Un coup de pouce pour l’alphabétisation en français 

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OTTAWA – Menacé de disparition, le Réseau pour le développement de l’alphabétisme et des compétences (RESDAC) a reçu l’appui des députés fédéraux du comité permanent des langues officielles qui recommandent plusieurs mesures pour soutenir le secteur.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Parmi les sept mesures proposées dans le rapport L’alphabétisation et le développement des compétences des adultes : une composante essentielle du continuum en éducation des communautés de langue officielle en situation minoritaire, dévoilé le jeudi 19 avril, les députés souhaitent que le dossier du développement de l’alphabétisme et des compétences essentielles des adultes soit « reconnu comme une partie intégrante du continuum en éducation et bénéficie des ressources adéquates ».

« L’alphabétisation, c’est primordial! Et on veut mettre l’accent sur le fait que c’est plus difficile actuellement en milieu minoritaire », explique le président du comité, le député libéral Denis Paradis.

Le comité souhaite également que les ententes entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires en matière d’alphabétisation contiennent des clauses linguistiques claires et fassent l’objet d’une meilleure reddition de compte.

Au pupitre, le président du comité permanent des langues officielles, le député libéral Denis Paradis. Crédit image : Benjamin Vachet

« On veut être certain que l’argent qui est mis en alphabétisation dans les provinces s’en aille vraiment à l’alphabétisation. On pense aussi qu’il faut revoir les termes dans les ententes. « Il serait souhaitable », « il faut convenir de prendre en considération »… Ce ne sont pas des termes assez forts à notre goût. Il faut que ce soit plus ferme. »

Vision plus large

Le comité propose également d’élargir la portée des programmes d’appui à l’alphabétisation de façon à inclure la littératie familiale et la littératie communautaire, au lieu de ne privilégier que l’accès à l’emploi, comme cela avait pu être le cas sous le gouvernement conservateur.

« On s’est beaucoup concentré sur l’alphabétisation pour permettre l’accès à l’emploi. C’est important, mais l’alphabétisation est aussi importante dans toutes les sphères de la vie. Si quelqu’un n’est pas capable de lire internet, le journal… Ce n’est pas fonctionnel dans sa vie de tous les jours. »

Le porte-parole aux langues officielles pour le Parti Conservateur du Canada (PCC), Alupa Clarke, se dit très à l’aise avec cette recommandation.

« Je pense que lorsque nous nous sommes concentrés sur l’accès à l’emploi quand nous étions au pouvoir, ce n’était pas mal intentionné. On voulait d’abord et avant tout s’assurer que les gens puissent avoir un emploi. C’est donc important qu’on continue de mettre ça en priorité, mais ce n’est pas fou non plus de dire qu’il faut aussi élargir. L’alphabétisation est un prérequis pour toute personne afin de pouvoir évoluer convenablement dans la vie et s’épanouir dans sa vie. »

Raison pour laquelle le comité recommande aussi au gouvernement d’étudier la possibilité de transférer le dossier du ministère de l’Emploi du Développement social au ministère de la Famille, des Enfants et du Développement social.

L’influence du RESDAC

Comme l’explique le député néo-démocrate François Choquette, l’idée de cette étude est née après le cri du cœur public lancé par le RESDAC.

Faute de moyens, l’organisme, qui représente depuis 1991 les groupes et associations francophones d’alphabétisation au Canada, n’a plus aucun employé depuis quelques mois et compte sur ses bénévoles à travers le pays pour survivre.

« En creusant, on s’est rendu compte que la situation du RESDAC était la même du côté anglophone au Québec [Literacy Quebec]. Il n’y a plus d’organisme qui chapeaute cette aide au développement de l’alphabétisation. J’espère qu’on va voir des améliorations rapidement. »


« Je pense que les députés ont très bien cerné le problème fondamental qui a été de centraliser l’alphabétisation uniquement sur l’emploi, alors que cela est également important pour toute la vitalité de nos communautés. » – Donald Desroches, président REDAC


Le président du RESDAC, Donald Desorches, se dit très satisfait des recommandations du comité, bien que conscient qu’il faudra attendre de voir la réponse du gouvernement.

« On ne s’attendait pas à des recommandations aussi musclées. C’est très prometteur et nous appuyons la direction prise par le comité. »

Des fonds dans le plan d’action

M. Paradis rappelle que des sommes ont été annoncées dans le Plan d’action pour les langues officielles.

« Il y a déjà 7,5 millions de dollars sur cinq ans qui sont consacrés à l’alphabétisation et à l’acquisition des compétences essentielles dans les communautés, auxquels vont s’ajouter 4,5 millions de dollars annoncés dans le nouveau Plan d’action. »

Il n’en demeure pas moins que rien ne garantit encore qu’un organisme comme le RESDAC en bénéficiera, ni ne verra son financement de base rétabli.

« On doit rencontrer la ministre [du Patrimoine canadien] Mélanie Joly pour lui faire part de nos recommandations. Ça fera partie de nos discussions », promet le député libéral.


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