Sciences infirmières : 30 % de réussite à l’examen en français

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OTTAWA – La tendance se confirme pour l’examen d’accréditation des étudiants en sciences infirmières. Les francophones sont de plus en plus nombreux à délaisser l’examen en français et les résultats de ceux qui le tentent sont très inférieurs à la moyenne nationale. Mais le Nouveau-Brunswick pourrait permettre d’inverser la tendance.

Le taux de réussite à l’examen d’accréditation des étudiants en sciences infirmières, en 2017, a été de 29,7 % pour les candidats ayant fait cette première tentative en français, selon le rapport publié par le Conseil canadien des organismes de réglementation de la profession infirmière (CCORPI). Des résultats qui continuent de baisser et qui sont bien loin du 82,1 % de réussite au niveau national.

Depuis la mise en place de ce nouvel examen, venu des États-Unis, en 2015, le taux de réussite à l’examen en français était de 26,9 % en 2015 et de 35,2 % en 2016. Son instauration a suscité de nombreuses critiques, surtout du côté des étudiants francophones.

Problèmes de traduction de l’examen, test peu adapté à la réalité canadienne, absence de matériel pédagogique en français… La décision du CCORPI de changer l’examen a suscité de nombreuses frustrations.

Malgré les mauvais résultats en français, l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario (OIIO) se dit confiante de la traduction du test, s’appuyant sur une évaluation faite par un traducteur professionnel indépendant en décembre 2015.

« L’examen NCLEX [National Council Licensing Examination] satisfait nos besoins pour nous assurer que les nouveaux diplômés peuvent pratiquer de manière indépendante et sécuritaire. Nous ne prévoyons pas de changer l’examen », a répondu l’organisme, par courriel, à #ONfr.

De moins en moins de candidats en français

Mais outre les problèmes de traduction, plusieurs étudiants dénoncent le manque d’accès à du matériel pédagogique en français pour se préparer à cet examen obligatoire pour pouvoir exercer leur métier.

Résultat : alors qu’ils étaient 145 étudiants à tenter leur chance à l’examen en français en 2015, ils n’étaient plus que 64 en 2017.

Il y a un an déjà, une étudiante franco-ontarienne du nord de la province avait expliqué son dilemme à #ONfr.

« Après quatre années à étudier en français, j’ai choisi de passer mon examen en anglais. Les meilleures ressources pédagogiques étaient seulement dans cette langue, ça me paraissait plus sûr. (…) C’est sûr que si les ressources avaient été disponibles en français, j’aurais passé le test dans ma langue maternelle. »

L’espoir venu du Nouveau-Brunswick

Hasard du calendrier, la publication de ces mauvais résultats intervient au lendemain d’un autre rapport très attendu. À la suite de deux plaintes d’étudiants, la commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, Katherine d’Entremont a blâmé l’Association des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick (AIINB) pour ne pas avoir tenu compte de la nécessité d’avoir des outils de préparation à l’examen en français avant l’adoption du nouvel examen.

Dans cette province, le passage de l’ancien au nouvel examen s’est traduit par une baisse considérable des taux de réussite. À l’Université de Moncton, ils sont passés de 91 % en 2014 à 32 % en 2015. En 2017, le taux de réussite à la première tentative au NCLEX pour les candidats de l’Université de Moncton s’élevait à 40 %.

Et comme dans le reste du Canada, sur 96 candidats francophones, 51 ont choisi que leur première tentative se ferait en anglais.

Et même si des efforts ont été entrepris pour offrir des ressources pédagogiques en français par un regroupement des institutions qui offrent ce programme dans la langue de Molière [l’Université Laurentienne, l’Université d’Ottawa, l’Université de Moncton, l’Université de Saint-Boniface et le Campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta], celles-ci demeurent inférieures à celles offertes en anglais, juge la commissaire.

« Les candidats francophones ne sont pas sur un pied d’égalité avec les candidats anglophones », écrit-elle dans sa conclusion, estimant que l’AIINB a enfreint la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick.

Si la cause demeure provinciale, elle pourrait avoir un impact dans tout le Canada, estime l’avocat acadien Michel Doucet.

« Ça peut avoir un impact indirect puisque l’examen en question est le même en Ontario, au Manitoba et en Alberta. Si les recommandations de la commissaire sont suivies ici et que l’Association des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick fait ce qu’il faut pour changer les choses, ça peut sensibiliser les associations des autres provinces et permettre de développer des ressources pédagogiques en français qui seront ensuite accessibles par tous les étudiants francophones, partout au Canada. »

M. Doucet rappelle toutefois que les recommandations de la commissaire n’ont aucun effet coercitif.

« Mais si les étudiants estiment que leurs droits ont été violés et que des mesures adéquates n’ont pas été prises, ils pourraient très bien intenter une poursuite devant les tribunaux. »