Premier test pour Raymond Théberge devant le Sénat

Le candidat du gouvernement libéral au poste de commissaire aux langues officielles du Canada, Raymond Théberge, devant le Sénat. Montage: Benjamin Vachet

OTTAWA – Le candidat désigné par le gouvernement libéral pour devenir le septième commissaire aux langues officielles du Canada, Raymond Théberge, a passé son premier oral, le lundi 4 décembre, devant les membres du Sénat. Un premier exercice plutôt réussi, mais pas complètement convaincant selon certains.

BENJAMIN VACHET
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Devant les sénateurs, l’ancien directeur de la Société franco-manitobaine (SFM) a défendu son parcours professionnel « axé sur la compréhension et l’avancement des communautés de langue officielle » et beaucoup insisté sur l’éducation en langue française.

L’actuel recteur et vice-chancelier de l’Université de Moncton a souligné l’importance pour le gouvernement fédéral de réaffirmer la dualité linguistique comme une priorité, jugeant que le dossier a perdu sa place sur l’agenda public ces dernières années.

Sans se prononcer sur l’éventualité de donner plus de pouvoirs au commissaire aux langues officielles du Canada, le Franco-Manitobain a questionné la valeur de la Loi sur les langues officielles.

« Si on enfreint la loi et qu’il n’y a aucune conséquence, quelle est la valeur de cette loi? », a-t-il lancé.

Concluant sa présentation, il a assuré vouloir « poursuivre l’engagement de mes prédécesseurs à défendre, protéger et promouvoir la dualité linguistique comme valeur fondamentale de la société canadienne », ajoutant, à la suite d’une question de la sénatrice Claudette Tardif, qu’il allait « travailler avec les comités du Sénat et de la Chambre des communes et avec les communautés ».

Le sénateur Joyal lève le doute

Loin de l’ambiance tendue qui régnait lors de la comparution de Madeleine Meilleur devant la Chambre haute, en juin, la comparution de M. Théberge a toutefois suscité quelques interrogations.

Le sénateur Serge Joyal a rappelé les craintes soulevées dans un éditorial du quotidien L’Acadie Nouvelle dans lequel François Gravel questionnait la capacité de M. Théberge d’aller au front pour défendre les dossiers face au gouvernement fédéral.

« Être un médiateur peut s’avérer utile pour faire avancer les dossiers. Le style, c’est une chose, le résultat est plus important », a répliqué M. Théberge, avant de poursuivre : « Je vous assure que je suis prêt à assurer les fonctions et responsabilités du poste. Il y a des mesures prévues, il est important de les prendre au bon moment. Si on doit faire un recours judiciaire, on va le faire! »

À la sortie de la Chambre haute, la sénatrice franco-ontarienne, Lucie Moncion, s’est avouée plutôt « très favorable » à la candidature de M. Théberge, tout en confiant certaines préoccupations à #ONfr.

« M. Théberge a bien répondu aux questions. Il a une belle présentation, un beau pédigrée, il parle très bien français et anglais… Mais il va falloir que je réfléchisse un peu à la suite. Le sénateur Joyal a apporté des questions auxquelles M. Théberge n’a pas aussi bien répondu qu’à d’autres. Cela a éveillé d’autres préoccupations par rapport à ma réflexion. »

Son homologue, René Cormier, se laisse lui aussi un peu de temps.

« Il est manifeste que M. Théberge connaît bien les communautés francophones et  anglophones en milieu minoritaire et leurs enjeux. Le processus est en cours, on va voir le résultat au bout de compte. Je suis intéressé de voir ce que mes collègues ont à dire par rapport à sa candidature. »

Prochaine étape : la Chambre des communes

La Chambre haute aurait pu se prononcer dès ce lundi soir, mais elle a préféré différer sa décision qui devrait intervenir dans les prochains jours. En attendant, le marathon de M. Théberge se poursuivra ce mardi 5 décembre où il comparaîtra devant le comité permanent des langues officielles, en après-midi.

Le comité aura alors trente jours pour faire une recommandation qui sera transmise à la Chambre des communes pour un vote final des députés. Le mandat de Ghislaine Saikaley se terminant le 16 décembre, il ne serait toutefois pas surprenant que le comité décide de se prononcer dès ce mardi.

La ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, a d’ailleurs indiqué qu’elle espérait que M. Théberge soit nommé « le plus rapidement possible », sans s’engager à ce que cela soit fait avant les congés de fin d’année.

Bien que la majorité du Parti libéral du Canada (PLC) fasse de cet exercice une formalité à la Chambre des communes, la partie pourrait être encore plus ardue pour M. Théberge devant le comité permanent des langues officielles.

Le porte-parole aux langues officielles pour le Nouveau Parti démocratique (NPD), François Choquette, s’est montré très critique sur le processus entourant le choix de l’ancien recteur de l’Université de Moncton.

Le député de Drummond a annoncé son intention de porter plainte auprès du Commissariat aux langues officielles (CLO) du Canada, estimant que les chefs des partis d’opposition n’ont pas été véritablement consultés par le gouvernement comme le prévoit la loi, mais simplement informés de ce choix. Une critique rejetée par la ministre Joly.

 


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