Santé mentale : les francophones encouragés par l’investissement provincial

La première ministre de l'Ontario, Kathleen Wynne Crédit image: Maxime Delaquis, Archives #ONfr

TORONTO – Le gouvernement ontarien annonce un investissement de 2,1 milliards de dollars sur quatre ans afin d’améliorer les services en santé mentale. Sur cette somme, environ 140 millions seront alloués spécifiquement aux « groupes prioritaires », comme les francophones.

JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE
jmorissette@tfo.org | @JFMorissette72

La première ministre de l’Ontario, Kathleen Wynne, a parlé en conférence de presse d’un investissement « historique ».

« Personne en Ontario ne devrait avoir de la difficulté à accéder aux services de santé mentale ou de lutte contre la toxicomanie, ou à y faire accéder ses proches », a lancé Mme Wynne en point de presse.

La première ministre a insisté que cette annonce était un « choix délibéré » afin de réduire les temps d’attente et d’améliorer l’accès aux soins.

Sur la somme annoncée de 140 millions de dollars aux groupes prioritaires, comme les francophones et les autochtones, une part de 116,6 millions provient du ministère des Services à l’enfance et à la jeunesse. Une somme de 24,3 millions sera octroyée par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée pour ces mêmes groupes. 

Le gouvernement espère qu’avec cette somme, chaque école secondaire de l’Ontario aura accès à des intervenants en santé mentale grâce au recrutement d’environ 400 nouveaux intervenants au cours des deux prochaines années.

La province créera également 15 nouveaux « Carrefours bien-être pour les jeunes » sur une période de quatre ans « afin d’améliorer l’accès aux services, de combler les lacunes critiques en matière de services pour les jeunes de 12 à 25 ans et d’améliorer la transition des jeunes vers les services destinés aux adultes ».

L’annonce arrive au lendemain du dévoilement du plan gouvernemental visant à rendre gratuits les médicaments sur ordonnance pour les personnes de 65 ans et plus. Un changement qui devrait prendre effet en août 2019.

Des besoins marquant pour les francophones

Gilles Marchildon, directeur général de Reflet Salvéo, un organisme chargé de conseiller les entités de planification de santé sur les services en santé, accueille favorablement cette annonce.

« Il faut quand même qu’il y ait une meilleure harmonisation dans le travail de chaque ministère en santé mentale », nuance-t-il cependant.

M. Marchildon rappelle que les besoins pour obtenir des soins en santé mentale pour les francophones sont criants et qu’en dehors des grands centres urbains, l’accès à des soins dans la langue de Champlain reste particulièrement problématique. Il espère que cette annonce se concrétise en actions pour augmenter cette offre de services.

Même son de cloche pour Sylvain Roy, président de l’Association des psychologues de l’Ontario et clinicien dans la région de Toronto.


« Il y a un véritable problème d’accès à des services de santé mentale parce qu’il n’y a pas les mêmes ressources dépendant où l’on se trouve en région. Il n’y a pas assez de professionnels francophones dans le système. » – Sylvain Roy


M. Roy espère d’ailleurs qu’avec cet investissement, il y aura plus d’embauches de professionnels francophones afin de réduire les listes d’attentes.

Afin de pallier les problèmes géographiques, M. Roy croit que les outils technologiques pourraient permettre aux patients francophones dans les régions plus éloignées de consulter un professionnel.

Des problèmes structurants, selon Gélinas

France Gélinas, députée dans la circonscription de Nickel Belt pour le Nouveau Parti démocratique (NPD) de l’Ontario, insiste qu’avant de faire des investissements de la sorte, il faut que le gouvernement instaure un système « robuste » qui prenne en compte les besoins des francophones.

« Nous sommes une population qui est plus à risque et qui a moins de services. Il faut changer le système de santé avant d’annoncer des fonds supplémentaires », a-t-elle lancé au micro d’#ONfr.

Mme Gélinas doute également des bonnes intentions du gouvernement.

« Ça fait des années qu’ils savent que le besoin est là et aujourd’hui, à soixante et quelques jours d’une élection, on fait des promesses en cas de réélection », a-t-elle déploré.

Mme Gélinas rappelle que le NPD a promis, s’il est élu, de créer un ministère de la Santé mentale et des dépendances.

La néo-démocrate et critique aux Affaires francophones pour son parti, France Gélinas. Archives #ONfr

Lisa MacLeod, députée du Parti progressiste-conservateur (Parti PC) de l’Ontario dans la circonscription de Nepean-Carleton, doute des intentions du gouvernement.

« Si Kathleen Wynne avait à coeur la santé mentale, elle n’aurait pas attendu 15 ans pour annoncer des investissements », a-t-elle lancé lors de la période de questions.

Selon elle, les Ontariens ne doivent pas croire cette promesse du gouvernement Wynne, qui traîne de l’arrière dans les sondages.

Dans la plateforme du Parti PC, la formation politique, maintenant dirigée par Doug Ford, promettait un investissement de 1,9 milliard de dollars sur 10 ans. Le Parti PC souhaitait ainsi égaler la somme promise par le gouvernement fédéral.


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