2020 en dix moments marquants pour les francophones
Dans quelques heures, 2020 sera derrière nous. Tant mieux diront certains, au regard d’une année compliquée par la crise sanitaire et les tensions politiques. Retour en images sur les dix moments clés pour les Franco-Ontariens.
16 janvier. Amanda Simard passe chez les libéraux
Depuis le 29 novembre 2018, date de sa démission avec fracas du Parti progressiste-conservateur, Amanda Simard siégeait comme indépendante à Queen’s Park. Le 16 janvier, la députée de Glengarry-Prescott-Russell rejoint officiellement le Parti libéral de l’Ontario.
Dans la foulée, Mme Simard est nommée porte-parole de son parti pour les Affaires francophones. Un rôle crucial dans une année 2020 où – on ne le sait pas encore – l’importance de la pandémie tendra à mettre sous le boisseau les dossiers francophones.
Début 2020 marque aussi un certain renouvellement du Parti libéral provincial. Le 27 février, Lucille Collard et Stephen Blais sont élus dans les circonscriptions d’Ottawa-Vanier et Orléans. Quelques jours plus tard, Steven Del Duca devient le chef du parti.
21 février. Les syndicats à l’unisson contre le gouvernement Ford
Au cœur de l’hiver, le ton monte entre le gouvernement Ford et les syndicats enseignants. L’incapacité des deux partis à s’entendre pour le renouvellement des conventions collectives amène un conflit. Le 13 février, l’Association des enseignantes et enseignants franco-ontariens (AEFO) déclenche son plus fort mouvement de grève depuis… 1997. Huit jours plus tard, le syndicat s’entend avec les trois autres syndicats anglophones pour une journée d’action commune.
L’enjeu? La hausse des salaires des enseignants, l’augmentation de la taille des classes, et la mise en place de l’apprentissage numérique.
En mars, syndicats et gouvernement parviennent à trouver un accord. Mais tout au long de l’année, les soubresauts de la pandémie et ses conséquences dans les écoles mettent en lumière le bras de fer constant entre l’équipe Ford et les enseignants.
17 mars. L’Ontario déclare l’état d’urgence sanitaire
Dans un premier temps, le coronavirus n’est qu’un mot lointain. Mais tout s’accélère le 11 mars lorsque l’Université Laurentienne ferme son campus à la suite d’une première contamination. Le lendemain, le ministre Stephen Lecce annonce que les écoles emboitent le pas. Le 17 mars, le premier ministre Doug Ford déclare l’état d’urgence sanitaire.
Cette première vague de la pandémie est particulièrement meurtrière dans la province, qui enregistre environ 2 000 décès au printemps. Deux tiers des personnes succombant au coronavirus sont des résidents des centres d’ainés et des foyers de soins de longue durée.
Si les régions à forte concentration francophone (le Nord et l’Est ontarien) sont relativement épargnées par l’épidémie, des drames se nouent dans les foyers de soins de longue durée. Trente résidents succombent à la COVID-19 au Centre de soins de longue durée Montfort, 15 à la Résidence Élisabeth-Bruyère, et onze au Centre Pinecrest à Plantagenet.
13 mai. Le Campus Saint-Jean en Alberta menacé
Au printemps, les Franco-Albertains retiennent leur souffle. Le 13 mai, l’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA) lance une campagne de mobilisation nationale pour sauver la seule institution postsecondaire francophone de sa province, menacée de disparaitre.
La raison? Les compressions budgétaires annoncées par le gouvernement provincial conservateur de Jason Kenney en matière d’éducation postsecondaire rendent la situation intenable. Pour ne rien arranger, les deux paliers gouvernementaux, tout comme l’Université de l’Alberta se renvoient la balle sur la responsabilité de cette impasse.
Aux dernières nouvelles, l’ACFA et l’Université de l’Alberta sont en pourparlers quant à l’avenir du campus. Si la menace d’une disparition semble s’étioler, on ne connaît pas encore la part d’indépendance qu’acquerra le campus.
5 juin. Le genou à terre de Justin Trudeau contre le racisme
Le 25 mai, la mort de l’américain noir George Floyd, asphyxié par un policier blanc, déclenche une émotion et des manifestations mondiales. Au Canada, les débats se multiplient sur le thème de l’inclusion des personnes noires.
Pancartes en main, des milliers de personnes manifestent. Le 5 juin, lors d’un rassemblement devant le Parlement à Ottawa, le premier ministre Justin Trudeau pose symboliquement son genou à terre.
Du côté des Franco-Ontariens, cette vague de contestation est l’occasion de remettre sur la table le dossier de l’inclusion. Beaucoup d’organismes franco-ontariens sont montrés du doigt pour ne pas assez faire la promotion de la diversité raciale. Début juillet, la Coalition des Noirs francophones de l’Ontario (CNFO) dévoile son conseil d’administration, tout en restant pour le moment discrète sur ces enjeux cruciaux.
24 août. Un nouveau chef de l’opposition, mais pas de modernisation de la LLO
Dans la nuit du 23 au lundi 24 août, Erin O’Toole aux termes de plusieurs heures de décompte, devient chef du Parti conservateur du Canada. Une victoire obtenue aux dépens de Peter McKay dont le français laborieux avait suscité la polémique pendant la course à la chefferie.
Pour le nouveau chef de l’opposition à la Chambre des communes, l’objectif est de marquer la rupture avec le gouvernement libéral de Justin Trudeau, sorti quelque peu déplumé et minoritaire des élections fédérales en octobre 2019.
M. O’Toole, qui n’hésite pas à parler des « deux peuples fondateurs », s’engage très vite pour une modernisation de la Loi sur les langues officielles. Les libéraux traînent la patte sur ce dossier depuis plusieurs années. La Fédération des communautés francophone et acadienne (FCFA) exige toujours l’adoption d’une nouvelle loi avant mai 2021.
3 septembre. Une rentrée scolaire inédite
Jamais une rentrée scolaire n’aura créé autant d’angoisse. Le 3 septembre, des milliers d’élèves sont de retour sur les bancs de l’école. Un retour en classe unique marqué par les mesures de distanciation sociale, mais aussi le port du masque à partir de la 4e année.
Le plan du gouvernement ontarien, qui prévoit au secondaire une limitation à 15 élèves par classe, est imposé dans 24 conseils scolaires dits « désignés ». Autant de mesures qui n’éteignent pas les critiques : manque d’argent attribué aux conseils scolaires, inégalité des mesures dans des écoles sur un même territoire, ou encore la distanciation jugée par certains beaucoup trop faible.
Au début de l’automne, l’arrivée de la seconde vague épidémique oblige le gouvernement à la fermeture de quelques écoles. Devant la hausse inquiétante du nombre de cas, le gouvernement décrète le 21 décembre un confinement général, lequel englobe cette fois l’intégralité des écoles.
22 septembre. Le drapeau ontarien emblème provincial
À quelques jours du 45e anniversaire du drapeau franco-ontarien, le gouvernement conservateur décide de faire de la « fleur de lys et la fleur de trille » le 8e emblème provincial. Le projet de loi présenté par la députée Natalia Kusendova est adopté à l’unanimité à Queen’s Park. En 2001, la province l’avait déjà reconnu comme emblème des Franco-Ontariens.
Traditionnellement réservée à un ou plusieurs « bonbons » pour les francophones, la Journée des Franco-Ontariens est l’occasion d’une autre annonce. Les caractères français comme les accents et les cédilles sont ajoutés sur les permis de conduire. Le gouvernement débloque aussi une aide de 500 000 $ destinée aux entreprises franco-ontariennes.
Ces coups de pouce sont certes dénoncés par l’opposition qui attend davantage du mandat de la ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney. Parmi les cibles encore non atteintes : la modernisation de la Loi sur les services en français, et le retour à l’indépendance du bureau du Commissariat aux services en français.
15 octobre. Début de la polémique à l’Université d’Ottawa
Tout part d’une chronique de la journaliste Isabelle Hachey parue dans La Presse. On y apprend la suspension de la professeure de l’Université d’Ottawa, Verushka Lieutenant-Duval, par l’administration de l’institution bilingue à la suite de l’utilisation du « mot en n » en entier dans un cours. La professeure faisait mention de la façon dont la communauté noire afro-américaine s’était réapproprié le terme avec l’utilisation par la communauté gaie du mot « queer », à l’origine une insulte.
En quelques jours, tout s’enchaîne : 34 professeurs de l’Université d’Ottawa montent au front pour soutenir leur collègue, le recteur Jacques Frémont défend les étudiants, condamnant les « micro agressions », les politiciens s’en mêlent. Les quatre principales formations politiques au Québec soutiennent la liberté académique de la professeure, tandis qu’au fédéral, le gouvernement Trudeau condamne à mots feutrés les mots de Mme Lieutenant-Duval.
Deux mois et demi après l’incident, le calme n’est pas revenu à l’Université d’Ottawa. M. Frémont, critiqué par les militants anti-racistes tout comme les partisans de la liberté d’expression, semble de plus en plus isolé.
7 décembre. Damien Robitaille puissance 10 millions
Dans cette année de grisaille et tristounette, rares sont les éclaircies. Damien Robitaille en est pourtant une. Depuis le début de pandémie, le chanteur originaire de Lafontaine a pris l’habitude de reprendre ses propres titres et des chansons de tous les styles qu’il s’empresse de partager sur les médias sociaux.
Sa persévérance est récompensée le 7 décembre lorsque sa 137e vidéo, dans laquelle il reprend Pump up the Jam, atteint les 10 millions de vues sur l’ensemble de ses médias sociaux à travers le monde.
Outre cette performance remarquable, Damien Robitaille devient le symbole d’une génération d’artistes, privée des salles de spectacles, mais utilisant tant bien que mal les médias sociaux en attendant des jours meilleurs…