Michel Bénac, auteur-compositeur franco-ontarien iconique, la moitié mordante du groupe LGS et pionnier du technotrad, prend une pause dans sa tournée d’adieu pour s’entretenir avec ONfr+.
Il se remémore, pour nous, 20 ans de carrière, de ses débuts avec Bobby Lalonde jusqu’à sa rencontre avec Jean-Philippe Goulet, en passant par ses premiers festivals en sol franco-ontarien, pour en arriver finalement à cette performance récente à Muskoka Woods, captée par TFO, le 13 mai 2019. Il en profite d’ailleurs pour glisser un dernier mot de remerciement bien mérité à tous les fans qui l’ont supporté pendant deux glorieuses décennies.
MICHEL BÉNAC : Narrateur
Je sais pas si les gens
vont continuer à écouter
notre musique une fois
qu’on aura rangé le violon.
J’espère que oui.
ONFR+ Culture
LGS
Différents tests de son et d’éclairage se manifestent dans la salle du bar. MICHEL BÉNAC teste un micro sur la scène. MICHEL BÉNAC prend ensuite la parole, assis à une table.
MICHEL BÉNAC :
On n’est pas trad. On n’est pas
pop. On est un mélange des deux.
Ça a été très difficile pour
nous autres, au début de notre
carrière à cause de ça.
So,
nos premières fois sur la scène,
moi puis Bobby Lalonde, notre
chimie était pas tout à fait
là encore. On s’entendait
super bien, mais on n’avait
pas fait de shows ensemble.
Je viens d’un
background
où est-ce que, tu sais, c’était
la musique hip-hop, la musique
américaine, très, comme,
grandiose. Lui, il était un
country guy typique. Il y avait
bien du travail à faire.
Tout au long de l’entrevue, on présente en alternance des images d’archives d’un spectacle présenté le 13 mai 2019, devant les adolescents du camp Muskoka Woods. MICHEL BÉNAC est en coulisses, se préparant à entrer sur scène.
MICHEL BÉNAC :
En 2001, pour nous autres, c’est
là que ça a débloqué. Il y a eu
un effet de surprise après avoir
fait le Festival du voyageur
au Manitoba. C’était la première
fois qu’on se lançait dans
la francophonie canadienne.
Parce qu’on avait juste fait
des genres de spectacles promos
à se péter la gueule au Québec,
tu sais. Puis, les gens
nous connaissaient pas là-bas,
mais la dame qui faisait
la programmation du festival,
Roselle Turenne, avait pris
un risque avec nous autres.
Elle nous avait vus,
elle avait trippé puis
elle a dit :
« Let’s go ! »
MICHEL BÉNAC et ses musiciens sont présentés à la foule d’adolescents. MICHEL BÉNAC accorde sa guitare.
VOIX ANNONCEUR :
Voici Le groupe Swing.
MICHEL BÉNAC :
On est arrivés là, on a fait
le show.
On l’a fait comme on le
« feelait ». C’est la jeunesse
qui a embarqué en premier,
puis ils ont trippé avec
nous autres.
MICHEL BÉNAC et son groupe sont sur scène, devant une foule d’adolescents en liesse.
MICHEL BÉNAC : Narrateur
Puis là, tu l’as
vu, là. Ils se sont levés.
Ils se sont mis à danser.
MICHEL BÉNAC :
Chantant
Main en haut main en l’air
Stompez toute
vos pieds par terre
C’est la paix
C’est la guerre
C’est la folie temporaire
Main en haut main en l’air
Stompez toute
vos pieds par terre
On fait l’amour
on fait la guerre
On va brûler en enfer.
L’entrevue avec MICHEL BÉNAC se poursuit.
MICHEL BÉNAC :
Au festival La Nuit sur
l’étang à Sudbury où est-ce que
là, moi, c’est une des premières
fois que je m’en viens
en Ontario français faire
un show,
puis je vais toujours
me souvenir de ce show-là,
parce
que dès la première note de la
première toune, le monde était
debout.
MICHEL BÉNAC fait danser et chanter la foule d’adolescents devant lui.
MICHEL BÉNAC : Narrateur
Tu avais à peu près 5000
personnes après tripper. Puis
moi, je comprenais pas ce qui
se passait. Je pensais que
tout d’un coup, ils s’étaient
trompés, puis qu’ils pensaient
qu’on était un autre groupe,
jusqu’à tant que je les voie
chanter les paroles
de nos tounes.
Là, j’ai fait :
/langue_etrangere« Oh yeah ! »langue_etrangere=EN
MICHEL BÉNAC se déplace sur scène, en empruntant les mouvements d’un chanteur hip-hop.
MICHEL BÉNAC :
Chantant
Ils disent qui y a pas
de culture en Ontario
Wo Wo pompon on a plein d’héros
Hulk Hogan G.I. Joe
Arnold Swarz y’est bin gros
Y me font chier
avec leurs gros ego.
MICHEL BÉNAC et ses musiciens s’amusent sur scène, devant un public conquis.
MICHEL BÉNAC : Narrateur
D’ailleurs, c’est ce show
-là qui m’a donné ma fierté
franco-ontarienne.
Et c’est là
que ça a parti, puis en 2001,
on a fait 165 spectacles. Ça a
été extraordinaire. À la fin
de cette tournée-là, c’est
normal puis c’est souvent
ce qui arrive, c’est que Bobby,
tu sais, il a dû m’annoncer
qu’il partait. Donc, avec
la première dose de succès
est venue la première peur
de la fin de ce projet-là.
On a fait quelques shows
où on a eu une transition entre
Bobby Lalonde puis Jean-Philippe
Goulet. Jean-Philippe est rentré
dans la game comme un vrai.
Quand on s’est retrouvé dans
de gros festivals à gauche
puis à droite. Écoute,
quand tu regardes avec un peu
de recul, tu fais : « Wow !
On en a fait des affaires. »
MICHEL BÉNAC et son groupe font danser les jeunes.
MICHEL BÉNAC :
Chantant
Peu importe le détour
le froid qui nous entoure.
Prends ma main pour toujours
Je peux pas te résister.
Quand tu me touches
Je touche plus à terre.
MICHEL BÉNAC et son groupe performent devant la foule.
MICHEL BÉNAC : Narrateur
À travers les années, puis là,
ça va faire… C’est 20 ans.
On a joué dans toutes les
provinces, tous les territoires
sauf Terre-Neuve, puis
on a vu des gens formidables
qui vivaient en situation
minoritaire, puis ils le
vivaient de leur meilleure
façon.
L’entrevue avec MICHEL BÉNAC se poursuit.
MICHEL BÉNAC :
Les gens t’accueillent.
Ils sont contents de te voir,
donc tu as accès à des choses
que j’aurais pas jamais imaginé
avoir la chance de vivre ça
avec la musique que je faisais,
puis de marquer des jeunes
qui viennent nous voir après
des shows puis ils disent :
Prenant un accent anglais
« Hé, monsieur, ça, c’est le premier
CD en français que j’achète. »
MICHEL BÉNAC chante tout en jouant de la guitare.
MICHEL BÉNAC :
Chantant
Quand tout va tomber
Et tout va casser
Je me dirais tout
va bien aller.
Je lève les mains
Du soir au matin
Et je me dis tout va être OK.
L’entrevue avec MICHEL BÉNAC se poursuit.
MICHEL BÉNAC :
Avec l’ère numérique qui
arrive, ça a vraiment changé la
game.
Je veux dire, en 2001, on
vendait en moyenne 30 albums à
20$ après chaque spectacle. Ça,
pour un artiste, ça représente
énormément de potentiel.
Ce que je vois maintenant, c’est
les artistes émergents qui se
plantent plus vite, s’éteignent
plus vite.
[Un danseur fait des mouvements de danse de style breakdance sur scène. MICHEL BÉNAC prend ensuite un bain de foule, parmi les jeunes.]
MICHEL BÉNAC : Narrateur
Puis la grande
raison, c’est parce que
les spectacles, il y en a pas
beaucoup quand tu es émergent.
Tu te fais pas payer beaucoup.
Puis après ça, tu espères vivre
avec tes CD puis tes t-shirts
que, maintenant, plus personne
n’achète des albums. On voit
maintenant que la culture
franco-ontarienne et franco
hors Canada ont beaucoup
plus de difficultés dans
l’état de l’industrie
de la musique actuelle.
Une image numérisée montrant la page d’accueil du site internet de la boîte de production « LaFab Musique » est présentée. On présente des photos des différents artistes représentés par la boîte.
MICHEL BÉNAC : Narrateur
Moi, j’ai parti une boîte de
production en 2010. Une boîte de
production parce que je voyais
des artistes franco-ontariens
disparaître, puis je voulais
faire ma part pour assurer
une survie, souhaitant pouvoir
partager mes contacts puis
mes expériences en musique
aux nouveaux artistes
à venir chez LaFab Musique.
MICHEL BÉNAC est sur scène, les bras en l’air. La foule de jeunes l’imite.
MICHEL BÉNAC :
S’adressant à la foule
Tout le monde ensemble.
J’ai besoin de votre énergie.
L’entrevue avec MICHEL BÉNAC se poursuit.
MICHEL BÉNAC :
On a eu des belles aventures,
hein. Beaucoup, beaucoup
d’excellents spectacles.
Tu sais, ça allait très bien,
mais à un moment donné, tu fais
le tour de ton inventaire de
carrière puis tu te dis : Eille,
écoute, ça fait longtemps qu’on
fait ça. On voulait pas être un
groupe qui, à un moment donné,
fait juste disparaître. On va
décider quand on va sortir.
J’ai fait : « Oui. » Tu sais
quoi ? Finir à 20 ans, c’est
respectable. Il y en a pas
beaucoup de groupes qui peuvent
dire qu’ils ont eu 20 ans de
carrière. On veut réellement
tourner la page après avoir fait
notre dernière tournée pour
avoir la chance de partager tous
les beaux moments que les gens
ont eus avec nous autres,
puis qu’on a eus avec eux.
MICHEL BÉNAC s’adresse à la foule de jeunes devant la scène.
MICHEL BÉNAC :
On va vous faire notre chanson
qui, pour la première fois
dans notre carrière, s’est
rendue jusqu’au numéro 1.
Chantant
On compte les heures
à tous les jours.
L’entrevue avec MICHEL BÉNAC se poursuit.
MICHEL BÉNAC :
Imprévue, on se retrouve dans
une situation où est-ce qu’on a
le plus gros succès de notre
carrière. Notre chanson
« On perd la tête » s’est mise à monter sur
les palmarès. Quelque chose qui
était complètement imprévisible
pour moi puis les gens chez
« LaFab Musique ». On n’a pas vu ça
venir. Je pense qu’on regarde ça
en se disant, tu sais,
c’est le plus beau cadeau
qu’on n’aurait pu jamais avoir.
MICHEL BÉNAC et son groupe se déplacent sur scène avec aisance, au grand plaisir des jeunes.
MICHEL BÉNAC :
Chantant
Il y a rien
qui nous arrête.
Oh on va faire la fête
Ce soir on perd la tête.
MICHEL BÉNAC salue la foule de jeunes.
De retour au moment présent. MICHEL BÉNAC est seul sur la scène de spectacle du bar, chantant dans un micro.
MICHEL BÉNAC : Narrateur
Je sais qu’il y a des gens
aujourd’hui qui nous disent
qu’ils écoutent encore
« Au nom du père et du fils et du set
carré », une chanson qu’on a
sortie en 2004. Puis, pour eux
autres, ça sera toujours leur
chanson de LGS.
L’entrevue avec MICHEL BÉNAC se poursuit.
MICHEL BÉNAC :
C’est le plus
grand compliment qu’on peut
avoir comme artiste, de voir
que notre musique, malgré l’âge
que tu as, elle reste
avec toi puis tu la partages
avec ton entourage pour
des années et des années.
J’aimerais bien ça dire
qu’on sera pas des disparus
dans un tiroir quelque part,
puis c’est le souhait
de tous les musiciens.
On montre des images d’archives montrant MICHEL BÉNAC sur scène, s’approchant de la foule de jeunes du camp Muskoka Woods. MICHEL BÉNAC serre plusieurs mains.
MICHEL BÉNAC : Narrateur
On a osé faire quelque chose
très différent, puis il y a
des gens qui ont connecté puis
qui ont compris.
De retour au moment présent. MICHEL BÉNAC est sur la scène du bar, devant une salle vide, se penchant vers l’avant pour faire ses adieux.
MICHEL BÉNAC : Narrateur
S’adressant au public de l’émission
Puis merci de
nous avoir permis de vivre ça.
Je suis très fier de dire
que grâce à vous autres, tous
les gens qui nous appuient, puis
qui nous suivent, on a pu vivre
un 20 ans extraordinaire.
Générique de fermeture