
À Sturgeon Falls, là où Franco-Ontariens et Québécois se donnent rendez-vous au camping

STURGEON FALLS – Dans la région de Sturgeon Falls, un camping attire chaque été une clientèle majoritairement francophone, venue autant de l’Ontario que du Québec. ONFR a rencontré ceux qui privilégient le tourisme de plein air dans cette région francophone du Nord-Est ontarien.
Dès l’entrée au camping, il n’est pas rare d’entendre les accents québécois et ontariens se mêler aux sons de la nature.
Arrivée hier soir sur le site avec son compagnon, Martine Audet s’est rapidement bien installée au camping KOA de Sturgeon Falls.
« On s’est dit, ce n’est pas loin de chez nous, on va découvrir l’Ontario, ça va faire différent », confie-t-elle, confortablement assise sur une chaise pliante à l’ombre d’un pin devant sa roulotte.

Le couple a parcouru plusieurs centaines de kilomètres avec leur petit compagnon à quatre pattes pour venir profiter quelques jours du camping KOA, sur le bord de la rivière Sturgeon, qu’ils découvrent cette année. À peine arrivés, ils sont séduits et ont décidé de prolonger leur séjour.
« On entend parler français partout, ce qui n’est pas toujours évident ailleurs en Ontario », continue cette coiffeuse de profession qui avoue ne pas savoir parler anglais.
« Ce qui nous a charmés, c’est l’accueil chaleureux et la proximité avec des endroits qu’on voulait visiter, comme Sudbury ou Verner, mais aussi le fait que beaucoup de campeurs parlent français », ajoute à ses côtés Éric Labrecque, qui partage le séjour avec elle.
Francophones majoritaires
Stéphanie Demers, copropriétaire du camping avec son époux, raconte que la clientèle francophone est au cœur de leurs préoccupations.
« Quand un campeur arrive et qu’il entend quelqu’un parler français, ça crée une connexion instantanée. Ça facilite les échanges et ça donne un sentiment de bien-être. »
Elle précise que ce lien avec la francophonie locale et régionale à Sturgeon Falls, où 57 % de cette communauté de la municipalité de Nipissing Ouest a le français comme première langue officielle parlée, est un atout majeur pour attirer les visiteurs.

« Plusieurs familles choisissent ce camping parce qu’elles savent qu’elles trouveront ici une communauté francophone, que ce soit dans les services offerts ou simplement dans les échanges entre campeurs. »
Mme Demers précise qu’environ 60 % des campeurs francophones qui fréquentent le site viennent du Québec et quatre des six employés du camping sont bilingues.
Le camping cherche à renforcer cet ancrage culturel, malgré le fait qu’il fait partie d’une chaîne américaine. « On travaille à rendre nos affiches bilingues, même si ce n’est pas encore officiel », souligne Mme Demers.
Privilégier le local
La fréquentation du camping a augmenté ces dernières années, surtout à cause des incertitudes liées aux frontières et à la pandémie. Le camping vient tout juste de voir quitter plusieurs groupes de la France, de la Suisse, de l’Allemagne et même de la Russie.
« Plusieurs nous ont dit qu’ils avaient prévu d’aller aux États-Unis, mais qu’ils sont finalement restés ici », explique Stéphanie Demers.

« J’avais pensé partir en Floride, comme beaucoup de gens, mais ça a changé, avance Martine Audet. Maintenant, je préfère rester près de mes partenaires de camping, dont un ami de Montréal. C’est vraiment mon style de vacances », ajoute-t-elle.
Le jour de notre visite, en milieu de semaine, le camping affichait presque complet. « Lors des gros week-ends, on accueille jusqu’à 450 personnes, parfois un peu plus avec des espaces improvisés », finit-elle.
La pêche ontarienne
À quelques mètres de la plage, d’autres visiteurs du Québec, eux aussi arrivés la veille, se détendent après avoir fait le ménage dans leur roulotte.
« On aime la paix ici, c’est parfait pour se détendre après une année de travail », lance Étienne Tanguay qui profite d’une boisson fraîche tout en écoutant de la musique.
Venu avec son frère et son épouse, celui-ci explique pourquoi il a choisi de venir en Ontario pour ses vacances : « On voyage n’importe où où il y a du poisson. Que ce soit pour le saumon dans le sud de l’Ontario ou la truite dans le Nord, on s’adapte aux saisons. On est surtout venus pour le doré. »

Pour celui qui est venu de Rouyn-Noranda, la région offre un accès facile à la nature : « Les routes sont vraiment belles comparées au Québec, et l’accueil y est plus chaleureux. »
« Ici, on n’a pas de tarifs pour mettre le bateau à l’eau, alors qu’au Québec, ça peut coûter jusqu’à 400 dollars », explique-t-il, ajoutant que les horaires pour utiliser les rampes de mise à l’eau sont aussi plus souples.
Déjà tombés sous le charme du site, les Tanguay ont donné rendez-vous à des membres de leur famille pour les rejoindre avant la fin de leur séjour au camping.
Un emploi de choix pour les jeunes
Au-delà d’un simple lieu de villégiature, le camping est aussi un espace d’emploi pour plusieurs jeunes francophones de la région.
Hayden Couroux, qui vient tout juste de fêter ses 18 ans, y travaille depuis ses 14 ans. « Ça m’a aidé beaucoup dans la vie », raconte-t-il. Son travail ne se limite pas à servir des clients, il apprend à résoudre des problèmes concrets, comme des coupures d’électricité et à développer des compétences en service à la clientèle.

Pour lui, ce premier travail offre une expérience précieuse dans un contexte où la pénurie d’emploi est criante pour les jeunes canadiens.
Malgré une chaleur éprouvante, le diplômé de l’École secondaire Franco-Cité s’affaire sur le site à bord de sa voiturette, un sourire constant aux lèvres, saluant chaleureusement chaque passant.
Bien qu’il ait prévu de suivre un programme en ligne du Collège Georgian en vente de commerce cet automne, son rêve ultime reste de faire carrière au sein de cette chaîne de campings présente un peu partout au Canada.
« KOA, ce n’est pas juste un travail, c’est une école de vie. »

Esprit de communauté
Ce jour-là, on peut aussi entendre les cris joyeux des enfants revenant d’une balade en tracteur autour du camping tandis qu’une « bonne fête » est chantée avec entrain.
Une activité communautaire impliquant des jeunes de 0 à 6 ans se tient en matinée avec une vingtaine de parents francophones de la région.
Lucie Bureau, praticienne de la petite enfance et responsable de l’activité, décrit : « On y va facilite des groupes de jeu et des sorties en plein air, comme la randonnée en tracteur ou la cuisson de chiens chauds sur le feu. »
Ce programme municipal, soutenu par des services sociaux locaux, a pour but de rapprocher les familles, de renforcer le tissu social et de leur offrir des loisirs accessibles sans qu’elles aient à se déplacer loin.

« C’est la première fois qu’on organise ici, mais les retours sont très positifs », souligne Mme Bureau alors que l’activité touche à sa fin.
Alors que l’heure du check-in approche, de nouvelles roulottes font lentement leur entrée sur le site, ajoutant peu à peu à l’animation déjà présente dans le camping.