Une course à trois pour la circonscription de Kingston et les Îles

L'hôtel de ville de Kingston. Source: Wikipedia Commons

[ONVote2018]

KINGSTON – La circonscription de Kingston et les Îles est détenue par les libéraux sans interruption depuis 1995, mais selon les projections électorales, ce château-fort libéral pourrait bien changer de couleur le soir du 7 juin. Portrait d’une course à trois.

JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE
jmorissette@tfo.org | @JFMorissette72

En fait, plus la campagne avance, plus la course se resserre entre Sophie Kiwala (PLO), Ian Arthur (NPD) et Gary Bennett (Parti PC).

Selon un sondage de la firme Mainstreet Research, le Nouveau Parti démocratique (NPD) obtiendrait 36 % des voix si une élection avait lieu aujourd’hui, alors que le Parti libéral de l’Ontario (PLO) en récolterait 28 %. Le Parti progressiste-conservateur (Parti PC) aurait pour sa part 25 % du vote.

Est-ce que le NPD pourrait faire une percée dans cette circonscription de l’Est ontarien? Ian Arthur le croit.

« Le NPD a un momentum actuellement aux quatre coins de la province et on le ressent bien à Kingston. Les Ontariens embarquent avec notre message positif », lance-t-il en entrevue avec #ONfr.

Ian Arthur, qui n’est pas un politicien d’expérience mais un entrepreneur local, estime pouvoir répondre au besoin de la communauté de Kingston avec la plateforme du NPD.

« C’est une élection qui va apporter du changement et il est maintenant clair que les libéraux ne formeront pas le prochain gouvernement. Les Ontariens devront choisir entre les coupures de Doug Ford et le plan compréhensif d’Andrea Horwath », plaide le néo-démocrate.

Sophie Kiwala est devenue députée libérale de la circonscription en 2014. Malgré les sondages défavorables, elle est encore confiante de pouvoir rester en poste le soir du 7 juin.


« Rien n’est certain en politique (…). C’est impossible pour le moment de dire avec certitude l’issue de cette élection. » – Sophie Kiwala


Bien qu’elle concède qu’un vent de changement pourrait souffler sur la province, Mme Kiwala souhaite poursuivre le travail qu’elle a commencé depuis son élection, il y a quatre ans. Mme Kiwala estime que les électeurs de Kingston ne devraient pas écouter les « slogans creux » du chef du Parti PC, Doug Ford.

« Regardez notre bilan, ce que nous avons accompli dans les quatre dernières années en tant que gouvernement, et regardez les alternatives qui sont proposées », lance-t-elle.

Face aux deux candidats se trouvent Gary Bennett, représentant le Parti PC de l’Ontario. M. Bennett a été maire de Kingston entre 1994 et 2000. Avant cela, il a été conseiller municipal entre 1998 et 1994. Dans cette élection, il espère que les résidents de Kingston iront plus loin que la couleur politique.

« Je suis un homme d’affaires avec de l’expérience et je connais bien la communauté grâce à mon implication au fil des années », plaide-t-il.

Tout comme son adversaire néo-démocrate, il prône le changement et croit qu’il existe un terreau fertile pour son parti à Kingston.

Le centre-ville de Kingston. Crédit image Jean-François Morissette

Une démographie particulière

Stéphanie Chouinard, politologue au Collège militaire royal du Canada de Kingston, note qu’il existe une démographie particulière dans cette circonscription, notamment à cause des centres d’incarcération et de l’Université Queen’s.

Elle estime également que la circonscription est particulière considérant sa tendance de centre gauche sur l’échiquier politique.

« Quand on regarde les circonscriptions aux alentours, ce sont tous des terreaux fertiles pour les conservateurs, mais depuis les années Rae, Kingston se positionne à gauche sur l’échiquier politique », constate la politologue.

Une population vieillissante

Selon le recensement de 2016, près de 20 % de la population de Kingston est âgée de 65 ans et plus. Les services offerts aux personnes âgées sont donc un enjeu clé pour cette circonscription de près de 120 000 habitants. La circonscription compte également trois grands hôpitaux.

« La population vieillit partout en Ontario, y compris à Kingston. Il faut pouvoir offrir de meilleures conditions dans les foyers de soins », assure M. Arthur.

Afin de payer les promesses du NPD d’ajouter quelque 15 000 lits dans les foyers de soins, Ian Arthur souligne que la formation politique d’Andrea Horwath s’est engagée à augmenter les impôts pour les plus riches.


« L’économie se porte bien en Ontario et à Kingston, et il est temps que ceux qui le peuvent participent à payer ses programmes. » – Ian Arthur


À savoir si le NPD allait dépenser plus que les autres formations politiques, M. Arthur a plutôt pointé du doigt les libéraux.

« Depuis 15 ans, le gouvernement dépense beaucoup d’argent dans des programmes dont nous n’avons pas besoin », a-t-il rétorqué.

Ian Arthur, candidat du Nouveau Parti démocratique (NPD) de l’Ontario. Crédit image : Facebook

Mme Chouinard croit que dans cette élection, l’électorat de Kingston sera attentif à M. Arthur. Bien qu’elle note que le nombre d’étudiants élevé dans la circonscription peut favoriser le NPD le soir du 7 juin, une abstention de leur part pourrait faire mal à la formation de Mme Horwath dans cette circonscription.

Un lieu où il fait bon vivre

Gary Bennett souhaite faire avancer le développement économique de la ville s’il est élu. À ce titre, il rappelle que de nombreux espaces sont encore inexploités à Kingston, où des résidences peuvent être construites.

« Il ne reste plus d’endroits à développer à Toronto, alors qu’à Kingston, nous pouvons offrir une meilleure qualité de vie pour les jeunes qui veulent fonder une famille », a-t-il expliqué.

Gary Bennett, candidat du Parti progressiste-conservateur (Parti PC) de l’Ontario. Crédit image : Facebook

En faisant référence à la population francophone et à la population étudiante, M. Bennett n’exclut pas de militer pour l’augmentation des cours en français dans la région.


« Le bilinguisme au Canada est un atout et nous pouvons en profiter à Kingston. » – Gary Bennett


Stéphanie Chouinard constate que l’expérience de M. Bennett pourrait lui servir dans cette élection, mais note du même coup que la circonscription de Kingston et les Îles pourrait connaître le même sort qu’à de nombreux endroits dans la province, c’est-à-dire, une vague orange. Dans ce cas, le vote stratégique pourrait faire mal à M. Bennett le jour de l’élection. 

La question des écoles francophones 

Au cours des quatre dernières années, Mme Kiwala rappelle qu’elle a amené plusieurs investissements à Kingston, dont l’agrandissement de l’Hôpital général de Kingston et la création d’une nouvelle école secondaire francophone de 600 places.

« Cette nouvelle école est un vrai accomplissement pour les gens de la communauté francophone. Je doute que si un élu conservateur prend le pouvoir, les francophones aient les mêmes droits », met-elle en garde.

Si elle est réélue, Mme Kiwala souhaite travailler davantage sur les relations avec les communautés. À ce titre, elle entend mettre l’emphase sur les « opportunités pour les nouveaux arrivants ».

Selon Mme Chouinard, Mme Kiwala n’a pas eu la chance de briller en tant que députée d’arrière-ban, mais elle constate que les nombreux financements, notamment pour un troisième pont ou l’école secondaire francophone, pourraient l’aider le jour du vote. 


PROFIL DE LA CIRCONSCRIPTION* :

Population : 117 545

Revenu total moyen : 46 927 $ (Moyenne provinciale : 47 915 $)

Proportion de francophones : 3,55 %

Historique de la circonscription  Gouvernement Député Parti
1990-1995 Rae (NPD) Gary Wilson NPD
1995-1999 Harris (PC) John Gerretsen L
1999-2003 Harris/Eves (PC) John Gerretsen L
2003-2007 McGunity (L) John Gerretsen L
2007-2011 McGuinty (L) John Gerretsen L
2011-2014 McGuinty/Wynne (L) John Gerretsen L
2014-2018 Wynne (L) Sophie Kiwala L

Notes : L = Parti libéral, NPD = Nouveau Parti démocratique, PC = Parti progressiste-conservateur, et IND = Indépendant

Le découpage territorial de la circonscription de Kingston et les îles. Crédit image : Élections Ontario

Informations obtenues selon le recensement de Statistique Canada en 2016


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