Qui est Stéphane Sarrazin, nouveau député à Queen’s Park?
PLANTAGENET — Stéphane Sarrazin est un touche à tout politique. L’engagement, la communauté et tout ce qui touche les habitants de sa région, c’est son idée fixe. L’ancien maire d’Alfred et Plantagenet est depuis le 2 juin député parlementaire à Queen’s Park. Il a succédé à Amanda Simard dans la circonscription de Glengarry-Prescott-Russell et est aussi le nouvel assistant parlementaire du ministre à l’Énergie, Todd Smith.
C’est à Plantagenet au restaurant Place 19-67 que nous retrouvons Stéphane Sarrazin. Dans ce petit restaurant, on nous accueille en français. « Bonjour, pour une personne? », nous demande la tenancière. « Nous rejoignons Stéphane Sarrazin », indiquons-nous, « Installe-toi, je l’appelle! ».
La retenue laisse soudain place à un accueil très chaleureux. Évidemment, Stéphane Sarrazin est connu comme « le loup blanc » ici. Nous sommes chez lui, après tout.
Quelques minutes plus tard, c’est un grand monsieur qui nous rejoint, à la poigne d’enfer.
Ancré dans sa communauté
Stéphane Sarrazin est né à Alfred en 1968. Alfred et Plantagenet, c’est son terroir. Il connaît chaque recoin des sept villages que comprend la municipalité (Alfred, Curran, Lefaivre, Plantagenet, Pendleton, Treadwell et Wendover).
C’est à Alfred que l’homme de 54 ans a grandi et fondé sa famille. Le nom de la ville vient d’ailleurs de François-Eugène-Alfred Évanturel qui était le président de l’Assemblée législative de 1898 à 1902. Il est le seul francophone, à ce jour, à avoir été président. « Son siège de président a été rapatrié au sein de l’église d’Alfred », explique M. Sarrazin.
« Mes parents étaient d’Alfred aussi. On ne peut pas faire plus local », précise-t-il. « Puis j’ai deux filles, une de 18 ans, qui va nous quitter pour aller au Collège La Cité et ma plus jeune qui à 14 ans. »
À la question, « comment allez-vous gérer l’emploi du temps, père et politicien? », l’élu provincial avoue que c’est dur. « J’ai manqué mon assermentation avec les autres députés, car c’était la graduation de ma fille. Le rôle de parent, cela m’est très important. Je ne serai pas forcément moins présent, mais c’est vrai que beaucoup de choses vont se dérouler à Toronto. Il y a un équilibre à trouver. »
Son parcours professionnel apporte une certaine compréhension de l’homme politique. « J’ai été maire pour la municipalité d’Alfred et Plantagenet, c’est une population d’environ 10 000 habitants », dit-il avec fierté, en tendant le bras vers la fenêtre. La mairie est en face de nous : de nos sièges nous voyons le drapeau franco-ontarien qui flotte devant l’hôtel de ville. Stéphane Sarrazin a été ici le premier magistrat de 2018 à 2022.
« Ce sont mes collègues maires qui m’ont incité à avoir une voix à la province » - Stéphane Sarrazin
Les habitants, M. Sarrazin, les connaît bien. « Beaucoup d’agriculteurs, quelques industries légères aussi et c’est très familial. Cette communauté est particulièrement bien située pour les familles travaillants entre Ottawa et Montréal. C’est ce qu’on appelle des villages-dortoirs. »
Ce qui semble aussi important pour lui, c’est l’aspect communautaire et francophone de la région. « En réunion on est à 80 % francophone ». Et d’ajouter : « Ça paraît changer, c’est vrai. On dirait qu’il y a plus d’anglophones, mais ce n’est pas mal perçu. Il faut s’ajuster, c’est tout. »
Comprendre son village, c’est comprendre Stéphane Sarrazin. Bien qu’il faille emprunter une diagonale du vide pour atteindre ce coin de paradis, M. Sarrazin nous en parle comme d’un endroit aux multiples avantages. Il n’y a aucun doute, cet Alfredois aime son fief. « Il y a de grandes chances, ici, d’entrer dans un commerce où d’abord, on va s’adresser à vous en français », se ravit-il.
Il poursuit : « Avec la COVID-19, les gens ont quitté la ville et la croissance résidentielle est palpable. »
« Les gens veulent un plus grand terrain », affirme-t-il, « et avec la pandémie, les gens qui travaillent de la maison ont vu la possibilité de travailler de chez eux, mais ici ».
S’engager pour du mieux
Stéphane Sarrazin n’est plus maire depuis son élection au provincial, mais se dit encore très impliqué avec les ex-homologues des communes d’Alfred et Plantagenet. « Vous savez, j’ai été président des Comtés unis de Prescott et Russell et leurs huit municipalités. On avait huit responsables à la table. Ce sont mes collègues maires qui m’ont incité à avoir une voix à la province. »
Selon le député en herbe, sa voix auprès de la province sera celle des localités. Il dit vouloir être le pont entre les deux. « Je suis élu par ces gens et je suis là pour les servir. »
« Investir dans les gens, c’est le plus bel investissement qu’on peut avoir » – Stéphane Sarrazin
L’élu de l’Est est un inconditionnel de l’engagement, une valeur qu’il partage avec son entourage. Sa carrière bien remplie l’a amené à être aujourd’hui adjoint au ministre de l’Énergie en Ontario.
« J’ai siégé deux ans au bureau de la conservation de la Nation Sud, sur le bureau de santé de l’Est ontarien, deux ans sur le tourisme Prescott-Russell ou encore au réseau agroalimentaire de l’Est ontarien. »
Ses états de services ne sont pour lui que l’expression de sa passion. « Mes quatre ans au municipal, j’ai adoré et ça me passionne encore », déclare-t-il.
« Ce que j’aime aussi, c’est la connexion avec les autres politiciens, parler des différents défis, partager des idées. »
L’époque où les gens votaient pour des politicards est terminée selon lui. « Les gens votent pour des personnes qui leur ressemblent. Je suis monsieur tout le monde, je n’ai pas de doctorat ni de bac universitaire », reconnaît-il. « J’ai été chanceux dans ma vie, j’ai eu de bons mentors. »
Investir dans son prochain
« Je me lève à 5h30 du matin et je saute sur mon ordinateur. Si ma conjointe ne m’appelle pas, je peux rester là, jusqu’à 22h. Aider les gens, ça me passionne vraiment et j’aime trouver des solutions. »
« Investir dans les gens, c’est le plus bel investissement qu’on peut avoir », clame-t-il.
Il ajoute : « Les ressources, ça ne va pas sans une communauté soudée et en santé. Je suis très proche des gens. J’ai vraiment fait ce parcours malgré moi. »
Aujourd’hui, la relation que Stéphane Sarrazin entretient avec ses anciens confrères est d’une grande nécessité. Au-delà de se tenir informé auprès des maires du canton, le député évoque « une relation de famille ».
« Chaque matin, j’écoute la radio communautaire. Ma peur en passant la moitié du temps à Toronto, c’était de ne pas savoir ce qui ce passe chez nous. »
L’attachement de M. Sarrazin à sa communauté et sa région est manifeste. Il ne laisse presque rien au hasard quand il nous parle des habitants. « À chaque fois que quelqu’un me parle, j’essaie de me mettre dans sa situation. On ne peut pas voir tout en noir ou blanc, parfois, il faut aller dans le gris. »
Des valeurs qu’il pense avoir reçues de son père. « Il aimait aider les gens. Je me souviens pendant la crise du verglas, mon père était électricien et il allait brancher des génératrices à tout le monde. Il a toujours été prêt à aider son prochain. »
Une vertu qu’il essaie d’enseigner à ses filles. « C’est plus difficile qu’on le croit, en plus, on sort de deux ans de pandémie. Ma fille de 18 ans est super bonne, elle se débrouille, elle a son auto, elle travaille au Tim Hortons. On ne peut pas demander mieux. »
« Chacun son parcours, mais nos filles me voient en politique, alors c’est sûr que si elles s’engagent dans la communauté, ça me plairait et ça pourrait très bien arriver. »
Un homme du rural
« Mon premier métier était électricien », révèle-t-il. « Mon tremplin en politique, c’est compliqué parce que je n’ai jamais vraiment voulu être politicien ».
Mais en 2014, il a été nommé directeur d’une corporation fournissant l’électricité à Plantagenet et à Alfred. Dans la même année, il en est devenu le président. Puis, n’aimant pas la vision du maire à l’époque, M. Sarrazin a changé de trajectoire. « Mon père me disait toujours, « si tu n’es pas content, remplace-les et ne va pas critiquer. Si tu penses être capable de mieux, vas-y ». C’est comme ça que je me suis présenté pour être maire et aujourd’hui, je garde cette philosophie.
« Aider les gens ça me passionne. J’aime trouver des solutions. » — Stéphane Sarrazin.
« Les habitants ont été très contents de mon élection au provincial, d’autres m’ont dit avoir de la peine de me perdre. » Pour lui, le sentiment d’appartenance est important et même si la circonscription de Glengarry-Prescott-Russell est vaste : « Il faut plus d’une heure pour la traverser d’un bout à l’autre ». L’homme politique dira tout de même appartenir au monde rural.
Sans oublier la francophonie
S’agissant des sujets francophones, le député se dit au contact des enjeux. « Ici, c’est la plus grande circonscription francophone de l’Ontario. S’il y a de quoi, cela se passera dans ma cour. »
Le français, pour Stéphane Sarrazin, c’est évidemment important. « On parle le français ontarien ici. » Au fil de notre conversation, on apprend qu’il a de la parenté dans le Nord de l’Ontario vers Sturgeon Falls et Sudbury. « La réalité de notre français, c’est trois mots français, un mot anglais », plaisante-t-il. « D’ailleurs, j’ai un accent français très fort lorsque je parle anglais. »
Ce Franco-Ontarien nous raconte d’ailleurs une récente expérience qui l’a rendu fier. « Quand je suis arrivé à Queen’s Park pour notre première visite, j’étais épaté », se souvient-il. « Je suis arrivé et quelqu’un m’a accueilli en français « Bonjour M. Sarrazin« . Puis, pendant ma visite en chambre, il y avait une classe de francophone en visite aussi. Et là, l’enseignante se tourne vers moi et dit à sa classe : « Je vous présente le député Stéphane Sarrazin de la circonscription de Glengarry-Prescott-Russell, la plus grande circonscription de francophone de l’Ontario« . J’ai trouvé ça génial », conclut-il. « Je n’en revenais pas. »