Une « journée historique » pour la sécurité linguistique

Des participants en discussion au Symposium national sur la sécurité linguistique. Gracieuseté: FJCF

OTTAWA – Le Symposium national sur la sécurité linguistique s’est conclu, ce samedi, avec la volonté de poursuivre la discussion. Pour la Fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF), il s’agissait d’une « journée historique » dans la réflexion autour de cette problématique.

Le thème de l’insécurité linguistique mobilise la FJCF depuis 2014, et ce samedi à Ottawa, l’organisme jeunesse a franchi une dernière étape dans la création d’une première stratégie nationale pour la sécurité linguistique en rassemblant jeunes et moins jeunes, issus de tout le Canada et de différents secteurs, afin de trouver des pistes de solution.

Josée Poirier-Crête était venue représenter l’Association canadienne d’éducation de langue française (ACELF), mais aussi par intérêt personnel et professionnel, comme enseignante en affectation spéciale en construction identitaire au Conseil des écoles catholiques du Centre-Est (CECCE).

« Les enseignants en milieu minoritaire exercent le rôle de modèle, de passeur et de médiateur culturel. On transmet aux élèves des référents culturels et ce qui se passe en francophonie canadienne. Ce que je trouve intéressant aujourd’hui, c’est l’idée de s’ouvrir à la diversité. On a beaucoup à gagner à reconnaître et apprécier les accents. De plus en plus d’élèves dans nos écoles viennent d’ailleurs, ils ont tout un monde à nous partager et ça enrichit notre culture francophone. »

Josée Poirier-Crête. Crédit image : Benjamin Vachet

Pour le résident des Territoires-du-Nord-Ouest, Xavier Lord-Giroux, l’insécurité linguistique se vit différemment, selon l’endroit.

« Aux Territoires-du-Nord-Ouest, c’est un peu différent, car nous sommes peu nombreux et parce qu’il y a des langues autochtones qui sont plus parlées que le français. On veut revendiquer plus de services, plus de droits, mais l’insécurité vient peut-être du fait qu’on se sent un peu imposteur quand on est francophone, même si c’est une langue officielle. »

Originaire de Vancouver, Emily Deering veut aider celles et ceux qui, comme elle, vivent de l’insécurité linguistique.

« Quand je suis allée au Québec, j’ai réalisé que mon français était différent… Mais ensuite, j’ai rencontré d’autres jeunes et j’ai vu que je parlais comme eux. Je me suis dit que d’autres jeunes devaient donc se sentir comme moi et ça m’a donné envie de m’impliquer. »

Emily Deering. Crédit image : Benjamin Vachet

L’importance d’en parler

Si les expériences diffèrent d’un individu à l’autre, s’accordent les quelque 150 participants, l’importance de parler de l’insécurité linguistique fait l’unanimité.

« Je pense que de se parler entre nous est un bon départ », lance Mme Poirier-Crête.

Un avis que partage M. Lord-Giroux, qui attend maintenant la suite.

« L’initiative de ce symposium est tombée à point. Les gens avaient beaucoup à dire sur leurs expériences. C’est un sujet dont on a envie de parler. On a entendu beaucoup d’histoires intéressantes. Maintenant, il va falloir voir comment transposer ça dans des actions concrètes qui vont mener à des changements positifs. »

Quelles solutions?

Car l’objectif du symposium était de nourrir la création d’une stratégie nationale sur la sécurité linguistique, qui devrait être dévoilée au printemps 2020. Des discussions et panels, quelques pistes ont déjà émergé.

« À notre table, il a beaucoup été question de ce qu’on peut faire dans nos provinces avec nos politiciens pour amener des mesures positives pour les services en français », partage notamment M. Lord-Giroux.

De gauche à droite, les panélistes, Marco Dubé, François Boileau et Daniel Bourgeois. Gracieuseté : FJCF

D’autres ont été interpellés par les propos du directeur général du cabinet de la présidente-directrice générale de Radio-Canada Catherine Tait, Marco Dubé, lors du panel en matinée. Ce dernier appelait tout un chacun à devenir acteur de changement. Certains participants se sont donc engagés, par exemple, à demander leurs services en français, malgré la gêne, ou à servir de modèle d’engagement francophone pour leurs enfants, comme se l’est promis l’Ottavien Serge Quinty.

Promouvoir les langues officielles – notamment dans le cadre du 50e anniversaire de la Loi sur les langues officielles, comme a insisté l’ancien commissaire aux services en français de l’Ontario, François Boileau – faire de la sensibilisation aux accents et aux multiples contours de la francophonie canadienne ou encore normaliser les différentes façons de parler… Voici d’autres idées qui pourront nourrir la future stratégie nationale.

« Toutes les idées vont être regroupées avec celles des sondages et des consultations que nous avons déjà menés », explique la présidente de la FJCF, Sue Duguay. « Les expériences sont différentes, mais l’objectif est commun. Et même si je ne pense pas que ce sera une seule solution applicable partout, le but, c’est que cette stratégie soit ressentie sur le terrain et accessible à tous. Si ce projet ne s’adresse qu’aux politiciens ou aux présidents des organismes, je serais un peu déçue. »

Pour Mme Deering, la solution est évidente et l’optimisme est de mise.

« Il y a beaucoup de personnes, des jeunes, des adultes, qui veulent faire avancer cette cause. Ce qu’il faut, c’est continuer de parler en français! »