Un éventail de choix à Orléans pour remplacer Bob Monette

Les affiches électorales dans Orléans. Crédit image: Sébastien Pierroz

ORLÉANS – Un vent de changement souffle sur le quartier Orléans intégré à la municipalité d’Ottawa. La retraite de Bob Monette, conseiller municipal depuis 2006, ouvre la voie à 17 aspirants. Un record dans ce quartier où vivent plus de 30 % de francophones.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

Or, ce pourcentage de 30 % représente beaucoup, surtout quand on sait que plus de 128 000 résidents de la Ville d’Ottawa demeurent à Orléans. En chiffres absolus, c’est sensiblement autant qu’à Sudbury.

« Ville dortoir », « Ville banlieue », les résidents d’Orléans connaissent ces adages depuis bon nombres d’années. Mais la réputation serait presque légitime. « Il n’y a pas beaucoup d’emplois, ici, à Orléans. La plupart du monde doit prendre la voiture pour Ottawa pour aller travailler. On nous dit qu’il devrait y avoir le train léger ici, mais ça ne sera pas avant 2031 », confie un résident préférant rester anonyme.

D’autres sont plus loquaces devant #ONfr. Gilles Morin s’apprête à voter par anticipation, même s’il ne sait pas encore qui il choisira parmi la liste des 17. « On n’a pas entendu qu’est-ce que les candidats veulent faire, quels sont leurs objectifs, qu’est-ce qu’ils veulent à Orléans (…) Bob Monette a fait un bon travail, il était disponible. C’est une qualité que je recherche. »

Quatre mois après les élections provinciales, cette échéance municipale n’intéresse pas tout le monde. Résidente d’Orléans depuis quelques années, Gaëlle Nkuipou n’ira probablement pas voter. « Hormis le maire Jim Watson, je ne connais pas les autres candidats, et j’avoue avoir du mal à comprendre les enjeux des élections municipales. À quoi ça sert vraiment? Je pense que c’est à moi de mieux m’y intéresser. »

Diego Elizondo : l’implication d’abord, les pancartes après

Convaincre les 62 % de résidents d’Ottawa qui ne se sont pas déplacés lors des dernières élections en 2014, c’est bien entendu le but des candidats. À commencer par Diego Elizondo. À 25 ans, ce Franco-Ontarien engagé vit sa première élection en tant que prétendant. « Il y a beaucoup de gens qui ne vont pas aller voter, et beaucoup de candidats. Le gagnant aura peut-être juste 2 000 votes », affirme-t-il le nez plongé dans la liste des résidents.

« Je veux relancer Orléans et le propulser sur un renouveau. Le 160e d’Orléans arrive en 2020, c’est une opportunité en or pour accroître notre économie locale, du fait des gros problèmes en termes d’emplois. La construction du nouveau Mouvement d’implication francophone d’Orléans (MIFO) qui commencera bientôt sera aussi l’un de mes objectifs. »

Pour cette première campagne, M. Elizondo a décidé de se passer des fameuses pancartes électorales qui fleurissent le long des routes. « Je vois ce qui défile dans l’actualité, on abolit les sacs en plastique, les pailles en plastique, et je me suis dit que je devais faire ma part pour l’environnement. En tant que plus jeune candidat, je sais que ma génération a une conscience écologique assez forte. »

L’atout de la jeunesse n’est d’ailleurs pas négligeable à ses yeux. « Je me distingue de par mon implication franco-ontarienne et par le fait que je sois le plus jeune. J’ai des idées et des façons de faire qui sont peut-être moins en concordance avec l’establishment, mais qui rejoignent plus les gens sur le terrain. »

Mireille Brownhill : revitalisation et voies pour les cyclistes

M. Elizondo n’est pas le seul francophone à cogner aux portes depuis quelques semaines. Mireille Brownhill relève elle aussi le défi. Cette mère de trois enfants, résidente d’Orléans depuis plus de 20 ans, veut avant tout revitaliser le boulevard St-Joseph, mais aussi des routes et des parcs sécuritaires. Et cela passe par l’ajout de voies réservées aux vélos.

« C’est aussi une manière de mettre l’emphase sur l’environnement. Personnellement, j’aime circuler à vélo. J’ai l’intention d’améliorer l’infrastructure pour les cyclistes afin d’encourager les gens à prendre leur vélo plus souvent. »

Si elle succède à Bob Monette, Mme Brownhill entend plus « recueillir des informations » et « consulter » la population. « J’ai compris que la Ville avait, par exemple, effectué des changements au parcours d’autobus sans que personne n’ait été consulté. »

Seule femme francophone parmi les listes des 17 prétendants, Mme Brownhill entend bien jouer cette carte. « Il faut se rendre compte qu’il n’y a que quatre conseillères municipales sur les 24 élus de la Ville d’Ottawa. Je fais face à beaucoup de commentaires sexistes quand je cogne aux portes. On me dit qu’on va voter pour moi car je serais plus jolie en vrai qu’en photo, on me demande quel est l’emploi de mon conjoint. Ce n’est pas facile. »

La carte de la jeunesse et de la féminité pour Catherine Kitts

Autre candidate à surveiller au cours de cette élection : Catherine Kitts. À 30 ans, l’ancienne journaliste du Orléans Star, habituée jusque-là à interroger les politiciens locaux, a décidé de franchir la clôture.

« Du fait de cette expérience de journaliste pendant plusieurs années, j’ai une réelle connaissance des besoins de la communauté. Peu de gens ont dépensé du temps comme moi pour connaître et enquêter sur ce qui se passe à Orléans. »

Mme Kitts affiche sa confiance en vue du 22 octobre. « Quand je cogne aux portes, les résidents me disent qu’ils voteront pour moi ou bien, que je suis dans leur top 3. Tout cela est très encourageant. »

La candidate Catherine Kitts. Source Facebook

Actuellement employée à l’Université Carleton, Mme Kitts veut faire de l’emploi sa priorité numéro 1 au cours des quatre prochaines années. « À Orléans, nous avons beaucoup de choses, sauf pour le travail. C’est pour cela que j’envisage de créer dans le secteur Est un centre d’emploi à usage mixte et axé sur le transport en commun. »

Consciente elle-aussi du « manque de femmes », à la table des élus municipaux, la candidate veut aussi devenir une voix pour la jeunesse. « Orléans a de plus en plus de jeunes, et c’est normal qu’ils soient représentés. La démographie change et de plus en plus de jeunes familles viennent s’installer ici. »

Capable de s’exprimer assez bien en français, Mme Kitts dont la mère est francophone reconnaît que la campagne lui a permis d’améliorer davantage sa maîtrise de la langue.

Matthew Luloff veut miser sur l’expérience

Et si c’était finalement Matthew Luloff qui tirait son épingle du jeu? Le conseiller du quartier Cumberland, Stephen Blais, lui a en tout cas apporté publiquement son soutien il y a quelques jours. En bordure des routes d’Orléans, ses pancartes deviennent de plus en plus visibles.

« J’ai dix ans d’expérience en politique », affirme cet ancien vétéran de la guerre en Afghanistan, qui aussi a aussi travaillé au ministère de la Défense, et « à d’autres niveaux de gouvernement ».

La « construction » apparaît bel et bien comme un leitmotiv pour le candidat qui promet l’élargissement de l’autoroute 174 ou encore, plus d’infrastructures pour le transport en commun. « Nous n’avons actuellement qu’une à deux routes pour nous rendre à Ottawa. »

Autre volonté du candidat : celle d’agrandir les parcobus. « Il y en a un à la Place d’Orléans, mais à 7 h du matin, il est déjà plein. Avec l’arrivée du train léger, ça ne marchera pas. Il faudrait peut-être l’agrandir sur cinq étages. »

Ancien élève de l’École secondaire St-Matthew, M. Luloff s’exprime plutôt bien en français. « On aurait besoin de plus de culture française, car c’est notre patrimoine. Nous avons, par exemple, besoin d’un édifice plus large pour le MIFO. »

À noter qu’#ONfr a tenté de rejoindre plusieurs autres candidats qui n’ont pas retourné nos demandes d’entrevues.