and we do it right. That doesn’t mean we want French to die. When French offers a shorter, clearer, more effective word, everyone will be on it.
PRESENTER :
Louis-Dominic Bertrand, from TERMIUM Plus.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND answers the question.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
In the end, users, the people who use the terms, are the ones who decide. We’ve seen in Canada and elsewhere, in Catalonia, among Indigenous peoples, that humans, that people have this desire to name new realities and describe the world around them in their own language.
AIMÉ chats with JEAN-PHILIPPE.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
JP, do you use those translations ? In your everyday life, or as a director ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
Honestly, you know, to me it’s more a matter of mixing and matching. I confess that language is more like a toolbox to me. A colour palette. More colours equal more possibilities and more precision in what we say.
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
And on the matter of “popotexto”, did you get an answer from the OQLF ?
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
No, not yet, but I still got to ask the TERMIUM guy what he thought.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND speaks during an interview.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
I think we already looked at that term. It was something like “automatic redial”, so it’s more descriptive, and less funny than your suggestion. We’ll make note of it.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND laughs.
JEAN-PHILIPPE speaks to the audience.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
“Recomposition automatique”, or “popotexto” ? I think we’re looking at the great debate for 2021. Anyway, I think my process wasn’t that self-centered after all. What began as a simple fascination for the dictionary finally got me to understand the issues revolving around creating words. I think it’s super important to have access to a wide variety of words in French, in order to describe our professional and personal realities. For my part, I might not have made “popotexto” enter the Larousse yet, but I’ll start using it online to see if it gets people to react. And maybe one day, who knows, when we open our smartphones, we’ll have the option to pick an “anti-popotexto” feature.
AIMÉ speaks to the audience
AIMÉ MAJEAU BEAUCHAMP :
You just listened to “Popotexto”.
Interviews and scripting :
Jean-Philippe Bélanger.
Research : Abigail Alves Murta.
Directors and hosts :
Jean-Philippe Bélanger and
Aimé Majeau Beauchamp.
Original Music : Medhi Cayenne.
Mixing : Pierre-Luc Barr.
Production : Gisèle Quenneville.
This series is a presentation by ONFR+.
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See you soon.
A phone rings.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
Hello ?
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
On the phone
Hey, hi JP ! Louis-Dominic here, from the Translation Bureau. I have news about your… You had suggested a word for a text message that is sent accidentally.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
Sure, sure. “Popotexto”.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
On the phone
Exactly. “Popotexto”. I’m happy to announce that it will be listed in a TERMIUM record.
JEAN-PHILIPPE bursts out laughing, as does LOUIS-DOMINIC BERTRAND.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
Thanks. That really starts my day off nicely.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
On the phone
Good, great. I’m happy to let you know. So it should appear on TERMIUM in the coming days.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
Alright, then I’ll keep an eye out. Thanks a lot, Louis-Dominic.
LOUIS-DOMINIC BERTRAND :
On the phone
Okay.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
Have a nice day.
JEAN-PHILIPPE BÉLANGER :
On the phone
See you soon.