Sarnia : une désignation sous la Loi sur les services en français au bout des doigts

Vue aérienne de Sarnia, prochaine ville désignée sous la Loi sur les services en français. Source: Facebook Ville de Sarnia

SARNIA – Se procurer un permis de conduire auprès d’un agent de Service Ontario qui parle et comprend votre langue, aller en justice ou rouler sur l’autoroute avec des informations en français? Ce sera bientôt un acquis à Sarnia. Les francophones de la région sont en passe de voir le bout d’un long processus entamé en 2018 : la désignation sous la Loi sur les services en français (LSF) de la ville-frontière du Sud-Ouest ontarien. Mais il faudra attendre plusieurs années pour que le personnel bilingue soit effectivement en place.

Le ministère des Affaires francophones étudie actuellement les résultats issus de la consultation publique qui a pris fin voilà une semaine. Cette étape cruciale devrait déboucher sur une synthèse qui sera présentée à la ministre Caroline Mulroney, puis au comité intergouvernemental des lois et règlements.

La députée fédérale conservatrice de Sarnia-Lambton, Marylin Gladu, croit que l’annonce pourrait intervenir au cours de l’été. « Les francophones de Sarnia ont grand besoin de ces services, pas seulement dans les agences provinciales, mais aussi au niveau municipal. »

Elle pense que cette désignation va pousser la ville a, elle aussi, offrir plus de services en français et souhaite aussi des progrès dans l’accès aux tribunaux dans les deux langues officielles. « On voit qu’à Kingston (ville désignée en 2009) ils ont eu des services en français en justice, alors on doit avoir la même chose ici, à Sarnia. »

La députée fédérale de Sarnia Lambton et le maire de Sarnia, deux soutiens du projet. Source : Twitter

Près de 2 100 résidents ont le français pour première langue à Sarnia et sa région, soit près de 3 % de la population. C’est le plus haut pourcentage de francophones pour un grand centre urbain dans une région non désignée. À cela s’ajoutent 5 000 autres personnes qui en ont des notions. Les critères de désignation habituelle fixent la barre à 5 000 résidents de langue française dans les centres urbains.

« Ça aurait dû être fait depuis bien longtemps » – Mike Bradley, maire de Sarnia

Partisan du projet depuis ses débuts, le maire de Sarnia trouve tout de même le temps long. « J’ai soutenu la démarche des francophones au cours de remarques et dans une lettre adressée à la ministre responsable », indique à ONFR+ Mike Bradley. « Je ne sais pas ce que fera le gouvernement mais il devrait le faire maintenant. Ça aurait dû être fait depuis bien longtemps. »

Un effet boule de neige sur la francophonie locale?

Plusieurs résidents sont persuadés que cette désignation sous la LSF va produire toutes sortes d’effets positifs sur la communauté. Olivier Lacasse, animateur culturel au conseil scolaire Viamonde, pense qu’avec cette avancée les jeunes vont réaliser les bénéfices de conserver leur langue maternelle lorsqu’ils verront que cela ouvre des portes à des emplois bilingues chez eux.

« Aujourd’hui, à part dans les organismes et les écoles, les opportunités d’emploi en français ne sont pas nombreuses ici », confie-t-il. « La désignation va créer des opportunités et on sera gagnant en tant que francophones. »

Selon M. Lacasse, l’aboutissement du projet désormais à portée de main montre à quel point « quand on est uni, on peut rallier les francophones et solidifier notre communauté ».

Tanya Tamilio, présidente du Centre communautaire francophone de Sarnia-Lambton. Archives ONFR+

Un point de vue partagé par Patrice Dufour. Le président du Centre culturel Jolliet est très enthousiaste à l’idée d’avoir accès à des solutions en français. « Ça montre que le français devient une langue publique. On a déjà des écoles, des activités, alors si en plus on a des services gouvernementaux, ça va redonner vie à la francophonie et peut-être convaincre des gens de s’installer chez nous », estime-t-il, alors qu’un effort soutenu est mené ces dernières années pour favoriser l’attraction des immigrants de langue française dans la région.

Il anticipe aussi que les organismes francophones vont directement bénéficier du ce nouveau statut car il va leur ouvrir des portes à des subventions supplémentaires qui ont comme critère d’être dans une zone désignée.

Dans une région où le français gagne du terrain, ces services arrivent à point nommé, se satisfait Tanya Tamilio, la présidente du Centre communautaire francophone de Sarnia-Lambton. « Ça a pris trois ans, mais on y est arrivé. » Celle qui se bat depuis 2018 dans les méandres d’une démarche lourde et complexe exprime son soulagement et affirme que, sans le soutien des élus locaux, rien n’aurait été possible.

Trois ans de délai de mise en œuvre

Si nombre de résidents s’attendent désormais à une approbation au cours de l’été, le ministère des Affaires francophones ne s’aventure encore sur aucun échéancier.

Sans préjuger des résultats de la consultation publique, sa porte-parole, Natasha Tremblay, glisse que « la désignation de Sarnia bénéficie d’un grand soutien de la part de la communauté et de plusieurs parties prenantes. Nous reconnaissons à quel point il est important pour les francophones d’avoir accès à des services de qualité en français afin de pouvoir contribuer à l’essor social, culturel et économique de la province ».

Une fois la demande approuvée, Sarnia deviendra la 27e zone désignée après Markham (2018).

Un comité conjoint entre le gouvernement de l’Ontario et la communauté sera mis sur pied afin de superviser la mise en œuvre des exigences de la désignation et déterminer le type de services offerts : personnel bilingue dans des agences Service Ontario, des succursales de la LCBO, au sein de la police provinciale et ou encore au palais de justice.

Ces services ne seraient toutefois pas opérationnels dès l’obtention officielle de la désignation, mais mettre trois ans à se concrétiser, le temps de trouver les ressources humaines bilingues adéquates. Un délai porté à huit ans pour la signalisation bilingue sur l’autoroute entre Sarnia et London.

À la clé : de potentiels services en français dans des agences Service Ontario. Archives ONFR+