Queen’s Park : le petit dernier et la doyenne

Sam Oosterhoff a fait son entrée à Queen's Park, le mercredi 30 novembre, et a dû expliquer ses positions controversées Crédit photo: Étienne Fortin-Gauthier

[ANALYSE]

TORONTO – Les derniers arrivés à Queen’s Park ont l’habitude de faire parler d’eux. Glenn Thibeault, vainqueur de l’élection partielle de Sudbury en janvier 2015, voit son nom associé au pire scandale du gouvernement libéral sous Kathleen Wynne. Pour d’autres raisons, les assermentations cette semaine de Sam Oosterhoff et Nathalie Des Rosiers ne sont pas passeés inaperçues.

SÉBASTIEN PIERROZ
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Tout sépare pourtant le nouveau député de Niagara Ouest-Glanbrook et la successeure de Madeleine Meilleur dans Ottawa-Vanier. Le premier vient à peine de graduer de l’école, la seconde occupait jusqu’à sa prise de fonction le poste de doyenne de la Section de common law de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa.

Outre les bagages universitaires, les deux nouveaux élus ont bénéficié d’un traitement de faveur différent de leur parti. Si c’est secret de polichinelle que le Parti libéral avait choisi Mme Des Rosiers comme sa candidate pour l’investiture dans Ottawa-Vanier, M. Oosterhoff n’a pas reçu le même adoubement du Parti progressiste-conservateur (PC de l’Ontario).

Du haut de ses 19 ans, le jeune homme a pourtant surpris. D’abord en écartant le président du parti et ancien député, Rick Dykstra, lors de l’investiture, puis en dominant très largement ses concurrents lors du scrutin, le 17 novembre dernier. Les 54 % obtenus sont mêmes supérieurs aux résultats de l’ex-député Tim Hudak.

Le hic, c’est que le chef progressiste-conservateur, Patrick Brown, se serait bien passé de cette victoire. La raison? M. Oosterhoff doit être considéré comme un conservateur, mais sans l’appellation « progressiste ». Opposé à l’avortement et au nouveau programme d’éducation sexuelle, le nouveau député se situe à l’extrême droite d’un parti écartelé entre plusieurs tendances. De quoi déclencher les surnoms de « Trump » à son encontre.

S’il veut déloger les libéraux de Kathleen Wynne en 2018, M. Brown sait qu’il doit absolument porter son parti vers le centre de l’échiquier politique, et réprimander les plus récalcitrants, comme ceux issus de la frange des « Landowners ». En avril dernier, le député Jack MacLaren avait été dépouillé de toutes ses responsabilités parlementaires après des propos misogynes.

Assez suffisant pour surveiller et recadrer M. Oosterhoff? Le plus jeune député de l’histoire de Queen’s Park est un habitué des médias sociaux. La veille de son assermentation, le nouveau venu avait qualifié sur son Twitter de « poorly written piece of legislation » le projet de loi 28 devant modifier la définition d’une famille en offrant plus de droits aux couples de même sexe. Un texte pour lequel le Parti libéral a reçu le soutien… du PC d l’Ontario.

La libérale Nathalie Des Rosiers ne situe bien entendu pas dans cette lignée politique. Cette brillante universitaire a probablement un rôle important à jouer au sein de l’équipe Wynne dans les prochains mois.

Cette semaine, le gouvernement a envoyé un premier signal dans ce sens en nommant la députée d’Ottawa-Vanier adjointe parlementaire au ministre du Logement et à la ministre déléguée à la Condition féminine

Il n’est pas impossible que la nouvelle élue reçoive rapidement un portefeuille ministériel si, par exemple, l’un des ministres ottaviens viendrait à tirer sa révérence.  Il y a fort à parier que le ministre de l’Infrastructure et député d’Ottawa-Ouest—Nepean, Bob Chiarelli, ne rempilera pas pour un autre mandat en 2018. Lui laissera-t-il une place libre avant?

Pour les Franco-Ontariens, l’arrivée de Mme Des Rosiers sur les bancs de Queen’s Park constitue une excellente nouvelle. Ses connaissances académiques pourraient être précieuses sur des dossiers pointus tels la Loi sur les services en français (Loi 8) et aussi pour la ministre déléguée aux Affaires francophones, Marie-France Lalonde.

Pour le coup, Patrick Brown envierait presque les libéraux.

Cette analyse est aussi publiée dans le quotidien Le Droit le 3 décembre