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TORONTO – Doug Ford a répété à maintes reprises ces derniers jours que le plan ontarien pour la rentrée scolaire est « le meilleur au pays ». Mais que font les autres provinces et en quoi, le plan de l’Ontario diffère-t-il de ses confrères canadiens? ONFR+ compare, en huit points, le plan ontarien et ceux du Québec, de la Colombie-Britannique et de l’Alberta.

La taille des classes

L’Ontario est la seule des quatre provinces à imposer un maximum d’élèves par classe dans les écoles secondaires des conseils scolaires « désignés » qui ne pourront accueillir plus de 15 élèves en même temps.

Le Québec, la Colombie-Britannique et l’Alberta privilégient plutôt la limitation des échanges par l’intermédiaire de cohortes, comme le préconise l’Ontario pour les conseils scolaires non-désignés et les enfants de la maternelle à la 8e année.

Ainsi, en Colombie-Britannique, les enfants pourront fréquenter un maximum de 60 élèves au primaire et à l’école intermédiaire, et un maximum de 120 élèves, au secondaire. Au Québec, l’élève fréquentera toujours la même bulle soit « les mêmes 20-25 élèves » de la classe.

« Si vous avez une classe qui n’a pas de limite d’élèves, ça va être beaucoup plus difficile d’y contenir le virus. En les mesures, comme le masque, et en limitant la taille de la classe, on limite les dégâts. Ça commence déjà aux États-Unis, où il y a certains états qui ont eu des éclosions », estime le docteur et virologue, Hugues Loemba, de l’Hôpital Montfort.

Temps partiel ou temps plein

En Ontario, tous les écoliers de l’élémentaire seront en classe cinq jours par semaine, tout comme les élèves du secondaire localisés dans des « zones non-désignées ». Mais pour les élèves du secondaire dans les « zones désignées », comme à Toronto et Ottawa, il faudra partager sont temps entre l’école et la maison. Certaines exceptions pourront toutefois s’appliquer pour les écoles des régions « désignées » qui sont éloignées des grands centres. L’Ontario est également la seule province à autoriser une présence volontaire à l’école.

Au Québec, en Colombie-Britannique et en Alberta, le retour à l’école se fera à temps plein. Et contrairement à l’Ontario, les parents de ces provinces ne pourront pas retirer leurs enfants de l’école, sauf pour des symptômes de COVID-19 ou avec une preuve médicale. Certains cours en ligne sont toutefois prévus pour des cohortes d’élèves ayant des cours à option. Par exemple, au Québec, les élèves du secondaire quatre et cinq auront des journées d’alternance à l’école et à la maison. Il faut rappeler que certaines écoles, au Québec et en Colombie-Britannique, avaient déjà effectué un retour en classe, dans les derniers mois.

Hugues Loemba estime que les régions à faibles cas ont de bonnes raisons d’être moins sévères au niveau du nombre d’étudiants par classe.

« Si l’on garde le nombre de cas à un niveau extrêmement bas, on peut-être plus flexible tant et aussi longtemps qu’on garde les mesures comme le nettoyage des mains, le masque et la distanciation physique. Mais dès qu’on voit une hausse des cas, il faut baisser la présence. Il faut donc une certaine flexibilité en fonction de l’épidémiologie et du virus. »

La rentrée des professeurs

En Ontario, à l’élémentaire, le gouvernement souhaite, si possible, que les professeurs restent tout le temps avec le même groupe, excepté pour les professeurs spécialisés. Le ministère de l’Éducation prévoit 30 millions de dollars pour l’embauche d’enseignants supplémentaires. Ceux désirant rester à la maison pourraient offrir les cours en ligne aux étudiants ayant pris la même décision. Il est aussi prévu que les enseignants effectuent certaines tâches de nettoyage dans la classe.

Les professeurs au Québec et en Colombie-Britannique ne seront pas tenus de porter un masque dans la salle de classe, sauf si la distanciation physique ne peut-être respectée. Les trois autres provinces, spécialement la Colombie-Britannique et le Québec, misent sur un retour à la normale du fonctionnement des classes avec des mesures sanitaires. Les professeurs pourront enseigner dans différentes classes, à condition que cela respecte le nombre de personnes maximales qui peuvent être en contact avec un élève.

Et contrairement à l’Ontario, les professeurs des trois provinces devront se présenter à l’école, sauf si une preuve médicale leur permet de s’absenter.

Le docteur Paul Roumeliotis, du Bureau de santé de l’est de l’Ontario, ne s’inquiète pas de voir les professeurs rentrer et sortir des écoles.

« Si on prend toutes les précautions : le dépistage, le port du masque chez les enfants et une distanciation physique, et que les professeurs portent leur équipement, je crois que le retour à la normale ne pose pas un risque élevé, même si ce n’est pas zéro. »

Transport scolaire

En Ontario, le transport scolaire différera selon les conseils scolaires, indique le ministère de l’Éducation. Les grandes lignes stipulent toutefois un seul élève par banquette et, si la distanciation physique est impossible, le port du masque obligatoire. Les chauffeurs devront notamment effectuer du nettoyage au moins deux fois par jour, en plus de possiblement porter un couvre-visage. Il est toutefois encouragé de « recourir, dans la mesure du possible, à des formes actives de déplacement ou au transport privé ».

Les autres provinces utilisent sensiblement les mêmes mesures au niveau du nettoyage et de la taille des autobus. Par exemple, au Québec, 48 élèves au lieu d’une normale de 76, seront permis dans les autobus du primaire. Une zone de protection autour du chauffeur sera notamment obligatoire en Alberta.

« À mon avis, je mettrais les masques dans tous les autobus. Dans les transports en commun, à travers le Canada, on porte le masque. Pour moi, c’est le même contexte dans le transport scolaire », souligne le docteur Roumeliotis.

Si un élève a la COVID-19

Un enfant ontarien infecté sera retiré immédiatement de la classe et les autres parents en seront informés. Ceux ayant des symptômes devront rester à la maison tant et aussi longtemps qu’ils n’auront pas obtenu le résultat de leur test.

Les mesures dans cette situation sont quasiment identiques d’une province à l’autre. En Alberta, un cas de COVID-19 n’entraînera pas automatiquement la fermeture d’une école, mais les gens en contact étroit avec l’élève devront s’isoler pour 14 jours. Les deux autres provinces indiquent la même chose, précisant que la décision de fermer ou non reviendra au bureau de la santé publique de l’école concernée.

« Ça va prendre une évaluation au niveau des contacts et du risque. Il faut savoir quand cet enfant a été malade, avec qui il a été en contact, qui était le groupe le plus proche de lui, et alors on va évaluer les risques. S’il y a un enfant qui est malade, quelles précautions on doit prendre? Est-ce qu’il faut fermer la classe ou l’école? Les possibilités sont multiples, c’est du cas par cas », explique M. Roumeliotis.

Port du masque

L’Ontario est la seule province à obliger le port du masque à tout moment dans l’école. Le masque sera obligatoire pour le personnel scolaire, pour les élèves ontariens de la 4e à la 12e année dans les espaces fermés et il sera fortement recommandé pour les élèves plus jeunes, même si des exceptions pourront s’appliquer.

L’Alberta possède les mêmes règles, sauf qu’une fois assis en classe, les Albertains pourront, eux, enlever leur masque. Le Québec obligera le masque pour ceux de 10 ans et plus, et ce partout, sauf dans les salles de classe et à l’endroit désigné pour le dîner. De son côté, la Colombie-Britannique mettra des masques à disposition, sans toutefois en obliger le port.

« Je ne comprends pas comment on peut donner l’instruction d’enlever le masque en salle de classe, car c’est le masque qui va éviter qu’on propage le virus. Les enfants peuvent le transmettre à leur entourage ou à l’enseignant », se questionne le docteur Loemba.

Dépistage et rôle des parents

Le gouvernement ontarien demande aux parents de dépister chaque jour leurs enfants. Il est aussi demandé aux élèves de réduire les contacts en dehors de la cohorte pour éviter une transmission. Les parents seront interdits de visite ou de rentrer dans l’école, sauf en cas d’obligation. Ils devront également ne pas envoyer leurs enfants à l’école s’ils présentent des symptômes, ce qui s’appliquera aussi au personnel scolaire.

Les mêmes mesures de dépistage sont demandées aux parents et au personnel ailleurs. Au Québec, on demande aussi aux parents de fournir le masque. Comme c’est le cas en Ontario, les trois provinces demandent également aux parents avec des enfants ayant une situation médicale particulière de parler avec leur médecin de famille pour voir si un retour présentiel est possible.

Le docteur Loemba ne croit pas en l’efficacité du dépistage à la maison.

« Comment est-ce qu’on va faire pour ceux qui sont asymptomatiques? Car beaucoup d’enfants peuvent l’être et transmettre la maladie. Ça va donner une fausse sécurité. J’ai peur que si l’on dépiste de cette façon, on baisse la garde sur les autres mesures. »

Financement

Le gouvernement Ford a annoncé un financement de 309 millions de dollars pour la réouverture des écoles. Entre autres, 50 millions pour l’embauche d’infirmières, 50 millions pour l’achat de masques et de visières, ainsi que 75 millions pour le recrutement de concierges. Le ministère de l’Éducation a aussi annoncé une aide de 500 millions de dollars provenant directement des réserves des coffres des conseils scolaires dans le but d’améliorer la « distanciation physique et la qualité de l’air ».

Le Québec prévoit investir 150 millions de dollars, tandis que la Colombie-Britannique injectera 45,6 millions pour la mise en place de mesures sanitaires. L’Alberta a annoncé un financement de 120 millions de dollars pour les conseils scolaires, en plus de voir le mode de financement des écoles augmenter pour 2020-2021.

Doug Ford a souvent défendu son financement, dix fois plus bas que ce que le Parti libéral de l’Ontario proposait.

« Nous avons le meilleur plan, sans exception, parmi toutes les provinces. Toutes crient et crient qu’elles veulent le plan de l’Ontario! » avait défendu le premier ministre, la semaine dernière, en conférence de presse.