Une délégation franco-ontarienne au Parlement francophone des Amériques

Une délégation de Franco-Ontariens participe au Parlement francophone des jeunes des Amériques. Crédit photo: Rym Ben Berrah

[TÉMOIGNAGES]

QUÉBEC – 33 millions de citoyens qui vivent sur le continent américain parlent le français. De jeunes leaders de cette « Amérique francophone » participent ces jours-ci à un parlement jeunesse, une rare occasion pour eux d’échanger avec d’autres francophones qui font une différence dans leur milieu. Une poignée de Franco-Ontariens, qui tiennent à prendre leur place dans cette francophonie mondiale, sont du nombre. Trois d’entres-eux témoignent de leur expérience au Parlement francophone des jeunes des Amériques.

ÉTIENNE FORTIN-GAUTHIER
efgauthier@tfo.org | @etiennefg

« Il faut comprendre la francophonie dans sa globalité » – Rym Ben Berrah

Rym Ben Berrah, jeune leader franco-ontarienne active dans bon nombre d’organismes francophones, participe au Parlement francophone des jeunes des Amériques pour la seconde fois. « C’est important, car ça nous ouvre à la pluralité de la francophonie dans le monde. Pour faire avancer les dossiers francophones, il faut comprendre la francophonie dans sa globalité », dit-elle. « Grâce à mes échanges avec d’autres jeunes qui participent à ce parlement jeunesse, je me suis rendue compte que le français suffoque encore plus dans d’autres régions et donc, ça me sensibilise à l’importance de s’unifier pour soutenir le français. »

Que de jeunes Franco-Ontariens participent à de tels événements d’envergure internationale participe à bâtir la notoriété de l’Ontario français, se réjouit-elle. « Certains me disent : tu habites en Ontario et tu parles un français comme ça? Ils semblent étonnés! À l’extérieur, on ne connaît pas toujours la francophonie minoritaire, donc c’est important d’être aussi actif et visible dans ces institutions. » Et les amitiés qu’elle a pu bâtir changent sa vision du monde. « Quand tu regardes les nouvelles tous les soirs, ce n’est plus la même chose. On parle de ce que vivent tes amis sur les réseaux sociaux. Ce n’est pas des événements qui se passent loin, ce sont des choses qui touchent quelqu’un que je connais », confie Rym Ben Berrah.

« Je suis fier de mon accent. Nous avons tous un accent! » – Liam Roche

Liam Roche parle de la « découverte » qu’il a faite d’un univers francophone méconnu grâce au rassemblement. « Un parlement jeunesse international m’a permis de tout mettre en perspective. J’ai réalisé que ma réalité de jeune Franco-Ontarien d’Ottawa est complètement différente de celle des autres jeunes que j’ai rencontré », a-t-il confié. Tous partagent une langue commune, mais la manière de s’exprimer de chacun est différente et ça ne pose pas de problème, se réjouit-il. « J’ai rencontré des gens de Puerto Rico, d’Haïti et de Moncton, notamment. On parle tous à notre façon, mais nous nous comprenons et apprenons l’un de l’autre », dit Liam. « Je suis fier de mon accent, nous avons tous un accent! », renchérit-il .

Pendant son séjour, il a été invité à étudier un projet de loi fictif et à convaincre les 70 délégués de partout en Amérique de la validité de son initiative. « J’ai pu apprendre à négocier avec des gens qui ont des visions différentes. Cela me sera utile de retour à la maison, car la communauté franco-ontarienne est aussi diverse et nous sommes appelés à convaincre des gens qui pensent différemment », fait-il valoir. Il compte aussi aider les nouveaux Ontariens qui s’établissent dans la province. « Avant de venir à ce parlement jeunesse, je n’étais pas aussi sensibilisé à la réalité des nouveaux arrivants. Je réalise comment la transition doit être difficile en en apprenant sur leur pays d’origine », souligne-t-il.

« Le français ouvre des portes! » – Samantha Puchala

« Grâce au français, je participe à cet événement. C’est une langue qui ouvre des portes! », confie avec fierté Samantha Puchala, originaire de London. Elle estime essentiel que la nouvelle génération de Franco-Ontariens « prenne sa place » dans la francophonie mondiale. Le Parlement francophone des jeunes des Amériques illustre comment le français est une « langue cool » qui peut permettre de tisser des liens forts avec d’autres francophones et francophiles.

La candidate avocate au Barreau de l’Ontario a pu échanger avec d’autres jeunes professionnels et s’exposer à des réalités différentes. « J’ai pu parler avec d’autres personnes dans mon domaine. J’en apprends sur les lois dans d’autres pays », dit-elle. « On parle de liberté de la presse, de corruption, des lois d’autres pays, de plein de sujets importants », ajoute-t-elle. Des discussions qui peuvent permettre de réelles retombées, car cela pourra l’inspirer dans certains de ses projets, dit-elle.

Une semaine de rencontres et d’échanges

Le moment était solennel. Le mardi 10 juillet, les participants se sont dirigés à l’Assemblée nationale du Québec, où se tiendront les travaux du parlement jeunesse, pour être assermentés. Tour à tour, différentes personnalités politiques ont honoré leur travail et souligné la nécessité de pouvoir compter sur une relève francophone dans les différents gouvernements du pays.

Pendant leur séjour, les participants auront aussi eu l’occasion de rencontrer et de discuter avec plusieurs grands noms de la vie publique. Christiane Taubira (ancienne ministre française de la Justice), Greg Selinger (ancien premier ministre du Manitoba), Françoise David (ancienne députée de Québec solidaire) et Michaëlle Jean (secrétaire générale de la Francophonie) pour ne nommer que ceux-là.

« Nous tissons de l’humanisme au sein de la francophonie », affirme Denis Desgagné, président-directeur général du Centre de la Francophonie des Amériques, qui organise le Parlement. « On donne à ces jeunes un espace pour partager ensemble. Nous provoquons cette rencontre et nous allons les outiller pour qu’ils puissent faire rayonner la francophonie dans leur communauté », explique-t-il.

Au fait de l’état du français en Amérique, il constate les défis pour le français sur le continent. « Je suis émerveillé de voir l’attraction du français. Mais nous n’avons pas les moyens pour nourrir cette passion. Il manque de professeurs de français pour répondre à cette demande », observe-t-il. « Chaque citoyen doit aussi se réveiller pour faire rayonner le français, ce n’est pas juste aux gouvernements d’agir, il faut tous se mobilier », dit M. Desgagné.

L’événement est présenté en collaboration avec l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) qui se réunissait à Québec cette semaine.