Les étudiants préparent une rentrée universitaire peu ordinaire
[TÉMOIGNAGES]
D’ici quelques semaines, ils seront de retour aux études. Après une session terminée à distance, les étudiants se préparent à un automne tout aussi particulier à cause de la COVID-19. Entre fatalisme et regret.
Pour sa première année au postsecondaire, Yasmine Zemni s’attendait à toute autre chose. La Franco-Ontarienne fera ses premiers pas dans le monde universitaire à distance, en septembre, à l’Université d’Ottawa où elle est inscrite en sciences biomédicales.
« Je suis un peu déçue, car je m’attendais à vivre l’expérience universitaire à fond. J’espère que ce sera possible en hiver. »
Lia Charlebois, d’Hawkesbury, débutera un baccalauréat en sciences de la santé, dans la même institution.
« Je devais déménager en appartement, mais je vais finalement devoir rester à la maison… »
Les deux futures étudiantes sont toutefois bien conscientes des risques sanitaires liées à la pandémie. Pour certains, il est même rassurant que les universités restent tout ou en partie fermées.
« J’aurai la majorité de mes cours à distance et ça me satisfait, car il y aura moins de risque de contagion », explique Sara Elyoubi, étudiante internationale au programme d’orthophonie de l’Université Laurentienne.
Étudiante en troisième année en économie et commerce au campus Glendon, à Toronto, Hermine Bossombra, se montre optimiste.
« Avec le déconfinement progressif, ce sera moins stressant. Il y aura sûrement des endroits accessibles et je ne serai pas forcée de travailler dans ma chambre ou mon salon », dit cette étudiante venue de France.
Des défis d’apprentissage à prévoir
À l’Université d’Ottawa, la vaste majorité des cours seront offerts en ligne, indique l’institution, ce qui comportera forcément des défis pour les étudiants.
« C’est difficile de rester motiver à distance, je l’ai vécue ces derniers mois au secondaire. La première année à l’université est souvent la plus difficile, là je vais être toute seule face aux problèmes, sans les rencontres et l’entraide qu’on peut avoir en étant sur place », regrette Mme Charlebois.
Ancienne élève du baccalauréat international à l’École secondaire publique Gisèle Lalonde, Mme Zemni n’a pas suivi beaucoup de cours en ligne, dit-elle. Elle se montre donc impatiente de découvrir ce nouveau type d’apprentissage.
« C’est sûr que c’est toujours plus facile de rester motivé quand on est entouré d’autres étudiants. Mais on voit que les professeurs font des efforts. J’ai déjà eu un contact avec mon professeur de chimie, en juin. »
Plusieurs de ses amis ont toutefois décidé de repousser leur entrée à l’université, selon elle, à cause des conditions particulières qu’impose la pandémie.
Se préparer psychologiquement
Étudiante en deuxième année de criminologie à l’Université d’Ottawa, Noemie Sigouin, d’Orléans, reconnaît que la fin de session dernière a été difficile. Elle a toutefois décidé de suivre un cours lors de la session d’été et se prépare pour la reprise, le 3 septembre.
« J’essaie de me préparer de façon différente. J’ai refait ma chambre, je me suis fait un côté bureau, je vais aussi me faire une routine quelques jours avant la reprise… Je me prépare psychologiquement, car je sais que la charge de travail sera plus importante et que ça m’obligera à être plus sur mon ordinateur. J’aurais préféré un format hybride. »
Un peu stressée à l’approche de la rentrée, elle espère pouvoir compter sur davantage de soutien, car cet hiver, dit-elle, « on nous a un peu laissés nous débrouiller seuls ».
« C’est stressant », acquiesce Lia Charlebois. « J’espère qu’on va avoir du soutien, que les profs seront disponibles pour des réunions individuelles, car à distance, c’est beaucoup moins facile de poser des questions… »
Après l’expérience du printemps, Hermine Bossombra en convient, un retour en classe aurait été préférable, alors que la majorité des cours, à l’Université York, sera donnée à distance.
« J’aurais aimé un retour complet en personne, car nous sommes une petite cohorte. Nos classes ne sont pas pleines comme des amphithéâtres. Mais je comprends l’université de ne pas vouloir faire une exception pour Glendon. »
À un semestre de l’obtention de son baccalauréat, Sara Elyoubi juge que son expérience des cours à distance a jusqu’ici été assez positive.
« On a des enseignants pour chapeauter, des réunions régulières… Je ne suis pas inquiète, même si j’attends encore quelques détails. »
Baisser les frais de scolarité
Compréhensifs de la situation exceptionnelle actuelle, les étudiants aimeraient que les universités fassent un effort sur les frais de scolarité.
« Les universités doivent s’adapter aux défis financiers des étudiants en baissant les frais pour refléter les économies réalisées avec moins d’élèves et de personnel sur place », pense Mme Zemni.
Mme Sigouin a signé une pétition en ce sens, en juin, adressée au premier ministre Doug Ford, et qui a recueilli 2 243 signatures, sans résultat toutefois.
Jointes par ONFR+, l’Université Saint-Paul, l’Université York, l’Université de Hearst et l’Université Laurentienne rappellent avoir déjà dû subir une baisse de 10 % des frais de scolarité, en 2019, imposée par le gouvernement. Ces institutions ne prévoient pas de baisse générale, sauf pour certains frais afférents, car la qualité de l’enseignement est maintenue, insistent-elles.
L’Université York maintient même l’augmentation de 10 %, votée en 2019, pour ses étudiants internationaux, tout en mettant en place des possibilités de bourses.
« Même à distance, les cours seront innovants et engageants. De plus, les différentes équipes d’appui et administratives demeurent accessibles, même à distance », assure Lysann Boisvert, directrice des communications et des liaisons à l’Université de Hearst.
Maintenir cette qualité nécessite des moyens financiers, souligne la rectrice de l’Université Saint-Paul, Chantal Beauvais, qui indique que « malgré la hausse des inscriptions », son université « encourra tout de même un déficit en raison du réajustement de la formule de financement, de la réduction et du gel des droits de scolarité » par le gouvernement.
« Et l’université n’a reçu que 8 000 $ en guise de soutien provincial dans le contexte de la pandémie », ajoute Mme Beauvais.
Au moment de publier cet article, l’Université d’Ottawa n’avait pas indiqué ses intentions quant à ses frais de scolarité.