Recensement : le déclin du français « préoccupant » pour Ottawa et les organismes francophones

La ministre des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor. Crédit image: Dominique Demers

Les chiffres du Recensement 2021 sur le déclin du français en Ontario et au Canada publiés mercredi inquiètent le fédéral et les organismes francophones du pays. Pour ces derniers, il est nécessaire qu’Ottawa accélère l’arrivée de nouveaux immigrants francophones le plus rapidement possible.

Les francophones au Canada passent de 22,2 % en 2016 à 21,4 % en 2021. En Ontario, les Franco-Ontariens sont désormais 3,4%, eux qui étaient 3,8% lors du dernier exercice quinquennal. C’est aussi la plus forte baisse pour les Franco-Ontariens depuis 2001.

« C’est certain que c’est préoccupant, mais ce n’est pas nouveau », note le président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), Carol Jolin.

Au pays, les francophones hors Québec représentent désormais 3,3%. En 2016, c’était à 3,6%.

« Les données du recensement sur les langues officielles sont préoccupantes et démontrent ce que notre gouvernement a déjà dit très clairement; le français est menacé au Canada, y compris au Québec. Pour les 8 millions de francophones au Canada qui vivent dans un océan de plus de 360 millions d’anglophones à travers l’Amérique du Nord, nous savons qu’il faut redoubler d’efforts pour protéger et promouvoir le français et c’est pourquoi notre gouvernement en a fait une priorité », a commenté par courriel la ministre des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor.

a ministre des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor. Crédit image : Stéphane Bédard.

Cette dernière ajoute que les chiffres démontrent « l’importance d’adopter le projet de loi C-13 dans les plus brefs délais ».

« Les chiffres publiés aujourd’hui guideront également nos décisions pour notre prochain Plan d’action pour les langues officielles qui devra comprendre des mesures concrètes et nécessaires pour que les francophones puissent vivre, travailler et être servis dans la langue de leur choix. »

Mais pour les conservateurs, la Loi dans sa mouture actuelle se doit d’être revue, car elle ne donne pas suffisamment de « mordant » pour renverser le déclin de la langue de Molière. Pour le député Joël Godin, C-13 est « l’outil majeur » pour renverser les plus récentes données, mais il dit douter des intentions du gouvernement dans ce dossier.

« Les nombreuses actions du passé démontrent que ce n’est pas une priorité pour le gouvernement actuel pour réduire le déclin et faire en sorte que le français reprend sa place dans les chaumières canadiennes », dit-il en entrevue.

La Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) se dit très inquiète des plus récents chiffres de l’organisme gouvernemental.

« Pour nous les données dénotent une stagnation du français au Canada et mettent en relief l’urgence d’agir pour la protection de la langue au pays. C’est ce que le fédéral nous promet depuis quelques années. Il faut avoir cette volonté politique maintenant avant que le poids démographique diminue encore plus », affirme sa présidente Liane Roy.

La présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA), Liane Roy
La présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA), Liane Roy. Gracieuseté

Immigration

Pour la FCFA, les données d’aujourd’hui démontrent le besoin d’augmenter l’immigration francophone à travers le pays. Près de 2,7 millions de Canadiens ont dit être capables de soutenir une conversation en français.

« Quand on regarde les chiffres, c’est clair que si on avait atteint nos cibles en immigration francophone, on aurait près de 2,9 millions de francophones à l’extérieur du Québec. Il n’y a rien qu’on voit aujourd’hui qui était inévitable. »

En Ontario, la cible de 5% en immigration francophone n’a jamais été atteinte depuis son implantation.

« On le dit aux deux paliers de gouvernement que c’est extrêmement important de pas juste atteindre, mais dépasser nos cibles pour être capable de rattraper le temps perdu », souligne Carol Jolin.

Ce dernier abonde dans le sens du gouvernement Ford qui veut un plus grand contrôle sur l’immigration dans la province.

Les néo-démocrates se disent peu surpris de ces chiffres, car « le gouvernement libéral échoue à accueillir plus d’immigrants francophones ».

« Il est essentiel que l’on modernise la Loi sur les langues officielles et que l’on renforce le projet de loi du gouvernement afin d’y intégrer des objectifs de rattrapage démographique pour les communautés francophones en situation minoritaire », indique par courriel la députée Niki Ashton.

La députée Niki Ashton. Source : Twitter.

De son côté, le Bloc Québécois dit s’inquiéter de l’augmentation de l’anglais au pays et au Québec soutenant que « le Québec doit être maître d’oeuvre de sa propre politique linguistique ».

« C’est même pire que je pensais. C’est très inquiétant pour les communautés francophones et acadiennes. Comme c’est le cas à peu près tous les recensements depuis la Loi sur les langues officielles, la proportion de francophones diminue (…) Quand on nous dit que c’est beau l’augmentation du bilinguisme à la maison ou l’usage de plusieurs langues régulièrement à la maison, c’est normalement le prélude à l’assimilation », dénonce le député Mario Beaulieu.